Subjectivité 14

63 12 1
                                    


Sans hésitation je lui prends la main. Je me sens si bien au contact de sa peau. Elle me tire légèrement et m'emmène vers le petit groupe d'avachis. J'aperçois Lucie qui a rendu l'âme et qui penche sur la gauche.

- Alain tu peux dire à la petite, ici présente, que nous la ramenons chez son papa et sa maman.

Je retire ma main vivement en la regardant d'un œil mauvais.

- Bien sûr chérie qu'on la ramène ! J'adore les enfants !

- Il y aura une de ses amies aussi. Ajouta-t-elle.

- Une, deux c'est pareil, la voiture a cinq places.

Il se lève à ces mots et me fait la bise. Je suis étonnée mais fais de même par politesse. Il a l'air si sympathique. La petite pique que m'a envoyé Noé me reste tout de même en tête. Il envoie plein de bisous dans l'air et nous nous dirigeons vers Lucie :

- Debout, j'ai trouvé un taxi !

- Hein ? La voix endormie, elle me répond à peine.

Je la tire par la manche et nous rejoignons la voiture d'Alain.

- Hey ? Je peux passer devant car sinon j'ai la gerbe en voiture ? Questionne mon amie.

- Pas de soucis, je te laisse ma place. Répond Noémie à la concernée.

Un garçon court en direction de nous. C'est Sébastien si je ne me trompe pas.

- Les gars attendez-moi ! Y'a encore de la place pour moi ?

- Oui on se serrera derrière, hein les filles ? Plaisante le conducteur.

Je me retrouve tout à droite sur la banquette arrière, Noémie au centre et son pote à gauche. Je suis totalement épuisée mais lutte car nous ne sommes qu'à un quart d'heure de chez moi. Malheureusement, il dépose tout d'abord Lucie. Nous restons quand même à trois derrière ce que je ne comprends pas trop. Lors des virages son genou vient au contact du mien. Ça m'agace sans vraiment savoir pourquoi, qu'elle le laisse contre moi à la fin ! Ils commencent à reparler de gens que je ne connais pas. N'y-t-il que les histoires de jupons à leur âge qui les animent ? Il faut croire que oui. Noémie est pourtant silencieuse par rapport aux deux autres.

- Tain tu l'as vu Linda avec l'autre pouf ? Raille notre taximan !

- Ça te fait pas trop chier Noé ? Ajoute Seb

- Non les gars, si vous pouviez passer à autre chose ça me ferait plaisir.

- Ahah tu dis ça parce que la petite est là ?

Seb m'ébouriffe les cheveux dans la seconde qui suit.

- Oh ! Je suis pas ta chienne ok ?

Je me surprends moi-même, il s'explose de rire et ses relents de whisky coca ne tardent pas à me parvenir.

- Du calme mademoiselle, t'as tes règles ou quoi ? continue-t-il à rire.

J'allais pour surenchérir mais elle intervient.

- Ça suffit vous deux, on passe à autre chose ? Puis on est arrivé, Seb dehors ! Je te rejoins.

- Et toi chérie tu habites où ? Demande Alain en me regardant dans le rétroviseur intérieur.

- A deux pâtés de maison, je vais finir à pieds, merci beaucoup Alain.

Il me fait un clin d'œil. J'entreprends de sortir de la voiture.

- Il serait peut-être plus prudent qu'il te dépose non ? Il peut se passer pleins de choses en cinq minutes.

- Non c'est bon t'en fais pas. Dis-je d'un ton assez sec.

Je sors sans attendre. Sébastien me regarde de bas en haut et de haut en bas. C'est quoi son souci ?

- Tu la ramènes chez toi finalement Noé ? Ahah tu emballes sec toi.

- Mais ta gueule Seb', tu vas réveiller tout le monde, va te coucher je la ramène chez elle.

- Oh oh oh.

Il accole ses deux index et les frotte ensemble. Noémie a dû lui dire ce qu'il s'est passé ce n'est pas possible. Je la déteste ! Je pars en direction de ma maison.

- Hey, pourquoi tu pars comme ça ? Il est un peu débile quand il a bu mais rien de méchant.

- Lâche-moi tu veux. Je croyais que tu allais garder ce qu'il s'est passé pour toi... Mais non !

Elle m'attrape le bras.

- De quoi tu parles ?

- Il a fait des allusions entre toi et moi, ça tombe pas de la planète Zorg !

- C'est parce que je suis gay...

- Hein ?

Je suis atterrée, tout va trop vite dans mon cerveau. C'est donc ça la tension entre elle et Linda. Puis ce n'est pas moi qui aie un souci en fait, c'est elle !

- Me touche pas ! Tu vas me contaminer sale...

Je n'ai pas eu le temps de finir ma phrase que je me prends une claque.

- J'ai préféré t'arrêter avant que tu ne dises une bêtise.

Toutes les informations se bousculent dans ma tête. Je n'en peux plus et m'en vais en courant. Je sens son regard posé sur moi jusqu'à ce que je rejoigne ma rue. La maison est dans le noir, je retrouve mon lit sans passer par la case salle de bain. Je pleure dans mon lit.

De l'autre côté du pontOù les histoires vivent. Découvrez maintenant