La tempête

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- Xanacia tient ! me hurle Caspian en me donnant une corde.
   Une violente tempête ravage notre bateau qui est secoué dans tous les sens. Tous les matelots sont sur le pont pour éviter au navire de couler dans les profondeurs de l'océan. J'ai tenu à les aider comme je le peux, je suis en équipe avec Caspian et nous nous démenons pour apaiser les tensions qui se sont créés.
   La pluie fouette mon visage, je ferme les yeux bien trop souvent pour être plainement concentrée sur ma tâche. Je tire de toutes mes forces sur la corde, je ne sais même pas ce que je fais, nous sommes tous dépassés par la situation.
   Cela fait maintenant trois longues heures que nous combattons la tempête, aucune terre est en vue, je commence à fatiguer sérieusement. Soudain, une énorme vague s'abat sur le pont, envoyant valser les narniens au quatre coins du bateau. Je me tiens fermement à la corde, mais c'est sans compter la force de l'eau qui me cloue au bord de ce rafiot.
- Xana ! Tout va bien ? me demande Cas en se précipitant vers moi.
   Je grimace en me tenant le dos. Le choc m'a coupé la respiration, je tente de me relever avec l'aide de mon ami.
- Ça va, il faut qu'on continue, je souffle, épuisée.
   Il me lance un regard débordant de crainte. Cette tempête est plus coriace qu'on ne l'aurait cru. Je reprends mon poste en me tenant le dos. Mes côtes font de la corde à sauter, ma respiration devient sifflante. Je ne sers à rien dans un état pareil.
- Ripitchip ! Que vois-tu ? je hurle à son attention.
- Beaucoup d'eau votre Altesse.
   Je ferme les yeux en soupirant. La petite souris est postée au devant du bateau pour assurer à son équipage un miracle qui ne se produira pas. Nous sommes en plein milieu d'un océan déchaîné, je ne sais pas combien de temps encore on tiendra comme ça.
- Concertation !
   Je me tourne vers le capitaine qui rentre dans la cabine de Caspian. On m'appelle.
   Je me glisse avec peine dans l'abri. Enfin en sécuritée, je soupire en m'asseyant difficilement sur une chaise. Je me tiens les côtes en grimaçant de douleur.
   Le capitaine, Cas, Ed et moi-même sommes dans la cabine. Une grande carte des mers est dépliée sur le bureau. Caspian a le regard rivé sur ce qu'il se passe à l'extérieur. Une fenêtre lui permet d'observer la situation avec plus de recul. Edmund quant à lui me fixe intensément, les sourcils froncés. Je lui lance un sourire pour le rassurer, ses traits se détendent. J'ai terriblement mal bordel de merde.
- Donc, nous sommes coincés ici, débute le capitaine en pointant un endroit sur la carte. Rationnés en nourriture et boisson pour au moins deux semaines maximum. On peut encore faire demi-tour, vos majestés.
   Le telmarin regarde discrètement Pevensie qui baisse la tête. J'écoute la conversation d'une oreille distraite, ma douleur au dos est de plus en plus forte.
- Rien de garantit que nous repérerons l'Étoile Bleue. Pas dans cette tempête, poursuit le chauve. Cette île est comme une aiguille dans une botte de foin. Nous risquons d'arriver au bord du monde.
- Ou d'être mangés par un serpent de mer, plaisante Ed en souriant.
   Je le fusille du regard. Il déglutit difficilement.
- L'équipage est nerveux c'est tout ce que j'essaye de vous dire, lâche-t-il avant de se rapprocher de la porte. Nous naviguons sur des mers dangereuses.
- Alors c'est à vous d'annoncer au père de cette enfant qu'on ne recherche plus sa famille et que sa femme est morte alors qu'on aurait pu faire quelque chose, je crache entre deux inhalations laborieuses.
   Le concerné baisse la tête.
- Je rejoins mes hommes.
- Faites donc cela.
- Mais je vous aurais prévenu, la mer peut avoir un effet dévastateur sur l'esprit des matelots. Très dévastateur.
   Puis il disparaît dans la brume qui englobe le bateau. Je reprends une bouffée d'air, je commence à suffoquer.
- Xana ? appelle Ed. Oh mon dieu mais tu es bleue !
   Les deux hommes se précipitent à mon chevet, les bateau tangue sous nos pieds, je manque de régurgiter mon petit-déjeuner sur le bureau.
- Je n'arrive plus.... à....respirer, je tente d'articuler.
   Caspian se précipite à l'extérieur en quête d'un médecin. Ed se contente de m'allonger sur le lit, en tenant ma main fermement. Il dégage quelques mèches de cheveux sur mon front d'un geste doux, je ferme les yeux, appréciant cette délicatesse.
   Le médecin m'examine.
- Elle a un pneumothorax.
   Je fronce les sourcils.
- Vous avez un poumon perforé, ne vous inquiétez pas tout va bien. Dans votre cas ça se guérit déjà. Il vous faut au maximum une journée de repos. Votre pouvoir fera le reste. La chute contre le bord du navire a dû casser une côte qui est allée directement dans votre poumon. Rien de grave heureusement.
- Merci docteur, je chuchote en souriant.
   L'homme me sourit et quitte la pièce. Un masque d'oxygène sur la bouche, je prends de grandes respirations qui allègent mes douleurs.
- Tu m'as fait si peur ! Ne refait plus jamais ça.
   Ed dessine des formes abstraites sur le dos de ma main à l'aide de son pouce. Je glisse ma main sur sa joue, il se love contre ma paume. Une larme roule sur sa joue.
- Je vais vous laisser, tâche de te reposer, je vais rejoindre les autres, dit Caspian en souriant timidement.
- Eh, tout va bien, je vais bien ne t'inquiète pas.
- S'il t'étais arrivée quelque chose je ne sais pas ce que j'aurais fait.
- Je suis là. Je suis là et je ne compte pas partir.
   J'ouvre mes bras de manière à ce qu'Edmund se place contre moi, ce qu'il fait instantanément. Je pose mon front contre son dos, les battements de son coeur me bercent. Nous restons comme ça toute la nuit, oubliant la tempête et le doute qui plane au dessus de nos têtes. Mais un cauchemar vient prendre possession de mon esprit, une brume verte en est la cause. La bataille peut enfin commencer.
- Terre en vue ! hurle une voix grave.
   Nous nous réveillons en sursaut, Edmund est aussi blanc qu'un linge, il transpire à grosses gouttes de sueur. Je pose ma main sur son épaule, il se dégage furieusement.
- Ed ? j'appelle d'une voix douce.
- Oh, c'est toi, excuse moi j'étais ailleurs.
   Il frotte ses yeux à répétition, j'enlève mon masque pour venir le prendre dans mes bras. Son corps est parcouru de petits spasmes. Il m'étreint avec force.
- Un cauchemar ? je demande.
   Il hoche la tête. Je ne pose pas plus de questions. Cette brume joue avec nos plus grandes peurs. Nous allons tous être confrontés à elles, pour le moment Edmund semble le plus touché.

***


   Le soleil est levé. La mer est calme, la tempête est déjà loin derrière nous. Nous nous préparons calmement à débarquer sur la petite île qui semble inhabitée. Les matelots chargent les barques tandis que Ripitchip fixe l'île avec méfiance.
- Qu'y a t-il Rip ? je questionne à la petite souris.
- Votre majesté ! Ne devriez-vous pas vous reposer ?
   Il pose un regard accusateur sur moi, je souris face à son inquiétude.
- Je vais mieux Rip, j'ai besoin de marcher sur la terre ferme, le bateau devient une épreuve permanente.
   Il hoche tristement la tête. Je fais référence au manque d'intimité et à cette brume qui joue avec nos esprits. Un bol d'air frais me fera le plus grand bien.
   Je rame avec trois autres matelots. Caspian, Edmund, Lucy et Eustache sont dans la barque d'à côté. Ripitchip me lance des coups d'œil toutes les secondes, surveillant mon état de santé. Je lui lance un sourire, amusée.
- Je doute que les seigneurs ont abordé ici altesse, il n'y aucun signe de vie, lance la souris.
- C'est vrai. Une fois à terre, cherchez de vivres et de l'eau. Docteur, Xanacia est-elle apte à découvrir l'île avec nous ? demande Caspian.
- Oui. Mais il ne faut pas qu'elle n'en fasse trop, elle est encore fragile.
   Je soupire de soulagement.
- Bien, alors nous quatre allons explorer cette terre, affirme le telmarin en me faisant un clin d'oeil.
   Je souris intérieurement. Victoire.
- Nous cinq, renchérit Eustache.
   Ma tête dérive violemment dans sa direction. Les Pevensie et Cas font de même.
- Je vous en prie de me laisser pas avec ce rat, lâche le blondinet d'un regard brillant de supplice.
- J'ai tout entendu, répond le concerné.
- De quoi je me mêle, râle le garçon en chuchotant.
- J'ai tout entendu.
   Je ris accompagnée de mes amis. Quelle sacré équipe ils font tous les deux. Une amitié solide.
   Nous accostons sur la plage. Je saute de la barque pour marcher quelques mètres. Que c'est bon d'être de nouveau sur terre ! Cette île est remplie de surprises, j'en ai la certitude.

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Excusez moi pour cette longueeeee attente ! Je reviens en force avec ce chapitre qui est un cadeau de Noël en retard 🥲
Passez de bonnes fêtes ! ❤️

La Fin des Contes (3)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant