Chapitre 45

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Même s'ils vivaient dans une grande ville où la plupart des gens étaient des inconnus les uns pour les autres, l'annonce de la culpabilité du prêtre Franck Martin fut un choc. Il y eut des affichages sauvages sur le grillage de l'église, insultants pour la plupart, agressifs ou blasphématoires au minimum. La rue Percière fut envahie par les fleurs pendant quelques semaines. Même si les journaux avaient précisé que l'acte du prêtre était motivé par la vengeance et que les quatre jeunes retrouvés morts, assassinés avec sauvagerie, étaient impliqués dans plusieurs affaires d'agressions. Plusieurs témoignages vinrent confirmer cette accusation une fois les visages des victimes révélés. Léa, la jeune femme qu'avait sauvée Nolan quelques mois plus tôt, fut parmi les anciennes victimes à reconnaitre au moins une des victimes.

La population se divisa donc en deux parties. D'un côté, les personnes qui accusaient le prêtre d'être un monstre ; de l'autre, celles qui reconnaissaient qu'il avait rendu service à la ville, malgré la violence de ses actes.

Valentina était bien entendu du côté de son ami Francky. Elle lui aurait volontiers prêté main forte, répéta-t-elle plusieurs fois à Hervé, Léo ou Nolan. À présent qu'un peu de lumière avait été faite sur tout cela, elle savait, tout comme la police, que Francky avait vengé Nolan de cette agression, mais qu'il avait aussi vengé Maxim et Léa. Et d'autres encore.

Elle aurait aimé pouvoir le féliciter de vive voix, cependant son numéro était dorénavant non attribué et Francky avait disparu sans laisser le moindre indice de sa destination. L'inspecteur Blainville avait poussé jusqu'à convoquer Valentina au commissariat après avoir visiter la maison du prêtre. Francky avait si bien fait le ménage en partant que les seules empreintes avaient été celle de la jeune femme. Elle avait avoué être venu le voir après son départ et avoir été surprise de trouver l'église désertée. Aucun mensonge là-dedans. Son récit sembla convaincre l'inspecteur qui ne l'incrimina pas davantage.

La semaine qui suivit la disparition de Francky, Hervé continua les patrouilles. Valentina, trop occupée par le rattrapage de ses cours et les visites auprès de Nolan, toujours incapable de bouger à l'hôpital, la contraignit à abandonner. Temporairement, s'était-elle imaginée.

— Il ne reviendra pas, avait déclaré Léo, un soir où les trois justiciers s'étaient réunis sur un toit.

— C'est ce que je me dis aussi, avait renchérit Valentina.

— De toute façon, même s'il revenait, il devrait rester cacher. Aucun intérêt.

Hervé avait ensuite montré sa déception en donnant un coup de pied dans une antenne de télévision. La semaine suivante, les justiciers avaient décidé de tout arrêter pour de bon. Par une étrange synchronisation, le serveur de Justices arrêta de fonctionner. Francky aussi souhaitait qu'ils arrêtent. Ce fut du moins ainsi qu'ils avaient interprété cet arrêt.

De son côté, Valentina se félicita du temps que lui libérait l'arrêt des patrouilles. Même s'il fut autorisé à quitter l'hôpital, après plusieurs semaines alité, Nolan ne put reprendre une vie normale. Il n'était pas définitivement paralysé, cependant sa rééducation fut très longue et douloureuse.

Pendant les quatre premiers mois de sa convalescence, il fut obligé de se déplacer en fauteuil roulant. Dans son appartement minuscule, cet outil était loin d'être pratique. Chaque activité banale, telle que faire à manger, se laver ou déplier son clic-clac pour dormir, était un calvaire. Valentina passait toutes ses soirées et ses nuits là-bas pour l'aider. Cette fois, sa mère ne lui tint pas rigueur de découcher. Elle proposa même que Nolan emménage chez elle pour quelques mois, ce que le dessinateur refusa catégoriquement, pour le plus grand plaisir de Valentina qui avait du mal à imaginer une telle cohabitation.

Ombre et lumièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant