Chapitre 25 - Au cœur du tourment

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Hisae avait simplement fermé les yeux, réflexe inconscient d'une défense pourtant vaine, incapable d'émettre la moindre volonté de résistance face à ce que Soren lui réservait. Mais contre toute attente, le contact glacé du métal supposé lui enserrer les poignets et les chevilles ne lui apparut jamais sur la peau. En rouvrant un œil hésitant, elle put constater qu'Alexein s'était interposé, une main en avant en direction de son coéquipier, qui était resté comme figé dans le temps.

— Ne la touche pas, lâcha simplement le jeune homme, d'un ton à la fois calme et dur.

Impuissante face à une situation qui la dépassait totalement et le cœur tambourinant à lui en briser la cage thoracique, l'étudiante se contenta d'un pas sur le côté pour s'éloigner de la portée des chaînes. Si elle le pensait figé, elle constata que la pulpe des doigts de Soren continuait de se changer en métal avec une lenteur infinie. Visiblement, Alexein l'avait protégée d'un sort dont elle ne savait rien en ralentissant les mouvements de son ami – ses cellules ? Elle n'identifiait pas clairement la nature de leurs pouvoirs respectifs, le plus important restant qu'ils en avaient tous deux bel et bien un. Et que, comme elle le craignait, cela changeait la donne.

Kaedan était à proximité. Il ne pouvait pas avoir raté cette scène.

Elle se secoua la tête : ce n'était pas le moment de s'en formaliser.

— Merci..., murmura-t-elle, le souffle court, ignorant les battements de son propre palpitant qui faisait vibrer sa réaction aux ondes mécaniques.

La course du temps reprit. Aussi vite qu'elle s'était arrêtée, elle permit aux chaînes de Soren de se former pleinement et de fondre à toute vitesse jusqu'à la façade en pierre usée devant laquelle Hisae se trouvait encore quelques secondes auparavant.

— Alexein, pourquoi t'as fait ça ?!

— Arrête de m'appeler par mon prénom !

— Je m'en fous ! Il se passe quoi dans ta tête ? C'est évident qu'elle est pas de notre côté, elle va aller nous vendre aux flics ou même à l'Ordre à la première occasion !

Hisae déglutit, et glissa dans un geste coupable et inconscient une main sur sa veste, comme pour s'assurer que la plume donnée par Kaedan était toujours là.

— Elle aurait jamais dû se ramener comme ça avec elle ce soir, mais Ekoryn lui fait confiance, alors moi aussi, conclut Alexein.

— Tu me gonfles avec ta Ek–

— Je me fiche que vous me fassiez confiance ou non, les interrompit la jeune femme, les poings serrés. Je suis juste là pour ma sœur. Et je la laisserai pas tomber.

Était-ce la vérité, ou bien des paroles supposées amadouer Soren ? Elle n'en savait plus trop rien. Son esprit avait tant cogité, au cours d'une multitude de nuits et d'heures de cours – séchées ou non – qu'elle ne parvenait plus à démêler le vrai du faux. La sensation de sombrer, de glisser peu à peu au fond des abysses de la tourmente, alors que battre des bras et des jambes ne l'aiderait plus à remonter à la surface, était devenue comme une seconde peau sur la première.

Peut-être pensait-elle ces paroles plus qu'elle n'en avait conscience. Désormais, elle ne la laisserait pas tomber. Pour rien au monde.

Ils n'eurent ni l'un ni l'autre le temps de rétorquer quoi que ce soit, que l'air commença à vibrer autour d'elle. Ses sens en alerte, Hisae fit brusquement volte-face, pour se tourner en direction de la ruelle qu'avait empruntée sa cadette peu de temps auparavant. Avec rapidité, sa silhouette traversa l'obscurité pour leur apparaître de nouveau, et ce fut un visage aux traits crispés et aux sourcils froncés que les faibles rayons lunaires éclairèrent.

L'écho de la nuitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant