[Mini illustration de Nayla]
Wendy frissonna dans la tiédeur agréable du salon. Un pressentiment embrassa sa nuque, comme une paume glacée.
Wendy aurait laissé couler ce sentiment, aurait repris le fil de la discussion, si Bastet ne s'était pas plantée devant elle pour la fixer de son regard vert.
— Tu es là, toi.
Bastet s'était sûrement endormie dans une des chambres ou s'était prélassée autour de la piscine. Ses yeux insondables, imprégnés du mystère qui caractérise ses semblables, retenaient ceux de Wendy avec une insistance qui la décontenançait.
— J'ai fait la surprise à Nayla. Elle m'aurait convaincue de ne pas venir, comme si j'allais avoir peur de vos deux vaches et de vos trois brebis.
Wendy ne bougea pas d'un cil. Assise sur le rebord de la fenêtre, une jambe repliée contre sa poitrine, elle échangeait un duel de regards avec le félin. Duel ponctué par un interminable miaulement.
Un rappel à l'ordre ou un ordre tout court. Les chats avaient une sorte de majesté dans leur comportement et d'autorité despotique lorsqu'ils avaient quelque chose derrière la tête. Wendy se pencha et laissa Bastet grimper sur son épaule en lui flattant le haut du crâne au passage.
— Tu me guides ?
Naturellement, elle se dirigea vers la porte-fenêtre. Elle devinait, au sol, plusieurs ombres et le pressentiment qui l'avait saisie se renforça. Bastet s'était tue. Elle semblait attendre de Wendy un peu plus d'audace, car sa propriétaire finie par entrouvrir la porte. Le chat frotta sa tête contre les boucles rousses de la jeune femme tandis que celle-ci tendait l'oreille. Elle s'attarda juste assez pour attraper au vol les accusations, pour comprendre sans comprendre.
Elle était curieuse, pas indiscrète, alors elle referma aussitôt la porte. Le cœur battant, elle réalisa qu'il n'y avait plus aucun bruit à l'intérieur. Les discussions étaient retombées comme l'enthousiasme de petit groupe dont Liv semblait être l'intruse. En se retournant, Wendy huma l'air de conspiration qui stagnait dans la pièce. Une odeur déplaisante à son goût et au goût de Bastet qui bondit au sol dans un miaulement bas, mais mécontent.
— Y a de l'animation dehors ? hasard Liv, plus pour détendre l'atmosphère que par réelle curiosité.
— On dirait, souffla Wendy, toute son attention focalisée sur Anton et Casimir.
Ou plus spécifiquement sur la tension de l'un, l'air faussement dégagé de l'autre. Il y avait quelque chose dans leur attitude qui sonnait faux. Comme un instrument désaccordé. Wendy le sentit tout au fond de son ventre et détesta ce sentiment. Elle eut peur tout à coup, peur de leur silence buté et de ce qu'il se cachait derrière.
— C'est Raphaël, finit-elle par articuler.
— Oui, confirma Anton, d'une voix grave.
— Ça lui pendait au nez, renchérit Casimir, l'air franchement ennuyé.
Wendy déglutit. Bastet avait filé et les quelques mots qu'elle avait entendus battaient à ses oreilles. Ils comblaient le silence des deux complices. Alors, elle murmura, atterrée :
— Vous saviez...
***
Cela ressemblait à une plaisanterie.
Autant la colère monumentale de Nayla, poussée à la caricature, que le silence dur, digne et lointain de Raphaël. Léandre n'en reconnaissait ni l'un ni l'autre.
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Adieu, demain
RomanceL'été, c'est cet instant où les erreurs sont permises. Léandre fait la rencontre d'un groupe d'amis dans un coin reculé de l'Ardèche. Coin suffisamment reculé pour l'éloigner de la présence nocive de ses parents, mais pas assez pour le débarrasse...