Subjectivité 18

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Je déteste qu'elle ait un temps d'avance comme cela sur moi. Je rejoins au plus vite David. J'ai peur de changer d'avis.

- David, je sais que c'est précipité mais... J'ai envie de toi, maintenant.

Mes yeux brillent car j'ai envie de pleurer. Il me prend par la main et nous partons sans explication ni autorisation du lycée. Nous arrivons en bas d'un immeuble rose pastel.

- Tu es sûre ?

- Oui.

Je ne sais pas où j'ai appris à mentir de la sorte, je suis certaine plus que jamais que je fais la plus grosse erreur de ma vie mais j'ai besoin de cette réponse. Nous montons au deuxième étage, il me surprend en me collant contre le mur pour m'embrasser. Je réponds à celui-ci en tentant de me vider l'esprit. Le baiser que j'avais donné à Noémie résonne en moi. J'accentue la force avec laquelle nous nous embrassons. Quand je rouvre les yeux il est encore la bouche entre-ouverte. Il retrouve ses pensées et ouvre la porte.

- Ne t'en fais pas mes parents bossent jusque tard.

Il m'attire chez lui et commence à m'enlever ma veste. J'enlève la sienne. Je vais agir en miroir c'est probablement la meilleure façon de répondre à ses attentes. Il me prend dans ses bras et respire fortement.

- Tu sens tellement bon.

Il me décolle du sol et me porte jusqu'à sa chambre. Je ris nerveusement à sa façon de faire. C'est charmant dans un sens. J'aurais clairement pu tomber plus mal. Il me dépose délicatement sur son lit je suppose. Il se retrouve sur moi. Il recommence à m'embrasser sauf qu'il ne reste pas seulement au niveau de ma bouche. Il me dénude peu à peu. Je suis de plus en plus gênée. Il s'en rend compte.

- Qu'y a-t-il ?

- Tu veux bien que l'on fasse ça dans le noir ?

Il se dépêche à répondre à mes envies. Il revient à moi à tâtons, nu. Il ne me reste que mes sous-vêtements. Je sens son érection contre mon sexe. Je ne ressens aucune excitation. Ce n'est pas possible... Je ne peux plus reculer.

- David...

- Quoi ?

Il est essoufflé.

- Tu as des capotes ?

- Euh... Oui attends.

Et merde, premier plan de secours tombé à l'eau. Je l'entends farfouiller dans un tiroir de sa table de nuit je suppose.

- Rha, je ne trouve pas, je peux allumer ?

Je dis oui en prenant soin de remonter la couverture sous mon menton. Je le vois entièrement nu. Il est assez athlétique mais ça n'évoque rien en moi... Je me désespère. Je me souviens alors des vestiaires lorsque l'on fait du sport et que l'on se change. Apercevoir une cuisse d'une fille m'a toujours fait rougir. Là j'ai l'ensemble complet de la nudité livré sur un plateau et ça ne me fait ni chaud ni froid. Pourtant je devrais même être gênée mais rien de tout ça. Ses jurons me font sortir de mon introspection.

- Tu n'en as pas toi ?

Je réponds négativement de la tête. Il s'arrache les cheveux. Je n'ai pas envie de lui, je sais que je ne l'aime pas et je suis maintenant persuadée d'être homosexuelle. Je sais qu'on va me dire que je n'ai jamais essayé les garçons alors il faut que je tente non ? Mais non quelle cruche, d'autres diront que c'est parce qu'il n'était pas doué. Tous reviendront à la même conclusion, que je suis lesbienne par défaut. Pourtant les faits sont là, il n'y a qu'une fille pour me faire ressentir quelque chose. Je ne peux pas changer ça. Il a fallu que je tombe sur la seule lesbienne du lycée pour m'en rendre compte. C'est toujours comme ça que l'on s'en rend compte ?

- Milène ? Milène !

- Hein ? Quoi ?

- J'en ai trouvé.

- C'est bien David.

Mon ton est détaché, je ne sais même plus de quoi il me parle. Je me lève avec la couverture en cherchant mes vêtements échoués par ci et par là.

- Tu n'aurais pas vu ma veste par hasard ?

- Quoi ? On ne fait plus l'amour ?

Il écarquille les yeux pendant que je remets mon t-shirt et mon jeans.

- Non c'est tout redescendu là...

- Mais ? Tain !

Je m'approche de lui, je lui prends le visage et je vois tout son désespoir. Ça me fait mal, je me décide alors à lui dire une vérité que certainement peu d'autres gens connaîtront. Il m'écoute attentivement. Finalement, j'omets le nom de Noémie. Il la connait et je n'ai pas envie que ça sorte. Il se lève du lit, je suis dorénavant gênée, pas par lui mais par tout ce que je viens de lui avouer. Il penche la tête sur la gauche et me sourit.

- Merci.

- Quoi ? Pourquoi me dis-tu merci ?

- D'avoir été honnête, que je ne pense pas que ça vienne de moi. Je suis content de te comprendre maintenant. Tu es charmante, ça m'aurait plu que ça marche entre nous, je suis même flatté que tu m'aies choisi pour être sûre de toi. Je n'en parlerai pas. De toute façon l'année prochaine je ne serai même plus dans cette ville alors surtout ne devient pas paranoïaque. En revanche j'ai une question.

- Oui ?

- Je peux dire que j'ai couché avec toi à mes potes ?

- Y'a pas de soucis. Dis-je en riant

J'ajoute que ça se serait certainement produit si jamais il n'avait pas su m'écouter. Et surtout si il avait eu des préservatifs un peu plus tôt en main. Il fait mine de s'en vouloir et ajoute qu'il sera plus prévoyant à l'avenir. Nous repartons main dans la main au lycée.

De l'autre côté du pontOù les histoires vivent. Découvrez maintenant