Le 28 octobre 1954, David se rend à Alger par avion, ne pouvant pas rester en place tout le voyage, il était tout excité à attendre son arrivée là-bas, content de mener un projet qui lui tenait à cœur, vérifiant toutes les dix minutes ses bagages pour surveiller sa caméra, qui était la meilleure de toute sa collection.
Une fois arrivé en Algérie et sorti de l'aéroport, il fut immédiatement accueilli par Amine Madouri, qui attendait son arrivée depuis deux semaines, et qui fut très heureux de le voir, il n'était pas seul, il y avait avec lui quelques chefs de certaines de bases à qui David distribua de petits cahiers identiques où il avait écrit et dessinés les exercices de l'entrainement militaire dans les moindres détails, dont il imprima cent exemplaires pour chaque base, qu'il mit dans un carton pour le transport.
Après avoir un petit peu discuté, les hommes se dirigèrent en voiture vers un endroit isolé, à l'apparence abandonné, près d'une forêt, quand Amine sortit de la voiture avec les autres hommes, il sortit une jumelle de la poche de sa veste, il observa avec chaque voiture qui passait, il remarqua une camionnette blanche qui transportait des fruits et cria : « C'est elle ! », au même moment, David s'interrogea : « C'est elle, quoi ? Je ne vois que des fruits ! ». En approchant, Amine fit signe au conducteur de s'arrêter, et ce dernier lui répondit d'un signe de compréhension, la camionnette s'arrêta, Amine et les soldats commencèrent à préparer des sacs, et David baignait dans la confusion la plus totale, pour lui, ils allaient prendre des fruits dans d'énormes valises, mais dès que le conducteur retira quelques pastèques et trois melons, il fut stupéfait de voir des armes, des grands et imposants fusils aux petites et agiles mitraillettes, toutes le sortes d'armes y étaient, sans mauvais jeu de mot, les bombes étaient toutes dans un cageot, qu'on prenait une fois couvert pour un cageot de grenades, ce qui permettait de parfaitement les dissimuler. Amine voulut essayer un fusil, la balle alla à plusieurs mètres avant de s'écraser contre un arbre :
- Il est bien celui-là, je pense que je vais le garder pour moi.
Après avoir inspecté les armes et payé le conducteur, les hommes apportèrent les armes dans les sacs qu'ils mirent dans la voiture, ils allèrent ensuite dans un entre endroit, qui ressemblait à une sorte de parking où il y avait une dizaine de voitures, chacune appartenant à un commandant, ces derniers les chargèrent d'armes et partir les distribuer à travers tout le pays pour que chacune des cent bases soit armée. Amine et David se dirigèrent vers ce qui ressemble à un petit et vieil entrepôt abandonné, mais dès que les deux hommes y entrèrent par une petite porte qui se trouvait à l'arrière, David découvrit stupéfait la centaine d'hommes qu'il y avait là dedans, tellement stupéfait qu'il dégaina son appareil photo pour capturer ce moment. L'endroit était en fait très spacieux, il n'était pas sale, même très propre, c'était l'extérieur qui le trahissait, pensant que l'intérieur serait pareil, ils avaient même réussi à construire deux étages tant le plafond était haut, il ne voyait pas au début comment cent hommes pouvait y entrer, mais maintenant il avait même remarqué qu'en plaçant 40 hommes en bas, 30 au premier étage et encore 30 dans le second (ce qui faisait 100), il nous resterait encore un grand espace que les soldats utilisaient pour stocker les armes, les munitions et les provisions de nourriture.
Stock d'armes que David prit en photo et qu'Amine lui présenta :
- Tu vois tout ça, c'est magnifique, surtout ces petits fusils, la majorité de la marchandise vient de l'union soviétique, passe par la méditerranée, puis par la Tunisie, avant de venir ici en Algérie. Tout ça, c'est grâce à mes frères d'armes, beaucoup ont vendu leurs biens comme des bijoux de famille ou des terres et énormément ont travaillé en France ou quelque part ailleurs à l'étranger, moi, j'ai passé quelques mois en France, j'ai sali mes mains dans le ciment en tant que maçon et tâché mes mains dans le sang en tant que boucher, s'ils savaient que ce bougnoul comme ils m'appelaient allait les faire sortir de l'Algérie, moi et mes frères et sœurs d'armes à travers tout le pays, car aucun algérien n'accepte leur présence en Algérie, ils nous ont colonisés nos terres et on va la reprendre de force, c'est pour ça que des milliers d'hommes et de femmes de tout âge vont rejoindre le front, il y a même des étudiants qui ont arrêté leurs études qui leur promettaient monts et merveilles pour venir se joindre à nous dans cette guerre. Mais ce n'est pas nous qui ont voulu la violence, c'est eux, car on avait des années de cela des échanges politiques pour l'indépendance, mais cela n'a abouti à rien, d'ailleurs, le 8 mai 1945, alors que les européens faisaient la fête, nous avons été massacré dans les rues, c'est qui veulent toute cette violence et qui la provoquent.
Lors du dîner, tous les soldats profitaient de la présence de leurs frères d'armes, car ils n'étaient pas sûrs de les revoir après la guerre, Amine se confia à David et lui parla un petit peu de sa vie, entre deux cuillères de soupe, avec des phrases par-ci par-là. Il avait une fille, Malika, qui avait neuf ans, qui vit maintenant avec sa grand-mère dans une maison cachée dans la montagne, elle orpheline, sa mère et la sœur d'Amine ont été emmenées par des militaires français qui les avaient violés, fusillées, puis laisser leurs cadavres aux vers et aux quelques bêtes qui rôdent dans la forêt. Le récit de leur assassinat laissa Amine en colère et triste, regrettant une Algérie qu'il n'a jamais connue, une Algérie libre.
David essaya de décompresser en changeant le sujet et les deux hommes continuèrent à discuter normalement, faisant même quelques blagues :
- Tu sais, moi, je viens d'une ville près de la frontière française et on disait que l'Algérie était française avant l'Alsace et la Lorraine.
- Et bien, plus pour longtemps.
- C'est vrai ça, même si je ne suis pas nazi et je ne suis pas près de l'être, faut reconnaître qu'ils ont fait goûter à ces français la colonisation qu'ils font subir depuis des décennies.
- T'as raison, mais bon, ici, ce n'est pas comme chez les nazis, y a le décret Crémieux, ils les protègent quasiment de tout, t'as de la chance d'être juif.
- Peut-être, mais s'ils m'arrêtent ici, ça sera le décret de Vichy.
Les deux hommes continuèrent leur soirée à discuter, à parler de tout et n'importe quoi, mais ils se couchèrent de bonne heure car demain les attendait un grand jour.
Le lendemain matin, David eut le temps de s'entraîner à nouveau, chose qu'il avait arrêté de faire depuis des mois, mais il a bien gardé sa forme physique et a vite repris goût au sport, il tira des balles sur des cibles pour la première fois depuis des années, chose qu'il fit avec toujours autant de précision et de technique. Il eut entièrement le temps d'entraîner Amine et les autres soldats, Amine apprenait très vite et avait l'air d'un expert en tirant sur les cibles une à une, en sprintant sur plusieurs dizaines de mètres avec un énorme fusil aussi lourd et aussi fragile qu'un nouveau-né. L'entraînement prit fin assez tard dans la soirée, il reprit le lendemain, tôt le matin, les deux hommes redoublèrent d'efforts, mais ce fut au troisième jour que se termina l'entraînement militaire abrégé pour Amine et les milliers d'autres soldats. L'armée était entraînée et armée, donc prête, pour mener cette guerre qui commencera, demain.

VOUS LISEZ
Destins secrets
Historical FictionJ'ai écrit ce roman à l'âge de 12 ans, à la base objectif personnel que je m'étais fixé pendant le confinement. Même si je le trouve aujourd'hui, avec du recul, niais et rempli d'incohérences historiques et d'anachronismes, il reste quand même un li...