— Les filles ont prévu une soirée révision, déclara Juliana avec un grand sourire.
Avec ses yeux en amandes, entre marron et vert, et sa grande bouche aux lèvres fines, tous les sourires de Juliana étaient grands en réalité.
— Tu nous accompagnes ou tu as un entraînement, ce soir ? demanda-t-elle dans le même souffle.
Valentina hésita un instant, faisant mine de réfléchir. Elle n'avait aucune intention de passer la soirée avec les autres filles que fréquentait Juliana.
La petite brune était son ami depuis le collège. Elles avaient même partagé le même petit copain, sans le savoir. Cette mésaventure les avait encore rapprochées à la fin de la troisième, cependant, Saint-Joseph s'était chargé de remettre de la distance entre elle. Valentina l'appréciait toujours et la considérait encore comme sa meilleure amie. Elle savait cependant que ce n'était plus tout à fait aussi réciproque.
Pour cette raison, elle aurait voulu accepter l'invitation et passer un peu de temps avec son amie. Cette soirée révision avec « les filles » n'allait pourtant pas être le moment qui leur ferait retrouver leur complicité. Ces filles n'étaient pas de celles que Valentina appréciait. Beaucoup trop portée sur les ragots, pour commencer. Par ailleurs, pour elles, révision rimait surtout avec fumette et Instagram. Rien de bien productif.
— Non, j'ai pas entraînement, répondit enfin Valentina. Mais je vais voir mon père par contre.
Juliana marqua l'arrêt. Valentina sourit, elle se serait crut dans un film. Son amie s'était arrêtée en plein milieu du trottoir en la dévisageant comme si elle venait de lui annoncer son intention de déménager sur la Lune. Elle resta quelques secondes à la fixer sans un mot.
— Tu reparles à ton père ? s'étonna-t-elle. Depuis quand ?
Valentina sentie la tête lui tourner un instant. C'était l'effet du mensonge. Parfois, elle pouvait raconter des bobards incroyables sans ciller et d'autres fois, la simple idée de mentir lui donnait le tournis. À n'y rien comprendre.
— C'est un peu compliqué en fait, décida-t-elle d'annoncer, pensant évacuer le sujet.
Juliana ne changea cependant pas d'expression et continua de l'interroger du regard. Après un court moment, elle attrapa Valentina par le bras et se rapprocha du bâtiment pour fuir le flux d'élèves. Elle la colla dos au mur avant d'insister de nouveau.
— Ça veut dire quoi c'est compliqué ? Tu le revois ou pas ? Depuis que je te connais tu n'arrêtes pas de dire à quel point c'est un connard et que jamais de la vie tu voudras lui reparler.
— C'est bien pour ça que c'est compliqué, répondit Valentina avec un sourire gêné.
— Hey ! Tina ! C'est moi : Juliana ! Tu peux me parler, tu sais.
Valentina marqua une pause et son amie grimaça.
— Quoi ? reprit-elle. Tu crois que je vais balancer tes histoires aux autres ? Tu ne me fais pas confiance ?
Nouveau silence.
— T'as changé, Tina. Avant, tu m'aurais prévenue avant même de faire un pas vers lui. Maintenant, j'apprends ça complètement par hasard. Je suis sûre que si je t'avais pas demandé tu m'aurais rien dit en plus. Pas vrai ?
C'était vrai.
— Est-ce que c'est moi qui ai changé ? interrogea à son tour Valentina. Ou bien c'est toi ?
— Comment ça ?
Cette fois, le regard de Juliana se fit un peu plus inquisiteur.
— Tu m'as laissée toute seule à Saint-Joseph, je te rappelle.
VOUS LISEZ
Ombre et lumière
JugendliteraturValentina n'a peur de rien ni de personne. Elle est forte et indépendante. Du moins, c'est l'image qu'elle dégage. La vérité est que les sarcasmes, les blagues et même ses actes de rébellion ne parviennent jamais à occulter la colère et la tristess...