Chapitre un: l'enfant désiré

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Thomas Carter connut un début de vie mouvementé. Il naquit dans une petite ville anglaise qu'il lui valut bien vite son charmant accent. Il n'eut pas la chance de rester avec ses parents biologiques. Le père avait quitté le bateau bien avant la naissance du petit et la mère était bien trop occupée avec tous les bambins qui lui couraient déjà dans les jupes pour s'occuper de son petit dernier.

Et pourtant, Thomas avait tout pour être aimé. A deux ans quand sa mère décida que ce n'était plus à elle de s'en charger, il avait pris l'apparence d'un petit ange tout droit tombé du paradis. Il ne pleurait jamais, même quand sa mère le laissait des heures sans manger. A peine avait-il appris à se tenir debout, qu'il avait compris que sa place était là où il ne dérangeait personne. Thomas aurait aimé suivre ses soeurs et frères, courir partout, libre, comme un véritable enfant. Mais, dès que cela lui prenait, il était sévèrement réprimandé.

Heureusement, un jeune couple avait rapidement trouvé le chemin de cette maison. Les Carter, réputés pour avoir la bonté dans l'âme. Le couple essayait d'avoir un enfant depuis des années. Peu de temps après leur mariage, ils s'étaient mis à la tâche, sans succès. Les médecins ne parvenaient pas à trouver l'origine du problème. La balle passait des mains de l'épouse au mari, sans cesse. La médecine de l'époque n'était pas suffisamment évoluée pour que madame Carter puisse avoir la possibilité de porter elle-même son enfant. Leurs proches qui ne supportaient plus de les voir sombrer dans une profonde tristesse, proposèrent un jour, qu'ils optent pour l'adoption.

-Je ne sais pas. Tu comprends, j'ai toujours rêvé de porter mon enfant, de le sentir grandir en moi. Je ne pourrais pas faire ça à mon mari. Ne pas lui donner un enfant. Que dira-t-il de moi?

Ce à quoi son amie lui avait répondue, la rassurant.

-Tu ne vois pas les choses du bon oeil. Ne vois-tu pas comme il te regarde. Tu es une merveille, un trésor à ses yeux. Et puis, un enfant adopté c'est comme le tien. La seule différence est que tu permets à un enfant, qui n'était pas promis à un futur glorieux, d'avoir une bien meilleure vie.

C'était décidé, monsieur et madame Carter allaient avoir un enfant. Ils avaient entendu dire qu'ils devraient s'armer d'une grande patience, que peu d'enfants avaient besoin d'être adoptés dans les alentours. Ils vivaient dans un petit village, où la majorité de la communauté avait l'argent d'élever un enfant ou soit d'engager une nounou à plein temps.

Tout le monde s'était bien trompé, quelques semaines après avoir rempli les dossiers de l'agence d'adoption, ils recevaient déjà un coup de téléphone. Un petit garçon de deux ans, attendait d'être adopté. Ce jour, monsieur Carter était au travail. Néanmoins, il laissa tomber tous les dossiers qu'il avait en main et accourut chercher sa femme. Ils arrivèrent à l'agence en moins d'une demi-heure après l'appel. La directrice était épatée.

-Je dois vous prévenir, Thomas est un petit garçon assez singulier. Il n'est certainement pas l'idée que vous vous faisiez d'avoir un enfant. Il est très solitaire, il ne parle par beaucoup et semble apeuré par un rien. La mère n'avait pas l'air très triste de s'en débarrasser si vous voyez ce que je veux dire.

La bonne femme déballait ses horribles propos alors qu'ils marchaient en direction de la salle de jeu commune. Madame Carter aurait aimé pouvoir répondre mais son mari la retenait par la main, l'empêchant de faire le moindre pas en avant. Ils ne devaient pas se faire remarquer ici et oublier leur objectif premier, l'enfant. La salle commune était immense, elle prenait place dans ce qui devait avoir été une église ou autre. L'architecture était imprimée dans le style gothique, les briques étaient claires, et les carreaux tout petit. Peu d'enfant se trouvaient là. Ils étaient, pour la plupart, âgés de quatre à dix ans, ils jouaient couraient et se disputaient tout un tas d'objet. Tous, sauf un petit garçon, qui restait assis sur une chaise en bois, dans un coin, droit comme un piquet. Il jetait des coup d'oeil furtifs autour de lui, sursautant au moindre bruit. Madame Carter n'attendit pas la permission de la directrice, elle avait compris qu'elle se trouvait face à Thomas. Elle s'approcha de lui, ses talons résonnant contre le carrelage. Elle le regardait avec des yeux émerveillés, c'était bien l'enfant dont elle avait toujours rêvé.

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