Chapitre 32

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Durant le trajet retour, je mis Tamsir sur le banc de touche. Je ne faisais que discuter avec Aminata. Il ne semblait pas s’en vexer pour autant. Ma meilleure amie avait hâte de découvrir la capitale. J’étais comme elle, la première fois que je venais. Pour des villageois comme nous, Abidjan, c’est le Saint-Graal. Un peu comme Paris pour certains abidjanais !

On fit notre arrivée après de longues heures de route. Dans la maison, régnait une atmosphère lourde. Tout le monde avait un air morose. Un malheur semblait s’être abattu sur la famille. Tonton Abdoulaye nous suggéra de s’asseoir avec lui dans le salon. On lui expliqua le déroulement  du voyage et de notre petit séjour au village. On en profita pour lui présenter le cas d’Aminata. Il ne vit aucun inconvénient à ce qu’elle vienne travailler chez lui. Au contraire, ça le soulageait d’un poids. En effet, il venait d’apprendre la grossesse de Léa et cherchait donc une nounou pour son futur bébé. Si Léa était enceinte, pourquoi tout le monde paraissait triste ?

─  J’ai une mauvaise nouvelle à vous annoncer. Malheureusement, Korotoum est décédée hier soir suite à un malaise, informa Tonton Abdoulaye.

Allah y rahmo¹, me contentai-je de dire.

¹: Qu'Allah lui accorde Sa miséricorde.

Aminata, même si elle ne la connaissait pas, répéta la même chose. Tamsir, lui, resta bien silencieux.

─ N’oubliez pas de la porter en prière pour le repos de son âme ! Je ne peux pas tout vous dire mais sachez que Korotoum est passée par de dures épreuves dans sa vie. J’espère que Dieu aura pitié de son âme.

Mon tuteur était loin de se douter que je savais ce qu’il savait, ce qu’il croyait savoir et même ce qu’il ne savait pas sur ce sujet. Jamais il ne sut les atrocités que sa défunte femme avait commises. Il était préférable qu’elle emporte tout ça dans sa tombe. Tonton Abdoulaye garda en tête l’image d’une femme morte en martyr.

Vu que chez nous, les musulmans, l’enterrement ne doit tarder, la première femme de Tonton Abdoulaye fût enterrée le lendemain. Les jours qui suivirent, famille et amis, se succédèrent pour souhaiter leurs sincères condoléances. Apparemment, la défunte avait plusieurs amies. Pourtant, aucune d’entre elles n’avait songé à passer la voir quand elle était malade. Les obsèques, c’est décidément un vrai bal d’hypocrites, pensai-je.

Quelques jours plus tard, l’ambiance pesante qui s’était installée dans la demeure fût totalement balayée. On oublia même qu’une personne y avait rendu son dernier soupir. Chacun reprit ses vieilles habitudes. Pour preuve, le dimanche, après la cérémonie de 7ème jour, on se fit une soirée cinéma. Il y avait Tamsir, Habiba, Adrien, Aminata et moi. Tamsir voulait regarder un film d’action, tandis que sa petite sœur préférait un film d’horreur. Mais, ils furent obligés de s’aligner sur le choix de la majorité qui souhaitait mater un film drôle. Après une demi-heure à parcourir le catalogue, on jeta notre dévolu sur "Le crocodile du Botswanga". Le personnage de Président Bobo m’a fait éclater de rire à plusieurs reprises.

Le lendemain, je repris les cours vu que la grève avait cessé. L’amphi était à moitié vide car la plupart des étudiants avait peur que la FESCI récidive. Au début, je m'en voulais d’être venu car j’estimais que j’aurais dû faire comme eux. Mais avec tout ce que cette journée m’a montré, je ne regrette pas d'avoir été présent ce jour-là. Installez-vous bien, je vous raconte tout !

Durant la pause-déjeuner, avoir fini de manger, je pris la décision de me rendre chez Kolo pour lui présenter mes excuses. Je voulais qu’il me pardonne car je supportais peu l'idée que quelqu'un sur cette Terre m'en veuille. Devant sa chambre, je frappai à la porte, la boule au ventre. J’avais peur qu’il me recale.

BOO BAH !BxB! Où les histoires vivent. Découvrez maintenant