Patron et Prostitué [Terminée]

Chapitre 11 : Organisation de la réception

Romain tient sa promesse et reste à distance de moi. Ses dossiers sont traités à la perfection et je n'ai rien à lui reprocher. Pour un peu, je serai presque attristé qu'il ne tente plus rien. Et en même temps, cela me rassure en tant que patron. Perdre un élément aussi compétant que lui serait un véritable inconvénient pour mon entreprise, d'autant que, plus les semaines passent, plus il devient indispensable dans notre équipe.

Et de la même façon, le croiser au quotidien, avec le sourire qui lui est revenu au fil des jours, m'est tout aussi indispensable. A plusieurs reprises, je me rends à la salle de sport du rez-de-chaussée, dans l'espoir de l'y croiser. J'ai conscience de l'hypocrisie de mon comportement, je sais que je n'admettrais pas qu'il me tourne ainsi autour, que c'est même un reproche que je lui ai fait. Mais c'est plus fort que moi. Son sourire taquin et ses yeux cobalts hantent mes nuits. Le souvenir de son corps m'habite au moindre plaisir solitaire. Mais je crois que le pire, ce sont les moments que nous passons ensemble à travailler et que j'aimerai voir se transformer en discussions du quotidien typiques d'un couple. C'en est au point qu'une nuit, je me réveille, en sueur et avec un barreau du diable, d'un rêve où nous ne travaillons plus ensemble et passons notre temps à faire l'amour. Ce matin-là, j'ai eu bien plus de mal que le jour de son arrivée à le regarder dans les yeux sans changer de couleur ni laisser mon imagination déborder.

Mais un échange de piques entre Steeve et Sandrine lors d'une réunion bimensuelle me rappelle à la réalité. Être en couple dans le milieu professionnel, c'est prendre un risque pour la carrière de chacun.

Je le sais. Lui et moi, c'est impossible.

Noël approche à grands pas et, avec cette fête, notre traditionnelle réception de fin d'année. Comme tous les ans, Sandrine et moi l'organisons comme une soirée professionnelle et de détente. C'est-à-dire que nous convions nos investisseurs et clients à cette soirée, et que tout le personnel est aussi invité. C'est l'occasion pour chacun de discuter dans un cadre moins formel, de lier des relations plus étroites, d'en profiter pour amorcer de nouvelles collaborations et de parler des projets de chacun.

On me l'a déjà reproché lors de la présentation de cet événement et je l'admets : cette réception n'a de détendu que le dresscode. Et encore, personne n'est jamais venu habiller autrement que chic.

Si la date est actée dans les agendas de chacun, les réponses de certains de nos clients et investisseurs tardent à nous parvenir. Aussi, chargé-je chacun de relancer ses contacts afin de pouvoir boucler le budget de la soirée et clos la réunion. Mais alors que je me rends dans mon bureau, je suis intercepté par Romain.

_ Un problème ? » détesté-je qu'un point ne soit pas abordé en réunion.

_ Juste pour savoir qui de vous ou moi relance Monsieur Ewing ?

Je grimace. Il est vrai que notre investisseur américain n'a pas encore répondu à notre invitation. Mais ce n'est pas ce qui m'agace. Je n'ai aucune envie de relancer le texan mais, lors de nos échanges, il m'a paru clair que cet homme n'aimait pas être en contact avec des subalternes. Et c'est exactement ce que Romain sera à ses yeux. Or, il est plus aux miens et je refuse qu'il soit dénigré par un homme incapable d'apprécier sa valeur.

_ Je m'en charge.

Je vois la déception se peindre sur ses traits. Sans doute espérait-il prendre contact avec Ewing pour mieux se placer sur ce dossier.

Il hoche la tête malgré son dépit, et rebrousse chemin vers son bureau.

_ Mais je vous le présenterai à la réception, Romain. Il est important pour le dossier qu'il sache qui vous êtes.

Les mots ont quitté seuls ma bouche. J'ignore qui, de moi ou de lui qui se retourne pour me regarder, est le plus surpris. De même, à quelques pas de lui, je vois Steeve dont le regard passe de lui à moi à plusieurs reprises, entre surprise et une forme de soupçons. Dire qu'il y a un mois je lui réclamais d'intervenir auprès de Romain pour qu'il cesse ses approches, et à présent, je lance au milieu du couloir que je vais le présenter à un investisseur, alors que je n'ai jamais présenté que les chefs d'équipe.