Chapitre 14

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Après avoir été guidés par leur guide aux mystérieuses intentions pendant quelques dizaines de minutes, Hélios et Simon retrouvèrent enfin la lumière du jour. Pendant leur fuite, ils n'avaient pas pris en compte à quelle profondeur ils étaient descendus dans les galeries et à quel point ç'aurait été difficile de retrouver un chemin sous les yeux des autres trolls et gobelins sans l'aide de la gobeline. Celle-ci les emmena aux frontières du territoire qui longeaient celui des Golems de Glace. Puis sans un mot, la petite créature se retira dans les profondeurs des tunnels en trottinant, laissant Simon et Hélios seul.

Une fois la gobeline partie, le métamorphe se laissa tomber au sol avec seulement son tigre ailé pour le voir. Il se sentait tellement honteux de son acte comme s'il l'avait marqué d'une tache indélébile. Il s'était enfoncé au plus profond d'un trou dont il ne pourrait plus jamais en sortir. Une fois entré, on le pouvait plus s'en sauver. L'acte l'ayant tellement dégouté de lui-même, il n'avait pas réussi à reprendre sa dague offerte par les Ausardia dans le petit tas de poussière. Son omagi vint se frotter à lui et le consola du mieux qu'il pouvait en le contredisant d'une petite voix.

- Cet elfe était mort depuis des lustres, tu l'as seulement libéré de son existence maudite, le rassura télépathiquement le naozuran.

Insensible, Simon balança sa tête en arrière en laissant son regard vagué vers le vide. Il sentait vide comme si l'étincelle de son innocence s'était éteinte et en même temps égoïste de ne pas ressentir la moindre peine pour Aurélien pour lui avoir faucher sa vie, juste la culpabilité de son acte. Pour réponse à son animal familier, le jeune homme se contenta de soupirer.

- Aryuna avait raison, je me suis vraiment beaucoup éloigné de mon objectif premier. Malgré notre dernière entrevue, je me suis entêté sans le vouloir sur la mauvaise voie et voilà où cela m'a mené... Je devrais peut-être me cacher avant qu'elle ne se lance à ma poursuite, elle m'a assuré qu'elle me surveillerait toujours du coin de l'œil... remarqua sarcastiquement le jeune homme.

Hélios regarda son maitre se renfermer sur lui-même sans pouvoir l'arrêter dans sa chute. L'animal ronronna près du métamorphe pour lui montrer son soutien et lui demanda d'une voix hésitante.

- Mais... tu vas continuer la traque de l'Ombre Insaisissable, non ?

- À quoi bon ? Après ça, je ne me sens même plus digne et capable de continuer cette aventure, je suis devenu aussi mauvais que Charly...

- C'est faux ! rétorqua le tigre ailé. C'était un accident pour toi, lui c'est par pur plaisir et cruauté !

En dépit de sa riposte immédiate, Hélios ne parvint qu'à faire un sourire amer d'une durée négligeable sur le visage du jeune homme. Ce dernier souffla d'une voix lasse.

- De toute façon, c'est perdu d'avance, la piste s'est arrêtée en même temps que la vie de Aurélien. Charly nous filera toujours entre les doigts...

- Arrête de dire des c*nneries pareilles, ce n'est pas vrai, on va retrouver Charly coûte que coûte ! C'est toi-même qui l'a dit ! rugit Hélios les yeux vairons dans les siens. Alors tu vas arrêter de te lamenter sur tout et tu vas te bouger pour qu'on se sorte de cette impasse !

Devant la répartie de son naozuran, Simon sembla se réveiller de sa passive attitude. Il se redressa comme plus intéressé par la conversation mais garda un ton sceptique lorsqu'il demanda.

- Comment veux-tu continuer ? Nous sommes allés au bout de notre seule piste, je pense que Théo nous a raconté tout ce qu'il savait et Aurélien...

- N'en parlons pas, j'ai compris, l'interrompit son familier. Mais il t'a révélé un nom, tout n'est pas encore fini...

- Tu veux parler de cette Evelyn ? Ce que nous a dit cet elfe n'a ni queue ni tête, l'Ombre Insaisissable, c'est toujours Charly aux dernières nouvelles.

- Qu'a-t-il voulu dire alors ? réfléchit le naozuran. Pour cette question, je crois qu'on va avoir besoin de l'aide d'une certaine sirène.

Simon eut un regard interloqué en comprenant de qui son omagi voulait parler avant de soupirer pour accepter sa solution. Retrouver Alexis ne serait pas une mince affaire mais il avait déjà une idée où il pourrait se trouver. S'il avait eu le choix, le métamorphe n'aurait pas voulu que son meilleur ami participe à cette traque, vu qu'il profitait déjà avec Lixia en amoureux, mais l'aide de la sirène d'eaux salées lui serait précieuse et dans cette impasse où ils se trouvaient, même indispensable.

Le jeune homme souffla un coup lorsque sa silhouette humaine disparaissait derrière une montagne de plumes. Il prit la forme aérienne d'un rapace et, d'un hochement de tête entendu avec le tigre ailé, ouvrit ses ailes pour s'envoler. Suivi de près par le félin, le rapace orienta son vol vers le nord, vers l'étendue d'eau qui bordait les terres des Golems de Glace. L'Océan Urdina où se trouvait certainement son meilleur ami accompagné de sa petite amie. D'après ce que la sirène d'eaux salées lui avait dit, il était parti voir sa famille et avec un peu de chance, il y serait encore quand ils arriveraient là-bas. En avisant la course du soleil dans le ciel, il espéra intérieurement qu'ils y trouveraient aussi un endroit où se restaurer et se reposer, après les aventures de la journée, ils en avaient bien besoin.

Après une heure ou deux à voler au-dessus du territoire des Golems de Glace, Simon et Hélios virent enfin l'eau s'étendre à perte de vue devant eux. Atteignant leur but, le jeune homme amorça sa descente et atterrit avec grâce sur la plage. Le sable chaud lui réchauffait les serres alors qu'il reprenait sa forme humaine. Alors que Simon allait indiquer à son naozuran d'entrer dans l'eau, il s'aperçut que le jeune tigre ailé restait en vol stationnaire au dessus du sol, fixant obsessivement le sable.

Le métamorphe comprit ce qui étonnait son omagi, ce dernier n'avait encore jamais vu une plage et encore moins de sable de sa vie. En souriant devant la première découverte de Hélios, il le rassura en s'approchant de celui-ci.

- Tu peux y aller, il n'y a rien à craindre de la part du sable. À part la satisfaction d'enfoncer ses pieds dedans.

Confiant en son maitre, le félin se laissa tomber prudemment sur le sable puis, en sentant la chaleur de celui-ci sur ses coussinets, commença à se rouler dedans en ronronnant de joie. L'animal semblait beaucoup davantage aimer la chaleur des bords de mers aux fraicheurs hivernales qu'ils avaient traversées les jours auparavant. Suite à plusieurs minutes de jeu dans le sable, Hélios se décida enfin à suivre son maitre jusqu'aux vagues, le pelage rempli de petits grains de sable.

- On reviendra ici, hein ? demanda mentalement le jeune naozuran. Mais sinon, comment je fais pour nager, moi ?

- Les naozurans sont de très bons nageurs, ne t'inquiète pas, le rassura son maitre. Je me chargerai de te former une bulle d'air pour que tu puisses m'accompagner en profondeur.

Aussitôt, le métamorphe entra dans l'eau sous la forme d'un terrifiant crocodile marin et s'exécuta. Équipés, ils entrèrent dans l'eau et longèrent le fond de sable. Simon tenta de garder le cap, mais derrière lui, Hélios s'extasiait devant n'importe quel récif corallien ou poisson, les yeux émerveillés dans sa bulle d'air. Le félin ailé ne trouva aucun mal à nager malgré ses réticences, en effet, les atouts secrets des naozurans étaient leurs puissantes pattes palmées semblables à celles des loutres et leurs plumes imperméables tels celles des albatros .

En dépit des nombreuses haltes du jeune tigre ailé, Simon et ce dernier atteignirent enfin leur destination. La Villa Naufrage, la résidence de son ami, se dressait devant lui.

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