Au cœur des ténèbres (Sanzu x OC x Mikey)

Prologue

Pourquoi ?

C'était son unique question, et pour autant, aucun son n'avait réussi à franchir la barrière de ses lèvres entrouvertes en raison des mots qui venaient d'être prononcés. Elle voulait connaître les raisons qui l'avaient poussé à commettre cette atrocité, et non savoir si ce qu'il venait de lui avouer était vrai, car elle en avait déjà la réponse. Le sourire qui ornait le visage de son interlocuteur était sincère. Sincère de sa cruauté.

Le choc de cette révélation avait occulté son environnement, lui faisait oublier où elle se trouvait et que l'ensemble des cadres du Bonten observaient cette scène avec un certain plaisir malsain. Son corps se paralysa face à l'homme qui lui faisait face.

- Je l'ai tué ! répéta-t-il d'un rire gras. Et putain ce que ça m'a fait du bien, tu ne peux pas imaginer !

Les larmes, impossible à contenir, se mirent à couler silencieusement sur ses joues. Elle avait traversé tant d'épreuves, bravé le danger, dansé avec la mort en reniant ses beaux principes qui n'avaient aucune place dans ce monde. Tout ça pour lui. Elle s'était entièrement sacrifiée pour tenir la promesse qu'elle lui avait faite.

Il s'avança de quelques pas vers elle, entrant dans son espace personnel, puis se pencha en avant, rapprochant son visage du sien. De cette promiscuité, elle pouvait lire la joie qui animait son regard. Était-ce vraiment lui ? Étrangement, le doute ne trouvait pas sa place dans son esprit. Il avait toujours eu cette part de ténèbres en lui et il ne s'en était jamais vraiment caché. C'était plutôt elle qui avait feint de ne pas la voir, pensant que ce n'était pas si grave et qu'il ne lui ferait aucun mal. Pourtant, à cet instant précis, il était plus qu' heureux de la voir souffrir.

- Tu veux que je te dise un truc ? C'était le deuxième plus beau jour de ma vie quand j'ai balancé son cadavre dans la rivière.

Chaque mot qui sortait de sa bouche était une douleur comparable à un coup de poignard. Des gémissements de détresse s'échappaient de sa gorge, nouée par l'intensité des émotions qui l'assaillirent. Un sourire, encore plus cruel que le précédent, étira les lèvres de cet homme. Il était euphorique rien qu'à observer sa souffrance, visible de tous.

- Te voir pleurer et t'entendre chouiner comme ça... J'en ai rêvé, tu peux pas savoir à quel point ça me rend fou de joie.

Son sourire s'évanouit soudainement, comme s'il avait été emporté par un courant d'air.

- Je vais te détruire. Ce sera ma vengeance ultime. Je viendrai te tuer quand j'estimerai que tu auras autant souffert que moi.

Elle resta tétanisée quand sa main vint remettre une mèche de ses cheveux derrière son oreille, délicatement. Un geste doux alors que ces mots étaient d'une violence innommable.

- Toi qui voulais me sauver, qui a vendu son âme pour moi, dit-il glissant ses doigts de son oreille à sa joue humide de ses larmes. Sache que je te hais, murmura-t-il. Je te hais depuis le premier jour où je t'ai vu.

Il se redressa, la dominant de toute sa hauteur, le regard maintenant brûlant d'une animosité sans vergogne. Elle se souvint que ce n'était pas la première fois qu'elle y faisait face. Elle avait déjà croisé les flammes de sa haine briller dans ses yeux. Et toutes cette fois-là aussi, elle avait feint l'ignorance.

- À mon tour de te faire une promesse. Je vais prendre mon temps pour te torturer, te faire souffrir et te tuer car c'est tout ce que tu mérites, Perséphone.

Il recula d'un pas avant de se retourner vers la sortie de cette pièce sombre dans laquelle ils se trouvaient.

Pourquoi, se demanda-t-elle encore, échouant une nouvelle fois à le formuler. Au fond d'elle, elle savait pourquoi il avait commis ce crime et pourquoi il lui vouait une haine viscérale. Ce qu'elle désirait savoir plus que tout, c'était pourquoi cela arrivait. Elle avait sacrifié sa vie, si paisible avec un avenir prometteur, elle avait abandonné son rêve et écrasé ses ambitions. Elle s'était alliée au mal incarné pour parvenir à le sauver. Elle avait tout perdu en s'engageant dans un monde sombre et impitoyable. Alors pourquoi cela n'avait-il pas fonctionné ? Pourquoi se retrouvait-elle à souffrir autant ? N'était-ce pas suffisant ?

Les larmes obstruaient sa vision et l'air se raréfia dans ses poumons. Pourquoi était-il aussi cruel ? N'avait-il pas vu ses sacrifices ? Ne se rendait-il pas compte de tout ce qu'elle avait fait pour lui ?

Si, bien sûr que si. Il l'avait vu. Il le savait mieux que quiconque dans cette pièce, mais il avait préféré choisir la voie de la vengeance. Était-ce de sa faute ? Si elle n'avait pas fait semblant de ne pas voir et de ne pas comprendre, les choses auraient-elles été différentes ? Probablement que oui. Les regrets et un sentiment d'amertume vinrent obscurcir son esprit. Si elle avait fait preuve de plus de jugement, elle n'en serait pas là. Peut-être aurait-elle dû le laisser tranquille, ne pas courir après lui. Il n'aurait peut-être pas commis ce meutre, il l'aurait peut-être laissé vivre sa belle petite vie, loin de toutes ces horreurs.

Mensonge. Même si elle ne se serait pas jetée dans la tanière des loups, il serait venu la chercher lui-même. Sa haine envers elle était ancrée dans son âme. Quoi qu'elle aurait fait, le résultat aurait été toujours le même : Il voulait la tuer.

Pour la première fois de sa vie, elle ressentit de la haine pour lui. Cette émotion sauvage qu'elle éprouva si subitement et si brutalement, envahissait tout son être. Il la dévora entièrement, consumant sa conscience, noircissant son âme.

Il ne méritait pas tout ce qu'elle avait fait pour lui. Il ne méritait pas d'être sauvé. Il méritait de mourir.

C'était lui ou elle.

Son sang ne fit qu'un tour dans son corps et, muée par cette soudaine fureur indescriptible, elle tourna son regard là où était installé Mikey. Il avait posé son arme à côté de lui, juste avant de s'asseoir. Elle croisa les orbes ébènes de cet homme habituellement vide d'émotion, et puis plus rien. Sa conscience s'était comme éteinte.

Mikey, simple témoin depuis le début, comme le reste des membres de son organisation, scruta les ténébres assombrir le regard de la jeune femme. Cette noirceur, il la connaissait mieux que personne. Ces pulsions sombres, elles avaient tant de fois pris possession de son corps qu'il savait ce qu'elles allaient faire d'elle. C'était la première fois qu'il était témoin, et non acteur, de cette folie. Et cela le toucha plus qu'il ne l'aurait imaginé.

Quand la jeune femme baissa les yeux une fraction de seconde sur son arme, posée à côté de lui, il savait qu'elle allait la prendre. Il aurait pu l'en empêcher, mais il voulait savoir jusqu'où elle allait se laisser consumer par ses pulsions. Il voulait voir si elle était comme lui.

Il l'observa faire quelques pas dans sa direction, elle ne le regardait même pas, les yeux fixés sur l'arme qu'elle saisit aussitôt une fois à sa portée. Quelques membres avaient réagi en sortant les leurs, mais se stoppèrent d'un geste de sa part. Il voulait la voir commettre ce qu'elle avait toujours esquivé de faire depuis qu'elle était entrée dans son enfer à lui.

La seconde suivante, elle s'était retournée vers celui qui avait allumé cette flamme en elle. Elle retira le cran de sécurité et pointa, sans même trembler, le canon dans le dos de cet homme qui avait juré de la tourmenter. Il ne se doutait en rien que c'était la fin pour lui. Puis elle tira, sans la moindre hésitation, à plusieurs reprises.

Personne ne réagit face au meurtre qui venait d'être commis devant leurs yeux. C'était habituel pour eux. Ce qui ne l'était pas en revanche, c'était que cela soit commis par l'unique femme présente en ces lieux, et qu'elle avait vidé un chargeur entier sur la personne qu'elle voulût sauver plus que tout au monde. C'était même un spectacle affriolant, pour certains, de la voir tomber plus profondément dans cet abîme.

Mikey se leva, fixant cette petite chose se réveiller de sa transe. La peur et l'incompréhension étaient parfaitement lisibles quand ses yeux s'orientèrent dans sa direction. Elle trembla et commença à geindre lorsqu'elle se rendit compte de ce qu'elle venait de faire.

Lui, tout ce qu'il retenait, c'était qu'elle avait tué un de ses hommes. Et elle, tout ce qu'elle voyait, c'était cet homme terrifiant lui faisant face.