Chapitre 35

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          Le seul son dans la chambre de Wulf était celui de son réveil à aiguille. Son "tic, tac" régulier, au lieu de permettre à Romulée de se détendre, lui donnait envie de s'arracher les cheveux tandis que ses pieds se balançaient au même rythme contre sa volonté. Dans un coin de sa tête, elle sentait la présence lointaine mais persistante de Tunra à qui elle tenta de faire comprendre que tout allait bien avant de l'ignorer à nouveau sans savoir si son message lui parviendrait clairement.

          Wulf et elle avaient beau avoir repris leur place sur le lit après ce déjeuner catastrophique, aucun d'eux n'avait relancé le film. Le blond fixait l'écran, mâchoire contractée et poings serrés sur ses genoux. Chaque fois qu'il s'était exprimé lors du repas, cela s'était terminé en conflit aux mots virulents où son père prenait le parti de sa mère-qui-n'est-pas-sa-mère, même sur le plus petit détail come la salière, demandée par Dame Candesc au cours du repas, le temps d'écran pour Fanny, les manières de Wulf et son comportement irrespectueux et agressif. Il l'était. Mais, de toute évidence, il se passait quelque chose entre l'épouse d'Ardbert et son fils, et bien que Romulée ignore de quoi il retourne, elle ne pouvait s'empêcher de se dire que, pour qu'il se comporte ainsi, c'est que Wulf devait avoir de bonnes raisons.

          La brunette soupira en repoussant une mèche derrière son oreille, frôlant par la même occasion l'écouteur qu'elle portait toujours et dont elle ne s'était pas séparé même pour déjeuner. En fait, elle avait même complètement oublié qu'elle le portait. N'osant pas demander à remettre la télé et espérant que cela la détende, elle se mit à le tâter, à sentir le relief des runes gravées dessus, comme pour chercher un bouton alors qu'elle savait pertinemment qu'il n'y en avait aucun. Elle avait vraiment l'impression que, depuis quelques temps, ses rencontres avec Wulf se terminaient presque toujours mal.

          De petits coups à la porte lui firent relever la tête. Elle n'eut pas besoin de voir qui se trouvait derrière pour savoir qu'il s'agissait de Fanny et, en effet, la fillette entra à pas hésitants lorsque son grand frère ouvrit la porte d'un geste de la main. Elle serrait toujours son aragne contre elle mais levait de grands yeux humides vers le duo, lèvres tremblantes. Pour elle non plus le repas n'avait pas été agréable. Tentant de la réconforter un peu, Romulée lui adressa un gentil sourire qu'elle lui rendit plus timidement, et lui fit signe de les rejoindre.

- Wulf ?

          La façon dont le blond baissa les yeux vers sa sœur sans bouger d'un millimètre, le visage fermé, en aurait fait frissonner beaucoup, toutefois, la jeune Sortcelière su en voyant ses épaules s'affaisser subtilement et son regard s'adoucir qu'il n'allait pas tourner sa colère vers l'enfant. Cette dernière, en revanche, l'ignorait et se recroquevilla par réflexe.

- Tu es fâché ? Couina-t-elle.

- Contre ta mère, admit-il. Et contre Père.

- C'est ma faute ? Parce que j'ai regardé la télé avec toi ?

- Non, bien sûr que non. Ce n'est jamais ta faute. Ne t'inquiète pas, d'accord ? Tu veux continuer à regarder le film ?

          Il la prit dans ses bras afin de la faire asseoir sur le lit en forçant un sourire sur ses lèvres. Rassurée, Fanny acquiesça avec enthousiasme en se blottissant contre lui tandis qu'il l'entourait d'un bras. Si Romulée avaient des questions sur le bout de la lague, elle les garda sagement pour elle, ne souhaitant pas perturber le frère et la sœur. A la place, elle tenta de se concentrer sur le film, en vain, bien trop curieuse. Wulf affirmait que Dame Candesc n'était pas sa mère, pourtant, il reconnaissait très clairement Fanny comme sa sœur. La maîtresse du manoir était donc la belle-mère du garçon ? Était-elle également celle de Fanny, ou sa génitrice ? Mais alors, où était la véritable mère de Wulf ?

Romulée Potter : MearahOù les histoires vivent. Découvrez maintenant