Chapitre -35- Forêt de songes

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« On ne peut vivre qu'en dominant ses peurs pas en refusant le risque d'avoir peur. »

Forêt de songes

Je fis quelques pas sur le sol cendreux et déserté de cette forêt, plus j'avançais plus je pouvais distinguer à travers le brouillard les contours d'une tente se dessinant sous la lumière vive d'une braise. Cette dernière était teintée d'un motif de camouflage commun au uniforme militaire. Ce choix aurait été intelligent si la forêt avait été verdoyante mais c'était actuellement le contraire, par conséquent elle était très facile à repérer. De plus, le feu juste à côté ne jouait pas en faveur d'une intention d'être discret.
La personne qui avait établi son camp ici devait être assez limité intellectuellement pour faire des erreurs pareilles.

J'hésitais à continuer dans cette direction, ça pouvait être dangereux. Quelqu'un s'était installé ici, dans une forêt à moitié morte à quelque pas d'une fausse de cadavre et d'une organisation qui prévoyait de tuer toute l'humanité, il n'y avait donc rien de rassurant à cette idée. La personne en question avait sûrement un lien avec tout ça, surtout si elle était venue avec une tente de camouflage... Elle ne voulait pas être repérée, c'était certain.

À moins que ce ne soit pour faire du camping mais honnêtement l'idée paraissait plus qu'étrange à cette période de l'année. Pour l'instant je n'avais vu aucune autre trace de vie hormis cette tente et peut-être le bâtiment des mörders de l'autre coté, il était fort probable qu'ils se soient installés dans un endroit désaffecté alors je n'étais pas près de croiser quelqu'un pour me venir en aide.
De toute façon même si l'inconnu était dangereux, je n'avais pas vraiment le choix. Je ne pouvais pas rentrer chez moi à pied alors que je ne savais même pas où j'étais. Je voyais flou, chaque pas m'affaiblissait, j'avais mal aux jambes, dans les chevilles, les mollets et les cuisses. Ma tête criait plus fort que la douleur encore, je ne pouvais et ne voulais plus réfléchir. J'avais la certitude que j'allais bientôt m'évanouir, continuer à marcher n'était plus une option.
Il fallait juste prier pour que ce ne soit pas quelqu'un qui me veuille du mal.

Dans un dernier effort je contournais le feu qui était entouré de deux petites chaises pliables noires et de branche d'arbre puis ouvris la tente de camouflage. Mais à ma plus grande surprise je ne trouvai personne à l'intérieur. L'habitation était plutôt grande, il y avait assez de place pour environ cinq personnes. Quelques affaires étaient éparpillées sur le rebord: un paquet de mouchoir, une pile de vêtements, des sacs, une bouteille d'eau, un chapeau... Je ne comprenais pas en quoi ce dernier était utile alors qu'à l'extérieur il faisait froid et le temps était effrayant.

    Je remarquai que deux sacs de couchages défaits étaient étalés dans la moitié de l'espace mais je n'osai pas y toucher, après tout ce n'était pas mes affaires. Je respectai à une certaine limite l'intimité de mon hôte.
Je m'allongeais sur le sol, c'était froid et dur mais dans une certaine mesure j'étais trop épuisé pour en être dérangé et je ne pus empêcher mes yeux de se fermer, je m'endormis.

•¤♧¤•

Une femme aux long cheveux roses délavées se tenait au fond de la piece, elle avait des yeux couronés de larmes profondément encrées dans sa peau blanche et laiteuse comme les perles d'une parure de coquillages nacrés. Son allure était presque celle d'un fantôme dans l'obscurité, une tache blanche parmi la noirceur, belle à en pleurer mais effrayante.
La créature me fixait comme à son habitude et approchait lentement ses membres fluets comme les pattes d'une araignée de mon corps étalé sur le sol et paralisé. Mes muscles incapables, ne m'écoutaient plus.

Il faisait noir d'une nuit sans étoile, pourtant son visage me souriait. Ses lèvres rouges sang fendaient ses pommettes et remontaient jusqu'à ses oreilles. La chimère se penchait au-dessus de mon visage, posait la pointe de ses doigts froids sous mes yeux et dessinait les mêmes traits gravés sous ses propres yeux, de plus en plus fort au fur et à mesure qu'ils avançaient sur ma peau. Puis j'eus mal partout, un instant je crus brûler, un autre j'étais persuadé que milles aiguilles s'insinuaient sous ma peau ou était-ce ses ongles? Longs et acérés comme les griffes d'un animal qui fendaient mon visage pour y peindre sa peine. Sa douleur.
Quand j'acceptais enfin mon sort elle se glissa à mon oreille, j'entendis des éclats de rires moqueurs se réverbérer, des voix murmurer.

Deuil d'une euphorie -1-Où les histoires vivent. Découvrez maintenant