CHAPTER NINE - NV

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— Votre aide m'a été précieuse Miss Bird, et je crois qu'ils ont fait l'unanimité, m'annonce Mary-Line en me présentant un plateau vide

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— Votre aide m'a été précieuse Miss Bird, et je crois qu'ils ont fait l'unanimité, m'annonce Mary-Line en me présentant un plateau vide.

Je souris en réalisant qu'il ne reste plus aucune de nos confections culinaires. J'ai laissé mes oreilles traîner en déambulant près des invités, juste après notre valse, et j'ai eu le plaisir d'entendre de nombreux compliments des bouches des convives.

— C'est fut un réel plaisir pour moi, ça me ramène un peu à ...
Les mots que j'allais prononcer me brûlent les cordes vocales. Comme si mon cœur refusait de l'accepter.

— Avant ? me reprend-elle avec douceur.

Oui, c'est ça, ma vie d'avant.

Je hoche la tête en fixant Faith au bras du Baron West au loin.
— J'apprécie de voir Miss Faith Victoria sourire, murmure la domestique.

— Elle semble vraiment sous le charme du Baron.

Un sourire étire mes lèvres mais je sens qu'elle se crispe d'une façon si imperceptible, que j'en douterais presque.
— Et lui sous le sien, rajoute-t-elle en les observant.

— Pensez-vous qu'il serait un bon époux pour Faith ? j'ose demander.

Elle s'apprête à me répondre lorsqu'un bruit nous incite à nous retourner. Madeline se trouve à quelques mètres de nous et vient de quitter la pièce où je l'ai vu entrer en compagnie de la Reine Scarlett ainsi que du Comte Harrys, quelques minutes plus tôt.

Les traits de son visage ne cachent pas la frustration qui la submerge. Elle se penche contre la porte qu'elle vient de passer, et tente d'écouter à travers elle.

Lorsqu'elle nous repère, elle se redresse et lisse les plis invisibles de sa robe avant de s'éclaircir la gorge.
— Que faites-vous donc ici ? Repartez donc en cuisine ! s'écrie-t-elle à l'intention de Mary-Line le regard froid, vexée de s'être fait surprendre.

Alors que je dévisage la débutante, la domestique se penche dans une révérence polie et me chuchote :
— Que le bon Dieu épargne Lord Harrys d'une femme aussi perfide et cupide.
Elle se redresse et fait volte-face pour quitter les lieux.

Je ris sous cape devant le regard intrigué de Madeline.
— Vous devriez en faire de même Miss Bird, et sachez que côtoyer les Harrys, ne changera en rien vos origines.

Sa réplique acerbe fait naître un sourire mauvais sur mon visage.
— Miss Madeline, veuillez m'excuser de vous avoir interrompu. Épiez donc à votre guise, une femme de mon rang saura taire votre curiosité inconvenante.

Je perçois l'irritation que lui infligent mes mots, je l'ignore et fais demi-tour pour rejoindre Camille qui se trouve en pleine discussion avec le Duc Benjamin Clark. En un mois ici, elle et moi avons pu apprendre à connaître certains membres de la cour, et Benjamin fait partie de ces rencontres dont je me ravie. L'homme me semble si loin de ces rumeurs qui courent. Un comportement bien différent de son confrère, dont j'ai fait les frais.

Je m'étonne pourtant à croire qu'il plaît à Lord Harrys de me chercher de la sorte, de toujours me pousser dans mes retranchements. Bien qu'il reste détestable, j'admets apprécier ce jeu de joutes verbales que nous échangeons, et qui semble étrangement l'amuser.

J'espère nous voir épouser un homme bien différent du Comte. À défaut d'avoir le choix, je souhaiterais que mon amie puisse se marier avec un homme qui la traitera convenablement. Benjamin est un noble respectueux et qui semble l'apprécier, elle serait Duchesse, un bel honneur pour elle et sa famille qui se sont toujours vu présents pour les habitants d'Easthaven.

Quant à moi ? Je suis consciente que ma place serait rêvée par un grand nombre de jeunes femmes de mon village, pourtant je sais que j'aurai été amplement satisfaite d'une vie sans artifices. Le luxe, l'or et l'argent ne sont là que pour combler le manque d'humanité de ces membres de la haute société. Je fais partie de celles qui ont rêvé d'un mariage d'amour, un souhait illusoire, j'en conviens, mais j'ai été longtemps bercée par les jolies histoires que maman me racontait. Un mariage à l'image de mes parents, voilà ce à quoi j'aspirais.

Et l'âge m'a confronté à une toute autre réalité, que ce type d'union est rare et n'est destinée qu'à quelques chanceux. Toutefois, être l'épouse d'un homme travaillant dur pour ramener le sou à sa famille, valait mieux que ceux n'ayant jamais connu le labeur pour subvenir aux besoins de son foyer. Et il était parfait pour ça, pour moi.

Ce sont les mots de Benjamin qui m'échappent à ces souvenirs.

— Je suis fils unique, ma pauvre mère est décédée en couche, explique le Duc à mon amie alors que j'arrive à leur hauteur.

— Vous n'aviez pas d'accoucheuse ? l'interroge Camille intriguée.

— Il y a 25 ans, la seule accoucheuse disponible était malheureusement très malade le soir de ma naissance. Personne n'a donc su gérer les complications. Emerly ! s'exclame-t-il en m'apercevant, ce qui met fin à leur conversation.

— Je ne te voyais plus, renchérit la brune.

— Oui, j'étais en compagnie de Mary-Line, nous discutions.

J'observe Benjamin faire quelques œillades au loin, ce qui pousse Camille à observer à son tour.

— Ces deux-là ont l'air de vraiment bien s'entendre, lance-t-elle en comprenant ce qui a attiré l'attention du Duc.

— Il s'est comporté comme quelqu'un d'honorable avec Faith toute la soirée, déclaré-je en réalisant qu'elle et le Baron sont toujours aussi proches.

Quelques secondes de silence s'ensuivent sans qu'il ne les quitte des yeux.
— Il compte la demander en mariage, annonce-t-il sur un ton qui me laisse entrevoir une certaine amertume.

— C'est formidable ! s'exclame la brune en joignant ses mains l'une contre l'autre.

Je me retiens de m'extasier à mon tour face au visage crispé du Duc. Camille qui réalise le malaise alterne son regard entre lui et moi.
— N'est-ce pas ? tente-t-elle de se rassurer.

— C'est ce que je vais tenter de savoir, prononce-t-il dans un soupir.

— Benjamin ?

Une voix masculine que je reconnais sans mal, sans même avoir besoin de voir son visage, nous interrompt. Je me retourne et découvre un Farell Harrys fermé qui ne fixe que son ami.

— Farell ! Alors qu'est-ce que ça a donné ? le questionne Benjamin.

— J'ai besoin de te parler seul à seul. Rejoins-moi à l'étage.

Il crache ces mots avec hargne. Le Duc nous observe, désolé, puis hoche la tête.
— Passez une excellente fin de soirée les filles.

Nous le saluons, et mes yeux croisent ceux du Comte. Mais cette fois, cette lueur taquine présente quelques minutes plutôt quand nous dansions, a disparu.

Cette fois ? C'est la haine que je ressens lorsqu'il plante son regard perçant sur moi.

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EMERLYOù les histoires vivent. Découvrez maintenant