Chapitre 29 - Le mur s'effondre

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Lorsqu'elle avait demandé à Kaedan s'il était possible de se voir, en dépit de l'heure plus qu'avancée de la nuit, Hisae ne s'était pas inquiétée des formalités. C'était lorsqu'il lui avait indiqué être au pied de l'immeuble devant lequel il l'avait déposée deux jours auparavant que les rouages de la situation s'étaient assemblés dans son esprit. Aliska était finalement parvenue à trouver un semblant de répit, et si ses paupières étaient closes – depuis quelques courtes minutes seulement – la fièvre semblait continuer de se propager à travers ses membres.

— Je veux pas paraître impoli, surtout que j'ai aucune idée de comment l'aider, mais t'es sûr que Rughis était notre seule option ?

Assis sur l'une des chaises du salon, ses prunelles violacées vissées dans les siennes, Alexein considéra longuement l'étudiante qui s'apprêtait à ouvrir la porte de l'appartement. S'il les avait rejointes au cours de la soirée, après avoir appris d'Aliska la vérité sur ce qu'il s'était passé, il était tout aussi impuissant qu'elle. Au fond de lui, le jeune homme le savait ; il leur serait difficile d'agir en toute liberté. Et s'il se raccrochait à l'espoir que cet état grippal, quand bien même il n'ait rien de naturel, finirait par passer, il devait bien avouer n'y croire qu'à moitié.

— Je sais pas si c'était la seule option, mais c'était sûrement la meilleure, finit par conclure Hisae dans un chuchotement, pour ne pas réveiller sa sœur. Ou en tout cas, la moins pire...

Alexein n'arqua qu'un sourcil pour toute réponse, alors que son interlocutrice ouvrait la porte pour y passer une tête, et ainsi interpeller Kaedan. Le silence qui pesait sur le couloir parut s'écraser sur l'appartement, aussi lourd que la situation face à laquelle ils étaient tous deux démunis.

Lorsqu'il aperçut la silhouette de Kaedan à travers l'embrasure il le vit entrouvrir les lèvres, mais les ferma quand Hisae lui mima de ne pas faire de bruit.

Ce fut sans gêne apparente qu'il analysa les dix-huit mètres carrés de la pièce principale, avant que son regard mordoré ne se porte avec insistance sur Alexein, sur le pansement qui lui prenait une partie de la joue, puis sur la chevelure brune d'Aliska qui dépassait des épaisses couvertures depuis le canapé-lit.

Hisae aurait pu regretter de l'avoir fait venir ici, surtout au beau milieu de la nuit. Elle aurait pu s'agacer du regard scrutateur qu'il posait sur son mobilier, se formaliser du fait qu'il lui ait fallu s'avancer avant de se déchausser ; mais rien. L'inquiétude ressentie vis-à-vis de sa cadette l'emporta sur le prisme de ses émotions, si bien qu'elle ne laissa pas échapper le moindre mot.

— Elle dort depuis longtemps ? s'enquit Kaedan dans un murmure qui se voulait discret.

Du coin de l'œil, Hisae aperçut les prunelles d'Alexein s'assombrir d'un voile de ressentiment non dissimulé. Il n'aimait pas la situation telle qu'elle se présentait à eux. Et de toute évidence, le fait même de devoir se reposer sur Kaedan Rughis de la sorte, là où ils étaient eux-mêmes impuissants, ne lui plaisait pas le moins du monde.

— J'en sais rien, ça doit faire un quart d'heure, répondit Hisae dans le même murmure. Sa fièvre est encore très élevée.

— Comment est-ce que vous pouvez être sûrs que c'est à cause des types de la nuit dernière ?

La question siffla dans l'air pour laisser le silence s'écraser avec force sur leurs épaules. Kaedan en profita pour s'avancer jusqu'à l'espace salon, rapidement imité par la jeune femme encore réveillée qui approcha à son tour dans une déglutition.

— Au début c'était qu'une supposition de sa part. Mais... Dans la soirée, les marques ont commencé à apparaître sur sa main, expliqua Hisae en relevant avec discrétion la couverture pour dévoiler ladite main.

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⏰ Dernière mise à jour : Sep 09, 2023 ⏰

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