Chapitre 14 : 424 jours

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Gabriel et Thomas allaient devenir des professionnels pour ignorer l'éléphant dans la pièce. Ils tenaient l'un à l'autre, indéniablement mais aucun d'eux n'éprouvait l'envie de labeliser ce truc entre eux. Gabriel encore moins que Thomas.  Le blond avait tenu parole, il était resté la journée avec lui, le suivant comme une ombre sans qu'aucun incident ne soit déclaré. Ils ne croisèrent même pas Teddy alors que celui-ci était bien présent dans le bloc B. Tant mieux dirons-nous.

Les jours suivants, Thomas reprenait sa routine. Même si les premiers jours Gabriel était tendu comme un string, guettant et veillant du mieux qu'il pouvait sur Thomas, il finissait par relâcher sa surveillance, accaparé par le poste de mécanicien qu'il avait obtenu à la suite du départ de l'ancien détenu qui possédait ce poste. Vu le bordel qu'il avait quand même fait dans la prison depuis son arrivée, il avait été surpris d'obtenir ce poste habituellement confié à des prisonniers exemplaires. Toutefois, il n'allait pas exprimer ses pensées à voix haute, il avait appris de ses erreurs et se contenta donc d'apprécier l'occupation.

Ce soir-là, il finissait plus tard qu'à l'accoutumer car le fourgon de transport des prisonniers était tombé en panne. Or, il devait ramener le nouveau lot de prisonniers. Gabriel avait accepté sans rechigner de faire des heures supplémentaires, remerciées par le directeur de la prison par un fast Food bien gras comme il les aimait. Hardi par la confiance du directeur à son égard, il avait osé demander que Thomas bénéficie d'une protection en quartier sécurisé jusqu'à la fin de sa peine. Le directeur était un homme bon, il n'avait pas promis à Gabriel qu'il réussirait mais avait promis qu'il étudierait le dossier de Thomas afin de rendre serein ses derniers mois d'incarcération. C'était déjà un début.

Le lendemain, il ne pouvait se rendre au garage de la prison pour travailler sur la voiture de patrouille des gardiens que l'après-midi, ces derniers étant réquisitionnés pour accueillir les nouveaux détenus. Faire l'entretien du véhicule lui prenait plus de temps que prévu, si bien qu'il ne pouvait se rendre aux douches afin de se débarrasser de la couche de cambouis recouvrant ses mains qu'après l'heure du repas passé. Il passait de très longues minutes sous la douche, profitant des jets d'eau contre ses muscles endoloris avant de devoir rejoindre son lit qui devenait de moins en moins confortable plus les jours passaient. Et il lui en restait un paquet à tirer.

Il avait acquis la sympathie du directeur, si bien qu'il n'était pas accompagné par un gardien. Il en profitait donc pour prendre le temps de se brosser les dents, il avait mangé son repas sur le pouce tout en travaillant. Il était vêtu de vêtements propres quand il traversait la salle des douches à contre sens. Les lumières étaient allumées, ce qui l'étonnait étant donné qu'il était seul, que les lumières étaient à détection de mouvement et que cela faisait bien trente minutes qu'il était dans la salle des lavabos. Prudemment, Gabriel longeait les murs avant de se pencher pour jeter un œil dans les douches, n'ayant pas vraiment envie d'interrompre une coucherie, comme cela devait sûrement arrivé régulièrement à cette heure-ci. Mais il aurait presque préféré au spectacle sur lequel il tombait.

Thomas, il n'y avait pas de doutes c'était bien lui, était allongé, nu et couvert de sang, entre autres substances, sur le sol des douches. Il ne bougeait pas mais le râle rauque émanant de sa personne prouvait qu'il n'était pas encore trépassé. Gabriel courait jusqu'à lui, s'écorchant le genou sur une tuile de carrelage qui dépassait alors qu'il glissait au sol. Délicatement, tout en prononçant le nom de son codétenu, il le retournait pour voir son visage. La haine grandissait dans ses veines alors qu'il constatait l'état affligeant dans lequel était Thomas : le visage tuméfié, les lèvres coupées en plusieurs endroits, les yeux humides de larmes qui continuaient de couler. Il portait également les marques d'un étranglement et d'entraves aux poignets dont la délicate peau blanche était ouverte à vif. Le torse du blond n'était pas dans un meilleur état : des bleus, des contusions, des coupures de partout, trop nombreuses pour qu'il les compte, gâchant la beauté de ses encres. Gabriel devenait fou.

Lcked (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant