Chapitre 26

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   « Oh seigneur, achevez-moi, je ne suis plus digne d'être de ce monde ! Ôtez-moi la vie, privez-moi de mon souffle, offrez-moi la perspicacité du plus misérable des cloportes, conférez-moi le charisme de la dernière des loques, brûlez-moi sur le bûcher de la honte, ce que vous voulez, seigneur, pour que je quitte ce monde à bord du carrosse de la médiocrité ! »

   Mort de rire dans son lit, Zoro écoutait le blond se livrer à la déclamation de sa plaidoirie avec toute l'emphase et le drame que cela nécessitait. Il riait si fort qu'en voulant se redresser pour ne pas s'étouffer, il chuta de son matelas pour la plus grande joie de son épaule et son genou. Cela ne l'arrêta pourtant pas, et il continua de pouffer sous l'expression perplexe de Law qui ne savait sur qui concentrer son attention : Sanji qui hurlait dans le couloir ou bien lui qui se raccrochait à la couette pour ne pas finir complètement au sol, des larmes à l'œil tant il s'esclaffait.

   « Il se passe quoi, bon sang ?

   — Je suis un génie et Sourcil en vrille est extrêmement prévisible, c'est tout, parvint-il à répondre sans s'étrangler.

   — Il braille comme un veau qu'on égorge, soupira le brun, las dès le matin.

   — Un veau poète, accordons-lui au moins ça ! » s'exclama Zoro en parvenant à se mettre sur ses pieds tant bien que mal, le ventre douloureux à force de rire. Il allait sortir de la chambre lorsqu'il se fit interpeller.

   « Tu passeras me voir tout à l'heure pour tes mains, lui lança Law. Tes bandages, c'est du grand n'importe quoi. »

   Sanji était à genoux sur le palier, les mains jointes en signe de rédemption, la tête levée vers le ciel pour en quémander la clémence. Le vert eu tout le mal du monde pour ne pas éclater de rire de nouveau, sachant que cela attirerait les soupçons sur lui. Il se composa un visage de circonstance, mélange d'incompréhension fatiguée et de moquerie.

   « Pourquoi tu gueules, encore ? lui demanda-t-il en pinçant fort les lèvres pour contenir un ricanement.

   — Tu ne peux concevoir ma détresse et mon mépris envers moi-même ! Donne-moi un couteau à beurre, je vais me faire hara-kiri.

   — Hara-kiri c'est l'ultime honneur pour les guerriers, pas pour les dramaqueen en peine d'inspiration, rétorqua-t-il alors que Bonney sortait de sa chambre, éméchée avec la trace de l'oreiller sur la joue, mais un grand sourire au visage.

   — La raison de tout ce raffut, s'il vous plaît ? les questionna-t-elle avec un clin d'œil pour Zoro.

   — Oh, ma Jewelry d'amour, peut-être sauras-tu m'éclairer dans la nuit obscure de mon incompréhension ! s'exclama-t-il en portant une main dramatique à son front. Je me suis réveillé tout à fait normalement et allais m'habiller lorsque je remarque dans le miroir, sur mon corps, des traces de rouge à lèvres ! J'étais au-delà de la stupéfaction ! Ça m'a terrifié, car jamais je n'oublierai une nuit passée avec une femme, cependant pas moyen de savoir qui m'a fait ça ! Je t'en conjure, Jewelry, sais-tu quelque chose qui pourrait me sortir de ma torpeur ?

   — Je ne crois pas, non, parut réfléchir la jeune femme en dissimulant derrière ses cheveux un sourire. Tu es peut-être sorti hier soir, a fait la rencontre d'une Française à la fois charmante et polyglotte, avez passé la nuit ensemble, puis elle est partie avant ton réveil ? Tu as bu hier ?

   — Non, non... C'est bien ça qui est étrange. Et puis ma porte est toujours verrouillée, je ne l'aurais certainement pas faite monter par la fenêtre !

   — Le mystère est complet, surenchérit Zoro en acquiesçant, l'air tout à fait préoccupé par les problèmes du blond.

   — Arrête de te foutre de moi ! cingla Sanji en lui jetant un regard incendiaire que des larmes venaient brouiller. Je n'ai pas besoin de toi pour me sentir minable en cet instant !

Not Emily in Paris but Zoro et Sanji à la placeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant