Subjectivité 34

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Elle ne m'a même pas attendu, alors que je devais l'aider. Je la vois sortir la tête d'un coup par la fenêtre de sa chambre. Elle interpelle son meilleur ami pour lui lancer son coussin. Mon téléphone vibre, c'est Lucie. Elle se plaint encore de ce mec qui la fait miroiter. Tape-toi Noé et on en reparle... Je gronde mais me rends compte très vite que je dis de la merde. Je lui réponds que je ne suis pas bien là.

- Allô ?

- Que se passe-t-il encore avec Noémi ?

- Rien, elle est en train de partir et se soucie même pas de mon absence à son déménagement...

- Mais vous vous êtes pas pris la tête y'a quelques jours ?

- Si, et alors ? Je suis toujours sa petite amie à ce que je sache !

- Hey, t'énerves pas sur moi !

- Ouais, pardon...

- Tu veux que je vienne ?

- Oui s'il te plaît...

Je suis lasse et triste, j'espère qu'elle pourra me remonter le moral. Concentrée sur ma conversation et à regarder ailleurs je n'ai pas vu que l'on se rapprochait de moi.

- Tu es venue finalement ? Une voix douce me fait raccrocher sans plus de préambule.

- Noé ? Je...

- Je ne pensais pas que tu serais là, je t'ai vu de ma chambre.

- Merde...

- Oh... Tu ne voulais pas... Bien, je voulais juste te donner ça.

Elle sort une petite peluche, elle est tout mignonne et fait partie de la collection que j'ai. Ce modèle fait partie des plus rares. Je la regarde dans sa main qui se tend vers moi.

- Non, je n'en veux pas merci. Dis-moi quel sens ça a ?

Je la vois baisser les yeux, je viens de lui faire mal. Je n'arrive pas à m'en empêcher, ce n'est pas ce que je voulais et en même temps si, qu'elle ressente un peu ma douleur. Je me déteste d'en arriver là. Elle ne mérite pas ça. Mes yeux sont coléreux et durs alors qu'elle est juste là, merveilleuse et douce, sa tête se détourne. Je crois qu'elle pleure, je m'approche pour m'excuser prenant conscience de mes actes. Ma main se pose sur son avant-bras mais elle le retire.

- Je dois y retourner, j'ai le voyage à faire, je ne dois pas rendre le camion en retard. Au revoir Milène.

Je n'arrive pas à la retenir, ni mon corps, ni ma voix s'animent. Quand, elle est assez loin, tout se décoince et je crie.

- Ouais c'est ça casse-toi et abandonne-moi !

Elle me jette un dernier regard en secouant la tête et je m'enfuis pour aller chez Lucie. Mes larmes brûlent mes joues. Ma meilleure amie ne sait pas quoi faire pour me consoler. Elle me conduit à sa salle de bain et m'aide à me rafraichir. Quand je constate à quel point mon reflet est abjecte, autant à cause du chagrin qui me défigure que de mon comportement inacceptable, je m'effondre. Mes jambes ne me tiennent plus, j'ai perdu l'amour de ma vie.

De l'autre côté du pontOù les histoires vivent. Découvrez maintenant