UTOPIA : LE TRÉSOR DU ROI ➹ minsung

➹ chapitre 25

Le dîner diplomatique avec Kredal avait perturbé Minho, à tel point qu'il avait été incapable de rencontrer Jisung durant plusieurs jours. Même dans ses songes, il n'avait pas vu le jeune Trésor, comme si son esprit lui en bloquait l'accès. Il ne dormait plus aussi bien qu'avant, il n'avait plus autant d'appétit, et il ruminait constamment. Incapable de se concentrer, incapable de tenir son rôle aussi bien qu'il avait pour habitude de le faire. Cette situation avait perduré le temps que Park Sungjin était resté au palais d'Écrin. Après ce dîner, Minho et lui s'étaient revus à quelques reprises pour continuer à faire le point avec l'armée d'Askaria. Ils avaient mis en place d'autres opérations pour sécuriser les routes, et le souverain de Kredal s'engageait à déployer des escouades si seulement Minho concédait à prendre rapidement sa fille pour épouse.

Il devait encore y réfléchir, il ne pouvait pas se précipiter pour prendre cette décision. Il avait conscience que leur alliance dépendait de cela, que s'il rompait le marché conclu entre Sungjin et son père, tout pouvait voler en éclat. Mais il avait besoin de temps pour pouvoir penser à tête reposée. Malheureusement, il n'y parvenait pas. Il avait beau retourner la situation dans tous les sens, il ne voyait rien d'autre qu'un brouillard épais qui le plongeait dans l'obscurité. Comment allait-il pouvoir se dépêtrer de cette impasse ? Il n'en avait aucune idée. Il avait même la sensation de n'avoir aucun espoir. Pourtant, il ne parvenait toujours pas à se résigner au fait qu'il était forcé de se marier. Il savait qu'il était de son devoir de trouver une reine, d'avoir une descendance, mais il trouvait cela tellement injuste. Il était condamné à s'unir à quelqu'un qu'il n'aimait pas, qu'il n'avait pas choisi, et ce pour ne pas perdre tout ce qu'il avait réussi à reconstruire après le règne catastrophique de son père.

Mais c'était aussi à cause de ce père qu'il était autant terrifié. Il l'avait brisé si fort, si profondément, qu'il craignait de voir ressurgir les pires facettes de sa personnalité. Il voulait se montrer fort, demeurer le roi inébranlable qu'il était, l'homme qui s'était forgé à travers les dures épreuves qui lui avaient été imposées. Et s'il tombait ? Et s'il dévoilait au peuple le petit garçon blessé qu'il dissimulait au fond de lui ? Il n'en avait pas le droit. Il ne pouvait pas être faible dans ce rôle de souverain qu'il devait endosser au quotidien. Personne ne pourrait comprendre, personne ne voudrait comprendre.

Appuyé sur la balustrade de la terrasse, Minho laissa un lourd soupir quitter sa bouche. Il ferma les yeux, cessant de contempler le jardin face à lui qui se cristallisait petit à petit à cause du froid. Les arbres arboraient de belles couleurs flamboyantes, mais l'hiver approchait à grands pas. Bientôt, ils seraient mis à nu, dépossédés de leur manteau chatoyant qui donnait l'illusion d'un soleil ardent et qui réchauffait les cœurs. Minho n'avait pas hâte de voir la neige s'installer, de voir ce manteau glacial recouvrir ses terres. Il appréhendait ces jours plus courts, plus sombres, plus moroses.

Il secoua la tête pour se reprendre, il n'était plus seul désormais. Même si la vie ne l'épargnait pas, même si l'avenir ne se présentait pas aussi radieux qu'il ne l'aurait souhaité, il pouvait compter sur ce qu'il avait de plus cher : son Trésor. Pourquoi n'avait-il pas eu le courage de le voir avant ? Pourquoi l'avait-il évité ? Il aurait pu trouver tout le soutien et tout l'amour dont il avait besoin à ses côtés. Jisung lui avait dit être toujours là pour lui. Mais Minho avait peur de n'être qu'un poids, comme il l'avait sans doute été pour Felix, pensa-t-il. Son ami avait fini par être dépendant de lui, et ce n'était pas ce qu'il souhaitait pour Jisung. Il avait peur de lui faire du mal, de le blesser à son tour, de ne pas être en mesure de lui apporter ce qu'il désirait. Il ne regrettait pas de l'avoir choisi pour être à ses côtés, mais avait-il le droit de le garder près de lui, d'être égoïste ? Avait-il le droit de potentiellement le faire souffrir ?

— Minho.

Il se tourna d'un bond à la voix grave qui venait de retentir. Felix se tenait dans l'encadrement de la porte, appuyé contre le bâti. Son sourire en coin ne trompait pas, il ne l'avait pas laissé tomber depuis le dîner diplomatique. Minho savait que la situation l'amusait.