On dit souvent que pour savoir si une amitié est éternelle, elle doit durer au moins sept ans, ce qui fut le cas d'Amine et de David durant ces sept années de guerre, et c'est durant ces sept années où les temps étaient durs, rudes, tristes, noirs, sombres, dangereux et déprimants qu'ils purent consolider leur amitié qui dura très longtemps.
Et, le 5 juillet 1962, après plusieurs batailles, missions, sacrifices, de la part des soldats d'Amine et David mais aussi de la part de tous autres soldats algériens, après que les deux hommes aient visité Alger, Constantine, Oran, et pleins d'autres wilayas jusqu'à même Ghardaïa au nord du désert, après qu'ils aient vécu les pires et les meilleures expériences de leurs vies, après qu'ils aient perdu des frères d'armes où gagnèrent de nouveaux avec d'autres soldats qui rejoignirent cette grande armée qui comptait à la fin de la guerre plus de 15000 soldats, après qu'ils aient vu les pires horreurs, après qu'ils aient échappaient plusieurs fois à la mort, après 132 ans de colonisation française, après 7 ans de guerre, l'Algérie était enfin indépendante.
David rentra aux États-Unis retrouver sa famille qui était contente de le voir sain et sauf après la fin de la guerre, surtout Marie, qui attendait impatiemment la fin de cette guerre, si joyeuse qu'elle surpassa sa peur de l'avion et alla avec son mari et ses enfants en Algérie, pour voir ce pays qui venait juste de fermer la plaie du colonialisme et qui essaye maintenant d'avancer pour un pays meilleur, pour voir le pays pour lequel son mari s'est battu, même si ce n'était pas le sien, pendant sept ans. Elle découvrit aussi les magnifiques paysages de l'Algérie, combinant le froid glacial des montagnes de la Djurjura et le chaud étouffant des dunes dorées qui ornent Adrar, reconnaissant même dans les rues de la Casbah les décors du film du même nom sorti en 1938.
Amine était le plus heureux des hommes le 5 juillet 1962, c'est comme s'il voyait naître avec ses millions de concitoyens le pays qui vient de se créer après 7 ans de guerre, équivalents aux 9 mois du fœtus dans l'utérus. Il était rempli de fierté et de béatitude, il remerciait tous les dieux et tous les facteurs qui pouvaient avoir une relation avec la libération de l'Algérie, il hurlait à tue-tête avec tous les hommes et toutes les femmes de son pays : « Tahya el Djazaïr ».
Amine retrouva sa fille et tout le reste de sa famille le lendemain de l'indépendance, ils étaient tous cachés dans les montagnes et les forêts épaisses afin de ne pas être capturés par les français. C'était le soldat qui revenait de la guerre et qui retrouvait sa famille après des années d'absence, ils étaient tous là et tous heureux de le voir, ils avaient tous changés, comme lui d'ailleurs, mais le changement le plus flagrant était celui de sa fille, Malika, il l'avait quitté alors qu'elle avait à peine neuf ans, toute petite et innocente, mais maintenant elle en a dix-sept !, c'est devenue une femme, elle est maintenant mature et faisait même la taille de son père, cette découverte unique en son genre a créé en Amine un sentiment, et de fierté, et de culpabilité mélangée à de la tristesse, de fierté, car il était fier de constater que la fille qu'il a vu naître devenir une femme, et de culpabilité car il se sentait coupable de ne pas l'avoir vu grandir de ses propres yeux, il était triste car il n'avait pas pu voir sa princesse, comme il l'appelait, grandir au fil de ces années qu'il a passé à faire la guerre. Mais bon, comme d'habitude, le bon sentiment l'emporte sur le mauvais, et Amine n'arrêtait pas de cribler sa fille de questions sur tout ce qui s'était durant ces années où il ne l'avait pas vu, et elle aussi en faisait de même en le noyant dans un océan de questions sur tout ce qu'il a fait durant la guerre, ainsi, le père et la fille continuèrent leur discussion jusqu'à la tombée de la nuit.
Après avoir passé plusieurs jours avec sa famille et après avoir resserré tous les liens, Amine se rendit à Marseille, car il n'avait pas oublié l'amie de son cœur, Stéphanie. Il la retrouva au même parc où ils s'étaient rencontrés, elle était aussi contente que lui face à l'indépendance de l'Algérie, ils parlèrent durant des heures de ça, se rapprochant de plus en plus, passant des journées à discuter, puis des semaines, puis des mois, leur relation devint un amour sincère mais pas encore assumé, et puis, grâce à un regard complice, ils se livrèrent, chacun à l'autre, tout à fait comme Marie et David, ils s'aimaient tous les deux, et étaient fous de joie.
Et, après quelques mois seulement, avec le consentement de Malika et celui des parents de Stéphanie, ils se marièrent et lièrent par les liens du mariage jusqu'à l'éternité. Le couple emménagea ensuite à Alger avec Malika, qui contrairement aux clichés sur les belles-mères, s'entendait très bien avec Stéphanie.
Pour revenir à David, celui-ci, pour la première fois depuis sa première année de prison à Mulhouse, n'avait pas écrit de livre durant ces sept ans de guerre en Algérie, mais avait rédigé un carnet de bord pour parler de ce qu'il a vécu en Algérie, en omettant aucune atrocité ou ignominie de la part de l'armée française, rajoutant à cela plusieurs livres et films qui parlaient de la guerre d'Algérie ou de la guerre en général, sans filtre, contrairement à plusieurs réalisateurs qui aiment romancer leurs films, mettant même quelquefois de vraies images de combats. Tout ça avait affecté l'opinion publique et a fait prendre à la France, qui s'était sorti presque indemne du conflit, ses responsabilités, à s'excuser et à assumer toutes les choses horribles qu'elle a commis en Algérie et dans tous les autres pays qu'elle a colonisé. Amine avait lui aussi sorti un livre, son seul livre, où il relate son expérience dans cette guerre, racontant avec détail des faits que la France s'est efforcée d'effacer de son histoire, livre, qui grâce à son étroite relation avec David, a été publié par la même maison d'édition qui éditait son ami, et toute la médiatisation autour du livre, lui fit avoir un succès monstre.
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Destins secrets
Historical FictionJ'ai écrit ce roman à l'âge de 12 ans, à la base objectif personnel que je m'étais fixé pendant le confinement. Même si je le trouve aujourd'hui, avec du recul, niais et rempli d'incohérences historiques et d'anachronismes, il reste quand même un li...