Chapitre 37

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PDV Alyara :

J'étais resté là, à lui tenir la main durant un temps qui m'avait paru durer des années. Je n'avais fait que le regarder puis, de temps en temps, je regardais le ciel en attendant la fin de l'éclipse. Je ne savais pas précisément depuis combien de temps nous étions là toutes les deux, à attendre leur retour. Nous ne savions pas s'ils allaient revenir. Nous avons pu voir le vaisseau couler au loin. Il avait disparu sous la surface à une rapidité effrayante.

Il m'arrivait de me demander s'ils avaient réussi à sauver Tuk et Kiri ou s'ils avaient réussi à s'échapper du vaisseau avant qu'il ne soit trop tard. Maintenant, je me demandais également si le reste de l'équipage humain avait été entièrement éliminé, car l'idée de tous les savoir mort me procurait une satisfaction étrange.

Je n'avais aucune réponse à ces questions, et je ne voulais pas me torturer l'esprit à chercher des réponses. Pour moi, presque la totalité de mon monde venait de s'effondrer, alors le reste me paraissait presque futile.

Je n'avais pas lâché sa main une seule fois, et je n'avais cessé de jeter un œil sur son visage avec toujours ce même espoir stupide d'apercevoir ses paupières bouger. J'aurais donné n'importe quoi pour remonter le temps et être là lorsque c'est arrivé. J'aurais pu faire quelque chose, peut-être. Mais non, à la place, je m'étais imaginé être suffisamment forte pour sauver ses sœurs qui étaient peut-être mortes, elles aussi.

Tout était arrivé si vite. En moins d'une après-midi, toutes nos vies venaient de basculer. Ce matin encore, j'étais heureuse à l'idée de vivre cette journée. Ce matin encore, il me prenait dans ses bras et il souriait, comme s'il avait encore toute la vie devant lui. Ce matin encore, j'étais persuadé que mon avenir serait heureux.

-Le soleil ne va pas tarder à revenir.

Tsireya m'avait sortie de mes songes. C'était la première fois qu'elle parlait depuis j'avais trouvé Neteyam. Et ça se sentait dans sa voix qu'elle n'avait pas parlé depuis un moment. Elle était hésitante et légèrement rouillée.

-Je sais...

-Et s'ils ne reviennent pas ?

-Ils vont revenir, j'en suis sûr.

Et puis, elle n'avait plus rien dit. Je ne la regardais pas, j'avais toujours les yeux posés sur nos mains entremêlées. L'une était petite et elle serrait de toutes ses forces l'autre, beaucoup plus grande. L'une avait quatre doigts bleus alors que l'autre, en avait cinq. Je n'arrivais pas à la serrer complètement, elle était vraiment trop grande. Mais je ne comptais pas la lâcher pour autant.

Une larme venait de passer sur ma joue sans même que je m'en rende compte. J'avais cessé de pleurer, par fatigue, mais aussi parce que je n'avais plus rien à verser. Mais là, cette larme, j'avais l'impression qu'elle n'était pas de moi. Une étrange sensation s'était mise à me parcourir, comme des frissons causés par le vent. Soudain, un animal avait sorti sa tête de l'eau, et il me regardait fixement. Il était minuscule et contre toute attente, en aucun cas effrayé. Tsireya n'avait pas l'air de l'avoir remarqué, pourtant, de mon côté, je ne pouvais plus détacher mes yeux de lui.

C'était, ce qu'on appelait avec ma mère, une loutre de Pandora. D'après elle, sur la planète Terre, il existait une espèce animale qui ressemblait drôlement à ce poisson. Alors, on lui avait donné le même nom. Je n'en voyais jamais. J'avais souvent l'impression qu'il n'y avait que ma mère et moi qui faisions attention à ces petites créatures. Comme si nous étions les seules à les voir. Et comme les autres fois où j'ai pu en apercevoir, j'étais encore la seule à lui prêter attention. En réalité, j'avais l'impression qu'il était même là pour moi, car il était étrangement immobile, le regard toujours posé sur moi. D'habitude, les loutres bougent beaucoup, elles sont énergiques et passent sous le nez de tout le monde sans mesurer leur vitesse. Mais lui, il était simplement là, ne bougeant pas d'un pouce.

Avatar : Les chants de l'eauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant