C'est une belle fin d'après midi d'été. Le ciel est bleu et dégagé, et une légère brise souffle, faisant voler les feuilles. Je repousse doucement une mèche de cheveux de devant mes yeux. Il fait bon pour la période. Je ressert mes doigts autour de la main de Koko. C'est agréable de se balader avec lui. Bon, tout est agréable avec lui, mais passons. Il ne ressent pas le besoin de parler pour ne rien dire, comme pour combler un vide. Nous restons silencieux et profitons simplement de la présence de l'autre. Il sourit légèrement et caresse le dos de ma main avec son pouce. C'est ça que j'apprécie dans notre relation. Nous n'avons pas besoin de beaux mots et de grands discours pour nous transmettre notre amour. Je souris à mon tour à cette idée, et nous continuons notre marche silencieuse. Quelques minutes plus tard, une grande maison aux allures modernes apparaît au bout de la rue, et aussitôt, Koko lâche ma main. Ça me fait l'impression d'un vide immense, comme si...il me manquait quelque chose d'essentiel pour vivre. J'enfonce mes poings dans mes poches et me rembrunit. Hajime me lance un regard désolé et je hausse les épaules pour lui montrer que je comprends. Je comprends, mais ça fait mal. Devoir se cacher comme ça, comme si le fait de nous aimer était une honte. Avec un dernier regard fuyant et un petit sourire d'excuse, Kokonoi ouvre la porte, avec un "c'est moi, je suis rentré". Presque instantanément, un grand homme en costume à l'allure froide arrive du bout du couloir. Koko se crispe légèrement à sa vu et se redresse inconsciemment.
- Tien, bonjour Inui.
- Bonjour monsieur, je réponds platement avec un sourire de façade.
- On a un devoir à faire tout les deux, explique aussitôt Hajime.
- Encore ? Ça fait beaucoup, Intervient une voix douce et terriblement hypocrite.
Je pince les lèvres et mon "ami" sert les poings, lorsqu'une belle femme brune descend l'escalier. Un démon dans un corps d'ange. La belle mère de Kokonoi, la nouvelle épouse de son père.
- Oui, c'est parce qu'on est en pleine période d'examens, répond Hajime en levant les yeux aux ciel, exaspéré.
La jeune femme plisse les yeux avec un air mauvais mais ne rajoute rien.
- Tu restes pour dîner ? Me demande le père de mon "ami", habitué à ce que je me tape l'incruste.
- Je ne voudrais pas m'imposer.
- Tu vois Hajime, ça c'est un garçon poli, réplique aussitôt sa belle mère d'un ton sournois.
Le principal concerné détourne le regard, se gardant bien de répondre l'une des extravagance qui lui passe sans doute par la tête. Quelle peste !
- Bien sûr que tu peux rester.
- Bon, désolé de vous fausser compagnie, mais on va y aller du coup.
Et sur ces mots, Koko m'attrape le poignet et me tire à sa suite, sans oublier de jeter un regard noir à sa belle mère lorsque nous la dépassons. On gravit les escaliers quatre à quatre, comme si on fuyait, ce qui est sans doute le cas de Kokonoi. Nous traversons le couloir de l'étage tout aussi vite, avant qu'il n'ouvre la porte de sa chambre, me balance à l'intérieur et referme cette même porte avec précipitation. Il s'adosse au battant et soupire longuement, rejetant sa tête en arrière. Je me mord la lèvre. Il me fait de la peine. Je pose une main sur son épaule et lui offre mon plus beau sourire de réconfort. Il passe une main lasse sur son visage et se force à faire bonne figure.
- Qu'elle atmosphère pesante, hein ?
- Mmmm...tes parents ne sont pas très agréables avec toi.
- Pas mes parents, me reprend t-il aussitôt avec colère, mon père. Cette femme n'est pas et ne sera jamais, JAMAIS ma mère.
Je presse son épaule un peu plus fort, avant de frictionner son bras avec un doux mouvement de va et vient. Il se détend un peu et relâche la tension accumulée.
- Désolé, murmure t-il en laissant sa tête tomber dans le creux de mon cou.
Un léger frisson me parcours quand son souffle effleure ma peau.
- Dis...si un jour toi et moi on...on se mari... je voudrais que ce soit moi qui prenne ton nom.
J'écarquille les yeux. Il a pour projet de se...marier avec moi ? C'est... whaou ! Je ris un peu et le repousse doucement pour pouvoir le regarder dans les yeux.
- C'est un peu tôt pour penser à ça, tu ne pense pas ?
- Moi je vois très bien ma vie entière à tes côtés.
Un sourire éclot sur mes lèvres.
- Moi aussi. Mais pour l'instant on a un exos d'histoire qui nous attend, alors on ferait bien de s'y mettre.
On se sépare pour de bon et nous asseyons l'un en face de l'autre, à la table basse.
Nous passons une heure sur ce foutu développement construit, en râlant et en soufflant, mais on en voit finalement le bout. Je lâche mon crayon et me laisse tomber en arrière, appuyant ma tête sur le lit de Koko.
- Pfff... c'était long.
- Et barbant surtout.
Hajime contourne la table, vient prendre place à mes côtés, et pose sa tête sur mon épaule.
- T'es fatigué ? Ou malade ? Je lui demande un peu inquiet en passant une main sur son front pour vérifier sa température.
Il a un léger sourire et niche un peu plus sa tête dans mon cou.
- Mais non, je vais bien. J'ai juste besoin d'un peu d'affection.
Cette dernière phrase me brise le cœur. Son père a toujours été dur avec lui, et après le décès de sa mère, ça a empiré. Sans parler de sa détestable belle mère qui fait tout pour lui pourrir la vie. Souvent on dit que le coup de la méchante belle mère c'est exagérée, mais alors elle, elle est vraiment exécrable. Dès qu'elle en a l'occasion elle fait une réflexion sur Hajime, lui reprochant tout et n'importe quoi. Je ne peux pas me la voir. Et penser que Koko vit dans ce climat menaçant tous les jours me désespère. Je pose ma tête sur celle de mon copain et passe un bras autour de ses épaules. Il lève son magnifique regard noir vers moi. Il repousse doucement une de mes mèches de cheveux, la replaçant derrière mon oreille, avant de poser une main sur ma joue.
- Tu as de beaux yeux, tu sais ?
Je souris et lève les yeux au ciel.
- Oui, tu me le dis dès que tu en as l'occasion.
- Parceque c'est vrai. J'ai vraiment de la chance de t'avoir comme petit ami.
Son regard se fait plus sombre.
- Même si on est obligé de le cacher. Je suis vraiment désolé de t'imposer ça. Tu mérites tellement mieux.
- C'est impossible mieux que toi. Même si je reconnais que ce n'est pas agréable de devoir nous cacher comme si on devait avoir honte de notre amour.
- Je ne pourrai jamais avoir honte de toi, m'assure t-il très sérieux. Je t'aime trop pour ça.
De mes yeux, son regard glisse sur mes lèvres. Je souris et me penche sur son visage. Il s'élève un peu, réduisant à néant la mince distance entre nous. Je ferme les yeux tandis que sa main glisse dans ma nuque, me rapprochant encore un peu plus de lui. Un brusque claquement retentit, nous faisant sursauter et la porte s'ouvre à la volée sur cette affreuse mégère. Elle nous regarde tour à tour, avec un air surpris puis totalement dégoûté. Koko me repousse vivement et se recule de presque un mètre en une seconde. Je me mord la lèvre et fixe la table basse, tandis que cette femme détestable s'en va aussi vite qu'elle est venu. Je lève les yeux vers Hajime, qui m'a l'air totalement déconnecté. Il fixe le vide, la bouche entrouverte. Enfin, j'arrive à capter son regard, totalement paniqué. Il se lève, au bord des larmes et shoot rageusement dans notre devoir d'histoire.
- Merde. Merde, merde, MERDE !!!
Il commence à faire les cents pas passant d'un geste nerveux ses mains dans ses cheveux. Il inspire un grand coup et sort de sa chambre. Je reste assis un moment encore, incapable de bouger. Je ne l'avais jamais vu dans cet état. Cette putain de bonne femme ! Elle ne sait pas toquer au porte ? Et Koko...il m'a repousser sans hésiter. Il a honte de moi. Honte de nous deux plutôt. Quand des éclats de voix commencent à se faire entendre au rez-de-chaussée, je me secoue, me redresse précipitamment et dévale les escaliers. Dans l'entrée Koko cri sur sa belle mère, son père lui hurle dessus et cette sorcière s'égosille que les deux.
- Hajime ! Est-ce que c'est vrai ? Tu as...tu as oser... embrasser un garçon ?
Cette question, ou plutôt ce reproche, résonne plus fort que les autres, et provoque un silence pesant, durant lequel chacun se dévisage gravement. Allez Koko, c'est ta chance. Tu as le bénéfice du doute. Dis que c'est faux. Dis le. Répète pour la énième fois que nous ne sommes rien d'autre que des amis. Ton père ne saura pas qui croire. On se verra juste un peu moins pour pour ne pas éveiller les soupçons. Allez, dis le que c'est faux. Ça me blessera, mais j'ai l'habitude maintenant.
- Oui. C'est vrai.
Et voilà je...attends...quoi ? Il a...il l'a dit ? Il a fait son coming-out ? Il vient d'avouer qu'on c'était embrassé ? Alors là, j'en reste sur le cul. Son père aussi visiblement.
- Tu as...tu as quoi ?
Kokonoi redresse la tête, le menton tout de même tremblant.
- J'ai embrassé Seishu. Je l'ai embrassé parce que je l'aime. On sort ensemble depuis plus de deux ans maintenant. Je ne sais pas si je suis gay, et honnêtement je m'en fou. Tout ce que je sais c'est que je veux passer ma vie aux côtés d'Inui. Je suis amoureux...d'un garçon papa.
Je finis de descendre les escaliers dans lesquels je m'étais arrêté et me place fièrement aux côtés de Koko. J'attrape timidement sa main et la serre dans la mienne pour lui montrer mon soutien.
- Tu...aime un garçon. Tu me dégoûte, finit son père avec un ton plein de jugement.
Les épaules d'Hajime s'affaissent et il secoue tristement la tête.
- Je ne m'attendais pas à ce que tu comprenne de toute façon.
Son père lève la main et avant que je ne comprenne ce qu'il se passe, il lui décoche une gifle magistrale qui résonne dans toute la maison. Koko se laisse faire, gardant la tête tournée suite à la violence de l'impacte. J'écarquille les yeux.
- Ne me parle pas sur ce ton ! Mon fils, mon propre fils est pédé ! J'ai honte de toi ! Dégage. Tout de suite. Je n'héberge pas les...les erreurs de la nature dans ton genre. Tu...je n'ai même pas les mots. Vas t'en.
- Monsieur ! Je m'indigne.
Il se tourne vers moi avec des yeux fous.
- Toi, ferme là. Vraiment. Je te faisait confiance et tu fais de mon fils un dépravé. Quelle disgrâce.
- Bon. Si vous n'avez rien d'autre à nous dire, on va y aller, déclare Koko d'une voix plate, le regard éteint, en remontant l'escalier.
Tandis qu'il disparaît à l'étage, je fusille du regard les parents de mon petit ami, et ils me le rendent bien. Est-ce que c'est possible de tuer quelqu'un du regard ? Je vous jure que j'essaie de tout mon être. Hajime redescend avec nos sac de cours et me tend le mien. Il ouvre la porte et se retourne une dernière fois vers son père.
- ... Au revoir. Ou adieu. Ça dépendra de toi. J'espère que tu comprendra un jour. Et que tu virera cette salope de la maison, finit-il en lançant un regard perçant à sa belle mère qui prend un air outré.
Il n'attend pas la réponse et claque la porte. Il m'attrape par la main et nous nous éloignons à grands pas de cette baraque maudite. Il marche vite, sans même regarder où il va. Je le suis silencieusement.
Au bout de cinq bonnes minutes, je m'arrête, forçant Koko à faire de même. Il me lâche la main et avance encore de quelques pas avant de se stopper complètement, me tournant le dos.
- Koko ? Ça va ?
- Ouais. Je savais que ça ce passerai comme ça de toute façon, répond t-il maussade en haussant les épaules.
- Je suis désolé. J'aurais voulu que...ça se passe mieux.
Il lève la tête vers le ciel, et ses épaules sont secouées d'un léger sanglot.
- Ho... Koko.
- Me regardes pas, renifle t-il en essuyant vivement ses yeux.
Je m'approche et le serre dans mes bras, posant ma tête dans son dos. C'est bizarre de le voir pleurer. Lui qui est d'habitude si fier, parfois limite hautain... En réalité, il est beaucoup plus sensible qu'il ne le laisse croire. Il pose ses mains sur les miennes et rejette sa tête en arrière, s'appuyant sur moi. Je colle un peu plus nos têtes et lui souris.
- Ça va aller. Moi je suis là. Et je serais toujours là pour toi.
Un mince, très léger, infime, sourire vient étirer ses lèvres et il se redresse, recommençant à marcher. Il me tend la main et je m'en saisis immédiatement. Nous reprenons notre marche silencieuse, le cœur plus léger. Parce que c'est comme ça que fonctionne notre couple. On n'a pas besoin de grands mots compliqués pour se comprendre. Je n'ai pas besoin de dire à Koko que je suis désolé, que j'aurai voulu que ça se passe autrement, que je déteste ses parents, que je l'aimerai toujours... Parce que tout ça, il l'a compris et le sais déjà. Alors nous nous contentons de marcher silencieusement, profitant simplement de la présence de l'autre.
![](https://img.wattpad.com/cover/321609188-288-k22240.jpg)
VOUS LISEZ
Confessions
Random- Dis leur... - Tu as honte ? - Pourquoi se cacher ? - Je t'aime. - Je veux assumer notre relation. - J'ai peur... Voici plusieurs petites histoires inspirées de Tokyo revengers. Comment se passerai le coming-out des persos des ships de Tokyo reveng...