➹ chapitre 14

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Jisung venait à peine de quitter les lieux, mais Minho ressentait déjà un vide immense dans son cœur. Debout derrière la fenêtre qui donnait vue sur la cour, il resta immobile à contempler les branchages s'agiter sous le vent qui soufflait de plus en plus fort. La pluie ne tarderait pas à pointer le bout de son nez. Les températures se faisaient de plus en plus élevées au fil du temps, les beaux jours estivaux étaient en train de doucement s'installer. Bientôt, il ferait si chaud que les orages gronderaient pour arroser les terres agricoles d'Askaria et donner de bonnes récoltes lorsque la saison plus fraîche reviendrait.

Tout était une question d'équilibre et de proportion. Tout avait son utilité, la pluie comme le beau temps. Les tempêtes comme les accalmies. Le bien et le mal. L'ombre et la lumière. Chaque contraire se complétait pour créer une harmonie. L'un n'allait pas sans l'autre, et Minho le savait mieux que quiconque. Il avait affronté bien des tourments pour atteindre la sérénité.

Il soupira d'un air béat ; il avait passé une soirée idyllique auprès de son Trésor. Il l'avait fait sourire, il avait fait battre son cœur comme il n'avait jamais battu. Ils avaient dîné, un délicieux repas où le calme régnait et pendant lequel les regards les plus authentiques s'étaient échangés. Ils s'étaient ensuite promenés main dans la main dans les jardins privés du roi, profitant des fragrances entêtantes des fleurs qui se dissimulaient dans la pénombre. Puis ils étaient rentrés, s'étaient longuement enlacés et embrassés. Ils n'étaient pas allés plus loin, peut-être par crainte d'allumer en eux un brasier qui s'avèrerait difficile d'éteindre.

Minho appréciait chacun des mots de Jisung, chacun de ses sourires et de ses gestes. Il adorait ses baisers qui, à son grand étonnement, se faisaient de plus en plus assurés. À ses côtés, il se sentait aimé et plus humain que jamais. Il était sincère et candide. Entier. Il ne mentait pas, il ne cherchait pas à le tromper pour obtenir ses faveurs. La situation était saine et Minho avait l'impression qu'il pouvait reprendre son souffle dans la cohue de sa vie de souverain. Un souffle nouveau. Il le prenait dans ses bras, plongeait dans ses yeux, et il oubliait tout. Il n'avait jamais ressenti cela auparavant. Même Felix ne lui procurait pas autant de bien et de bonheur. Leur relation n'avait été qu'une illusion, un pansement. Il s'en rendait compte désormais. Sa poitrine lui fit mal. Prendre conscience de cette vérité était une épreuve douloureuse. Il s'était menti à lui-même tout ce temps, sans doute par besoin, pour ne pas souffrir. Il ne pouvait pas s'en vouloir, il avait laissé s'exprimer l'enfant meurtri qu'il avait été, celui qui avait soif d'affection et de reconnaissance.

Il secoua la tête pour chasser ces pensées qui ne lui apportaient qu'amertume. Il tourna les talons et se dirigea vers la chambre. Le parfum des roses bleues embaumait la pièce, il s'y sentit aussitôt en sécurité. Peut-être pourrait-il demander à Jisung de lui fabriquer une bougie à l'irimsalée, il avait appris à apprécier cette odeur qui imprégnait les habits et les cheveux de son Trésor. Il enfila sa tenue de nuit ; une tunique cache-cœur sur un pantalon resserré aux chevilles, puis se glissa sous les draps. Il laisserait les bougies se consumer, elles l'aidaient à trouver le sommeil.

Allongé sur le dos, il joignit les mains sur son abdomen et inspira pleinement à trois reprises. C'était une sorte de rituel qu'il avait instauré grâce à sa mère pour se mettre en condition. Il avait la sensation de sombrer un peu plus vite s'il s'y tenait. Elle lui avait expliqué cela lorsqu'il était enfant et que les cauchemars le tourmentaient même éveillé.

« Prends trois inspirations et accepte la première image agréable qui s'affiche dans ton esprit. Ne pense qu'à elle, et oublie tout ce qui t'entoure. »

Jisung. Il n'y avait que lui dans ses pensées et il était incapable de s'en défaire. Il le voyait, debout devant lui, dans cet espace étrange et sombre. Il discernait sa fine silhouette, perdue dans une tenue qu'il n'avait jamais vue auparavant. Un habit de nuit, en déduisit-il. Mais le jeune homme ne le regardait pas, comme s'il était absent de ce monde, comme s'il n'était pas encore connecté à cette autre réalité dans laquelle Minho était en train de sombrer. Il se sentit presque oppressé, jusqu'à ce que les yeux de Jisung ne se braquent sur lui de façon brutale. Leurs regards se croisèrent pour ne plus se lâcher et, d'un accord commun, leurs pas les guidèrent l'un vers l'autre. Poussés par une force extérieure, naturellement attirés, ils n'étaient pas en mesure de lutter contre l'évidence.

UTOPIA : LE TRÉSOR DU ROI ➹ minsungOù les histoires vivent. Découvrez maintenant