De l'autre côté du pont

Subjectivité 16

J'ai besoin d'un copain et de franchir le pas ! C'est quoi ? C'est d'être touchée de façon plus ou moins intime qui m'a mise dans cet état. Je crois que je suis prête. Il ne me reste plus qu'à trouver le bon gars. J'envoie dans la foulé un sms à Carène. Celle-ci me parle de Michael, qui est selon elle le meilleur coup du collège... Mais bien sûr. Elle m'encourage à taper chez les lycéens. Surtout que j'ai la chance de pouvoir trouver un littéraire qui me plaît avec notre programme. Génial ! Quelle ironie... J'ai tout mon dimanche pour élaborer mes plans de séduction. Mes livres ne me serviront que guère dans la conquête d'un ours avide de chair. L'idée de retrouver David me tinte comme une évidence. Je lui plais après tout. Alors pourquoi pas ?

- Eh la lutine, tu viens manger ?

- Non merci Clément, je n'ai pas fini de digérer la nuit dernière...

Il rit et s'en va avant que je n'ai pu lui demander où il avait disparu hier.

Il est vingt heures, je n'ai toujours pas bougé. Demain je sais que je vais la voir. Nous avons une journée entière pour le lycée. Je vais devoir aller dans un autre parcours pour limiter les dégâts. Plus j'en serai loin moins je risquerai quelque chose.

- Ma chérie, tu viens manger ?

- Je n'ai pas faim maman...

- Tu veux en parler ? Je m'inquiète tu sais. Il s'est passé quelque chose à cette fête. Clément me dit que non mais vu comme tu es je me pose beaucoup de questions.

- Il ne sait rien passé crois-moi.

Je lui prends la main pour qu'elle me croie. Je ne veux pas la voir triste pour moi. Elle me sourit tendrement en replaçant une mèche de mes cheveux derrière mon oreille.

- Je t'ai fait une île flottante, tu n'en veux pas ? Je sais que c'est ton dessert préféré.

Elle a tant d'espoir que je ne peux qu'accepter et l'accompagner en cuisine. Penser à autre chose lors de cette fin de soirée m'a détendue plus que je n'aurais pu l'imaginer. Je m'endors épuisée.

Un bruit strident me sort de mon sommeil. C'est le réveil, je ne veux pas y aller ! Je marche tel un zombie jusqu'à mon armoire. J'attrape machinalement ma tenue du jour. Je passe à la salle de bain pour remettre un minimum ma tête en état.

- Bouge de là moucheron tu es très bien comme ça.

Qu'est-ce que je l'aime lui. Je l'embrasse sur la joue et lui laisse le miroir. Il m'aurait fallu un homme comme mon frère mais ça ne court pas les rues. Je pars en avance sans prendre mon petit-déjeuner. Les grilles sont toujours fermées, pas grave je pourrais peut-être repérer ma cible du jour. D'ailleurs, je crois que c'est lui avec deux de ses amis. Je me dirige vers lui, son sourire se crispe et il fronce les sourcils. J'ai envie de partir en courant mais lui fait mon plus grand sourire. Ses potes lui lancent des coups de coude.

- David, je pourrais te parler un petit moment ?

- Ouh !

- Hum, ok, je reviens les gars.

Je le vois dubitatif.

- Je voulais m'excuser pour la soirée...

Il reste silencieux.

- Je voulais aussi te dire que... Enfin que j'étais pas prête la dernière fois mais je ne pense qu'à toi depuis.

Ses yeux s'écarquillent et il déglutit. Mon dieu ce qu'il peut être crédule mon rire intérieur se traduit par un visage radieux qu'il interprète pour lui.

- J'aimerais que l'on tente quelque chose ensemble, serais-tu d'accord ?

- Euh bah oui écoute, je comprends pour la dernière fois, j'ai été un peu bourrin.

Il s'en veut presque, je suis étonnée, j'avoue que j'apprécie l'effet que j'ai sur lui.

- Tu sais que je suis un programme d'insertion facilité au lycée ? Je peux venir avec toi ?

Etape numéro une, ne pas lâcher sa proie tant qu'elle n'est pas paralysée !

- Bien sûr, je vais te guider. Les gars, on se rejoint plus tard.

Je leur fais un clin d'œil inutile, je ne suis qu'une gamine après tout. Et ça m'amuse tout cela. Je le prends par le bras et il est tout béat. J'aperçois Noémie, j'ai un pincement prononcé au niveau de l'estomac. Elle m'a vue. Elle me sourit, je ne comprends pas...