Un amour arc-en-ciel || KiriBaku

[Bonus] Mina - Tentative ratée et amour inespéré

Cher journal,

Pourquoi dois-je souffrir comme ça ? Pourquoi dois-je subir leurs coups et leurs insultes, leurs remarques et leurs blagues qui ne font pas rire ? Qu'ai-je donc fait pour mériter ça ?

J'ai beau tout ressasser dans ma tête, je ne trouve pas quel acte j'aurais pu commettre pour m'attirer leur haine. C'est effrayant de voir qu'il ne faut rien, absolument rien, pour qu'un être humain décide d'haïr un autre être humain de façon aussi ignoble et violente.

Et moi, je courbe l'échine en les croisant et je souris face à mes amis qui se questionnent du regard à cause de mes bleus tandis que je tire sur mes manches pour cacher les pansements. Combien de temps pourrai-je tenir, dis-moi ?

— Mina, 28 avril 20xx

Cher journal,

J'ai mal. Si mal.

Tout en me regardant dans le miroir des toilettes de l'école, j'écris sur tes pages légèrement tachetées de sang. Ce sang qui coule le long de mes poignets et de mes avants-bras pour que je souffre et oublie la souffrance que me procurent mes bleus. Mes doigts fouillent mon sac à la recherche de pansements.

Malheur ! Je n'en trouve pas. Je me mords la lèvre et pleure en silence, me recroquevillant sur moi-même.

Je vais sécher et rentrer chez moi. Je n'ai pas la force d'affronter le regard accusateur des gens.

— Mina, 10 mai 20xx

Cher journal,

Ma peau est couverte de taches ayant la couleur du ciel, mes amis s'inquiètent, ma mère m'engueule tandis que mon père passe son temps à m'accuser de chercher les bagarres. Et les profs se demandent quoi en me regardant quand je suis en classe.

Que dois-je faire ?

Tandis que j'attends le bus, assise à l'arrêt de bus près de la gare, je regarde passer les trains, des idées étranges et morbides en tête. Je serre les poings. Ces idées sont si tentantes... Tu crois qu'elles pourraient me libérer de tout ça ?

Ahahah. Me libérer un an avant le lycée.

Je vais y repenser. Je veux que ça s'arrête.

— Mina, 31 mai 20xx

Cher journal,

Les vacances d'été sont enfin arrivées. Mes yeux se baladent sur le paysage à travers la fenêtre tandis que je passe mon doigt sur mes cicatrices qui se font pâles sur mes bras et mes poignets.

J'attends mes meilleurs amis pour qu'on aille à la piscine ou au cinéma. Toru a décidé de venir avec nous et elle a réussi à me décrocher un sourire. Je crois que je vais lui demander si elle veut venir avec Eijiro et moi chez la grand-mère de ce dernier la prochaine fois... J'ai bien envie de crêpes.

— Mina, 18 juillet 20xx

Cher journal,

Je regarde souvent les étoiles en rêvant d'en faire partie malgré la présence rassurante de Toru, d'Eijiro et de Katsuki dans ma vie, les autres s'éloignant peu à peu de moi car je ne fais plus d'effort pour les garder en souriant et les écouter pleurer en me racontant leur vie qui, franchement, ne m'intéresse pas.

Les coups ont repris avec la rentrée. Et perdurent encore aujourd'hui.

J'ai si mal au cœur, je ne compte plus les cicatrices. Certains disent qu'il faudrait m'enfermer dans un hôpital psychiatrique quand je fonds en larmes en classe ou quand j'engueule les gens qui ne font "que me bousculer" dans les couloirs, alors que je veux juste être libre. On me vole mes affaires maintenant, et je les retrouve souvent dans les toilettes ou dans le bassin des carpes.

Je regarde souvent les rails et la route, me questionnant des probabilités pour qu'un train ou une voiture me percute au moment où je tombe. La psy de l'école dit que ça s'appelle des pensées suicidaires. Moi, je préfère appeler ça des solutions radicales pour être libre. Chacun sa définition après tout.

— Mina, 14 septembre 20xx

Cher journal,

Je sèche de plus en plus les cours, tout le monde m'engueule pour ça, maman m'a giflé quand j'ai demandé si c'était possible pour une fille d'aimer une autre fille. Je n'ose plus ouvrir la bouche maintenant.

Les solutions radicales pour être libre m'attirent de plus en plus, à tel point que je fais la funambule sur le bord des trottoirs en attendant de basculer lorsque les voitures roulent et passent rapidement près de mon corps qui maigrit, maigrit, maigrit.

On dit que je me laisse mourir. On dit que je suis folle. On dit qu'il faut m'enfermer depuis que j'ai tenté d'étrangler l'auteur et le meneur des coups que je reçois, du calvaire que j'endure. On dit, on dit, on dit. ILS VEULENT PAS LA FERMER UN PEU ??!

Je veux juste que tout le monde se taise. Comme moi.

— Mina, 3 octobre 20xx

Cher journal,

Je traine si souvent près des rails que les habitués de la gare m'observent en silence, me surveillant du coin de l'œil lorsque je m'approche près de la ligne jaune. J'hésite à glisser de ce rebord. Ouais, j'hésite.

Je devrais le faire, tu crois ?

— Mina, 1er novembre 20xx

Cher journal,

Ce soir, je le fais.

— Mina, 5 novembre 20xx

Cher journal,

Je l'ai fait. Du moins, j'ai essayé.

Comment ? C'est très simple. En me jettant sous les roues d'une voiture lors d'une énième balade nocturne. Et ça fait mal maintenant que j'en ai réchappé.

Je suis presque... déçue d'avoir rater mon coup. Je ne pleure pas pour mon acte. Mes amis si. Mes parents aussi, un peu. Un tout petit peu.

Et Toru ? Énormément. J'ai jamais vu autant de larmes couler des yeux de quelqu'un.

— Mina, 25 novembre 20xx

Cher journal,

L'année se termine. Bientôt le nouvel an.

J'ai teint mes cheveux en rose. Pour changer un peu la tête que je voyais dans le miroir. Je reçois moins de coups et moins de blagues qu'avant. Ça me semble toujours trop.

Je passe mon temps avec Katsuki, Eijiro et Toru. Ils me changent les idées. Mamie Eirin aussi.

Je vais aller au temple avec les amis, priés pour une meilleure année. Ou une meilleure vie.

— Mina, 31 décembre 20xx

Cher journal,

J'aime Toru. Et je compte bien lui dire.

— Mina, 2 janvier 20xx

Cher journal,

Un an que je ne te parle plus, ou presque. Ou plus.

Tu te souviens de Toru ?

Elle m'aime aussi. Beaucoup.

On s'est embrassés sur le quai de cette gare où je voulais sauter. Maintenant, je ne veux plus sauter. Je veux prendre le train et voyager loin.

Je suis libre. Vraiment.

Enfin, je crois.

— Mina, 14 février 20xx