CHAPITRE 25

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« Réunion dans la cuisine !

— On est déjà dans la cuisine, Max.

La chanteuse ignore Zack et se racle la gorge.

— Bon. Ça fait deux semaines qu'on a mis un vent monumental à Giulia Rossini, il s'agirait d'agir.

— Giuulia Rrrosssini, corrige Ilio, qui reçoit un regard noir sur le champ.

— Merci mon chou, dit-elle sèchement. Bref. On a aussi scrupuleusement évité Howard-Kelin, supposé être notre manager.

— Et auquel on doit un album dans deux jours.

Critical situation, indeed.

— Qu'est-ce qu'on fait ? Interroge Max.

Hope et Ilio lui répondent, dans la même fraction de seconde, de — respectivement — commencer par finir l'album et de lâcher Howard-Kelin.

— Zack ?

Il hausse les épaules en lui retournant la question.

— Finir l'album pour dans deux jours me paraît être sacrément ambitieux. Il nous reste à enregistrer "Il rumore della città" ; "La beauté" ; "36 ways" et "Robe Rouge".

— Et si on prend encore thirty prises pour chaque chanson, comme le dernier fois, on est mal.

— C'était à cause de toi et tes pauses clopes, Hopey. Enfin bon, si on se bouge, c'est jouable.

— Pas vraiment. On va terminer ça à la va-vite et ça va être moche. Lâchons d'abord Howard-Kelin, qui ne sert rien qu'à nous mettre la pression, déplaçons la date et finissons le truc comme on le veut nous, propose calmement Zack.

Ilio acquiesce, étrangement d'accord à tout ce qu'avait pu proposer le batteur.

— Pas faux. Il nous harcèle de coup de fil alors qu'on sort d'un festival et que Hope a chopé un rhume. Toujours l'album, ce foutu album, et jamais "comment allez-vous ?".

Max se mordille la lèvre en réfléchissant. Elle y avait pas réfléchi, mais dit comme ça… Peut-être que c'est ça qui leur manque, une figure un peu paternelle, au moins parentale, pour les aider à s'organiser. Et Howard-Kelin est loin d'être le type de producteur à être présent pour elleux. Lui, c'est plutôt productivité-succès-fric et ainsi de suite… Mais s'engager avec Giulia Rossini lui paraît trop précipité.

I don't like him anyways, dit Hope en se mouchant.

— Bon, je m'occuperai de lui téléphoner, soupire la chanteuse. Pour Rossini ?

— Attendons. Finissons de nous remettre du festival et on verra pour l'album, sans pression.

— Et laissons Hope guérir, surtout, rajoute Max. Réunion de cuisine terminée, qui reprendra des pâtes ?

Malgré leurs paroles, les Red Comets passent l'après-midi entre préparation de contenu pour leurs réseaux sociaux, écriture de nouvelles chansons et coup de fil à Howard-Kelin. Pas vraiment un emploi du temps de repos, se dit Hope en sortant fumer sur le balcon. Max continue d'écrire ses foutues chansons — alors qu'iels n'ont même pas fini d'enregistrer l'album — et attend des trois autres d'être aussi productif·ves. Merde, se dit Hope, j'ai dix-neuf ans, être sérieuse, mature et productive, c'est pas mes plans ! À vrai dire, elle s'en fout un peu de l'album. Ce qui lui plaît, c'est les concerts et jouer ensemble pour rire en studio. Enregistrer, ça la stresse, faut toujours que ce soit parfait, à un tempo précis, faire ce qu'il est marqué et pas d'improvisation. Pas vraiment son trip mais c'est comme ça, un groupe c'est des sacrifices.

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