Chapitre -24- Indépendance

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« L'indépendance se n'est pas une récompense, c'est une responsabilité »

Indépendance
POV: MILA

Les rayons du jour perçaient les fenêtres entrouvertes du commissariat, à l'endroit où le froid s'infiltrait comme un serpent dans les petits interstices et me donnait la chair de poule. Du moins, j'essayai de me convaincre qu'il en était responsable.
Un homme habillé d'un lourd manteau d'hiver marron ouvrit la porte transparente et se présenta au comptoir. Ses cheveux bruns en batailles s'arrêtaient à sa nuque. Son nez droit et imposant se démarquait de son visage marqué par la vieillesse. De dos il semblait propre sur lui, il portait néanmoins une barbe courte et bien rasé.

Il remarqua que je le fixais intensément lorsqu'il se retourna après avoir discuté avec l'hôtesse. Nos regards se croisèrent, deux inconnus, c'était ce que nous étions. Du moins pour moi car aux yeux de la loi il était mon oncle.

Je tremblais, ce n'était pas le froid mais la peur. La peur d'avoir perdu une partie de moi même, il sembla remarquer mon inconfort mais ne montra aucun signe d'empathie. On ne pouvait lire sur son visage qu'une expression sévère et remplie de jugement, il n'était clairement pas heureux d'être ici. L'avait-on obligé à venir? C'était la seule famille qu'il me restait et pourtant je me sentais comme une intruse venant troubler la vie d'autrui.

Je le vis se rapprocher de moi jusqu'à ce que nous soyons côte-à-côte puis me toiser de haut-en-bas avant de commenter:

-Je savais qu'il n'était pas capable de s'occuper de toi mais il était trop orgueilleux pour l'admettre et a préféré fuir à ce que je vois, gronda t'il.

Je restai interdite, paralysée, ne sachant que répondre. Il n'avait jamais adhéré à l'idée que Ombre s'occupe de moi durant l'hospitalisation de nos parents, ce n'était à ses yeux qu'un gamin irresponsable et j'avais la certitude qu'il le détestait. De son point de vue tout était de sa faute, bien sûr c'était plus facile de trouver un coupable que d'admettre simplement la chose mais je n'arrivais toujours pas à le pardonner même en comprenant ce comportement car il mettait toute la faute sur les épaules d'un enfant.

C'est à cette période que nous avons cessé d'entretenir tout contact avec cette partie de la famille, nous retrouvant ainsi davantage isolé. Il ne connaissait plus rien de nous, pourtant il se permettait d'émettre un jugement sur la façon dont mon frère s'occupait de moi. Je sentis la colère que j'avais gardé pendant des années grandir en moi.

-Vous l'avez toujours pris de haut mais vous ne pouvez même pas imaginer ne serait-ce qu'un peu tout ce qu'il a dû faire pour que l'on s'en sorte, répondis-je sèchement.

Un sourire amer déforma son visage mais je ne me laissai pas impressionner, je ne permettrai pas qu'il dise de telles choses sur mon frère en toute impunité. Moi je savais qui il était vraiment et c'était tout sauf la personne qu'il décrivait. La perte de nos parents l'avait profondément affecté mais il avait tout fait pour que l'on puisse reprendre une vie normale tous les deux, même en sacrifiant ce qui était le plus cher pour lui.

-Ouvre les yeux il t'a abandonné, c'est ce qu'il a toujours voulu faire.

Mon cœur se serra, je ne parvenais pas à le contredire sur ce point mon frère avait belle et bien disparu sans rien dire. Je secouai la tête comme pour me débarrasser de cette pensée qui agissait sur moi telle à un poison mortel, je ne devais pas l'écouter.

-De vous deux c'est vous qui nous avez abandonnés, rectifiai-je d'une voix vibrante.

Son visage se durcit, sous l'effet de cette vérité dure à entendre et du fait que je ne me laissais visiblement plus faire face à ses provocations. J'avais grandi et je n'étais plus la même personne, il était temps qu'il en prenne conscience.
Il baissa les yeux, tout à coup moins confiant.

Deuil d'une euphorie -1-Où les histoires vivent. Découvrez maintenant