Chapitre 17

36 6 10
                                    

          Maintenant, Romulée comprenait pourquoi Alice avait été autant agacée par son silence lorsqu'elle lui avait fait visiter le Château, des mois auparavant. Ils avaient déjà traversé l'entièreté du jardin et le garçon, qui prenait soin de garder une bonne distance entre eux, n'avait pas décroché un seul mot. Toutefois, elle était à peu près sûre de ne pas avoir donné l'impression d'être aussi fermée qu'une porte de prison. Ni d'avoir fixé l'arrière du crâne d'Alice au point d'y faire des trous. Il suffirait que Wulf use d'un peu de magie et Romulée était certaine de tomber raide morte.

          Est-ce qu'elle était plus loquace ? Pas vraiment. Elle ne savait tout simplement pas quoi lui dire, elle n'avait jamais eu à tenir seule compagnie à des invités. Elle n'était pas comme Mme. Figgs, et même si elle parlait autant, que pourrait-elle bien dire à ce garçon qui pourrait l'intéresser ? Lui faire un cours d'histoire sur le domaine ? Même elle ne le connaissait pas parfaitement. A plusieurs reprises, elle s'arrêta, se tourna en essayant de dire quelque chose, mais le regard noir qu'elle croisait immanquablement l'en dissuadait à chaque fois. S'il n'avait pas envie d'être là, pourquoi il n'avait pas refusé de l'accompagner ? Pourquoi il ne faisait pas demi-tour maintenant ? Qu'il leur évite donc plus d'embarras à tous les deux...

- C'est de ta faute si je suis là, cracha-t-il enfin.

          La Sortcelière s'arrêta net, se retourna en clignant des yeux et répéta :

- Ma faute ?

          Un rictus fit brièvement tressaillir le coin de ses lèvres. Une de ses mèches tomba devant son front lorsqu'il prit appui sur sa jambe droite et, bras croisés, il acquiesça.

- Ta faute. J'avais des choses de prévues, et d'un seul coup, mon père m'emmène jusqu'ici juste pour te rencontrer. Soi-disant pour me faire une nouvelle amie. Comme si je n'en avais pas assez !

- C'est plutôt de ta faute, rétorqua-t-elle en levant les yeux au ciel. Tu n'avais qu'à lui dire tout ça et il t'aurait sûrement laissé tranquille.

- Je lui ai dit ! Je ne vois pas en quoi tu es si intéressante de toute façon ! Tu n'es même pas une vraie Mearah !

          Un hoquet échappa à Romulée qui fit un pas en avant, poings serrés. Son mouvement fit sursauter le garçon qui se reprit rapidement en affichant un sourire moqueur, quoique vacillant tandis que ses yeux retournaient fréquemment à ses mains.

- Quoi ? N'importe qui te dira la même chose. Tu n'as pas leurs cheveux roux.

- Mais j'ai leurs yeux verts. Et ils ont fait des tests !

          A cela, il ne trouva rien à redire et se détourna simplement en reniflant d'un air dédaigneux. Pendant un instant, Romulée ne sut quoi faire et, finalement, plutôt que de remettre de l'huile sur le feu, elle préféra simplement tourner les talons et reprendre cette mascarade de visite sans pour autant desserrer les mâchoires. Après quelques secondes, elle entendit ses pieds faire rouler le gravier alors qu'il lui emboitait le pas.

          Dans le manoir, elle le guida à travers les différent couloirs sans prendre la peine d'ouvrir les portes et ne s'attardant guère plus de quelques secondes à l'entrées des pièces ouvertes, jugeant cela largement suffisant étant donné leur motivation à tous les deux. Et, comme il ne protestait pas, elle continuait, mais sa colère presque palpable lui faisait grincer des dents. Elle n'avait rien à voir avec sa présence ici. Elle ignorait son existence jusqu'à aujourd'hui et n'avait certainement pas réclamé sa présence, ni celle de qui que ce soit ! Elle n'avait pas besoin d'ami supplémentaires alors qu'elle avait Kenya, Ruby et Attaris bien qu'elle n'ait toujours pas eu l'occasion de reparler à cette dernière depuis son retour. Elle avait même Harry !... Même s'il n'avait toujours pas répondu à sa lettre.

Romulée Potter : MearahOù les histoires vivent. Découvrez maintenant