Chapitre 8 - partie 2

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Son regard se perd dans le mur devant nous alors qu'il vide son sac :

— Des amis se sont retrouvés séparés, des couples brisés, des enfants ont perdu un parent, voire les deux... Des familles entières déchirées, depuis des millénaires. Et n'ayant d'autre choix que de vivre avec ce désespoir constant.

— Comment ça ? me troublé-je.

— Les démons ont vécu sur Terre durant plusieurs siècles avant de se retrouver enfermés. Il y a forcément eu des métissages entre les espèces, or les Enfers ont été créés en fonction de leurs planètes d'origine et du peuple auquel ils appartenaient au départ. Les enfants nés de ces unions mixtes se sont retrouvés placés dans l'un des mondes prisons, en fonction de la caractéristique qui ressortait le plus chez eux.

J'ai soudain la vision d'un bébé licorne-sirène appelant sa maman à grand cris.

Nooon ! C'est trop triste !

— On doit les sortir de là ! me révolté-je. C'est d'une injustice sans nom !

Aaron pousse un long soupir, l'air grave.

— J'aurais aimé que les choses soient aussi simples. Mais ça complique tout, au contraire. J'ai beau en vouloir à Freja de nous avoir caché une information aussi capitale... Après avoir retourné la situation sous tous les angles, cette nouvelle donnée ne fait que me confirmer que l'Imperium doit être relâché dans la serrure.

Gné ? Il a fumé la moquette ou bien ?

— Ils souffrent depuis des millénaires et tu voudrais leur en remettre une couche ?! me scandalisé-je.

— Justement ! s'exclame-t-il. Le problème de la dangerosité des démons se pose toujours et plus que jamais, car si la bulle de sérénité dont on nous avait tant vendu les mérites n'a jamais existé ça signifie qu'ils ont conscience de tout depuis le début. À quel point le fait de vivre éternellement en lieu clos, sans aucune perspective d'avenir, a pu les impacter ? Dans quel état vont-ils nous revenir ?

— On s'en fout ! Ils ne méritent pas de vivre cette vie-là ! Emprisonnés, figés dans le temps depuis si longtemps... Si nous avons le pouvoir de les en libérer, alors on doit le faire.

— Demande-toi une chose, Kali. Est ce que tu arriveras à te regarder en face si tu décides de ne pas relâcher l'Imperium et qu'en conséquence des monstres aliénés par des millénaires de captivité arpentent le monde, tuant des Êtres-humains par centaine ? Est-ce que tu réussiras à te le pardonner, si ta famille, tes amis, les personnes que tu chéries le plus se retrouvent sous les crocs de bêtes assoiffées de sang et de vengeance ? Que crois-tu qu'il se passera quand la serrure se brisera et qu'il ne leur restera plus en tête que l'idée de nous rendre la monnaie de notre pièce après ce qu'on leur a fait subir ? La folie pourrait pousser les plus pacifiques d'entre eux à détruire tout sur leur passage. Or, si tu en libères un, tu les libères tous !

— Mais on n'en sait rien ! Peut-être qu'ils se sont acclimatés et sont parvenus à trouver un équilibre ?

— Tu l'as dit, on n'en sait rien. Les risques encourus sont bien trop grands. La raison d'être de mon peuple a toujours été de protéger les humains des menaces extérieures pesant sur eux. Laisser les portes s'ouvrir reviendrait à les condamner purement et simplement.

— Et bien peut-être qu'ils l'ont mérité, ces abrutis !

— Kali... Tu fais partie des abrutis en question — Hey ! —, Enzo et Margarita aussi. Tout comme ta parente qui nous offre actuellement le gite et pour qui tu sembles avoir tant d'affection.

Deka Kerberos - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant