Deka Kerberos - Tome 2

Chapitre 21

« Vous venez de flinguer un hélicoptère avec une voiture ! »
« J'avais plus de balles... » 

(Die Hard 4)

— Va te positionner devant le mur du fond, dos à la porte, me crie la voix de Trou d'Hulk à travers la cloison.

Ah ! C'est l'heure du repas !

Houra !

Mon ventre crie famine depuis des lustres. Depuis ce matin, en fait.

On m'a privée de déjeuner après que je me sois amusée une fois de trop à cogner mon serveur avec la vaisselle du service d'étage. Enfin, du service de cave.

J'obéis, bon gré, mal gré. Je reprendrais les armes plus tard, quand je n'aurais plus le ventre vide.

— C'est bon ! beuglé-je, joyeusement.

Il ne se passe rien durant trente secondes — j'imagine que mon geôlier s'assure que j'ai bien respecté ses instructions en lorgnant à travers le judas qu'il a percé le matin-même.

La clé tourne enfin dans la serrure et je lance un coup d'œil par-dessus mon épaule.

Au moment où Trou d'Hulk s'approche pour aller déposer le plateau sur la table de nuit, un bruit de cavalcade se fait entendre dans le couloir.

La scène qui suit est surréaliste...

Je vois mon sac paresseux débouler comme une fusée dans la pièce, franchissant le seuil dans un dérapage pas vraiment contrôlé.

Je cligne des yeux par trois fois, en plein bug.

Il est vivant ! C'est un miracle !

Puis, mon cerveau capte enfin qu'une autre boule de poils est attachée à la première...

Un pelage doré, des favoris, un visage noir...

— King Kong ! m'exclamé-je, sans en croire mes yeux.

Le singe porte mon sac peluche sur le dos — c'est beaucoup plus logique dans ce sens-là —, et vu la gueule amochée de mon paresseux, il n'a pas dû pouvoir s'empêcher de lui foutre quelques baignes durant le transport.

Je suis tellement heureuse de le revoir que je ne lui en tiens pas rigueur.

À partir de là, les événements s'enchaînent autour de moi sans que je n'aie vraiment le temps de m'arrêter dessus : Tête de poulpe surgit à son tour dans la pièce et se jette sur King Kong ; ce dernier parvient à l'esquiver grâce à ses talents de ninja furieux et, croisant Trou d'Hulk sur sa route, s'en sert comme d'un tremplin pour m'atteindre.

Je le réceptionne bras ouverts, trop contente de cette divine apparition.

Le petit primate surexcité ne perd pas de temps pour se délester de son bagage. J'en jubile d'avance lorsqu'en le tâtant, je prends conscience qu'il est toujours rempli de mes effets — mon paresseux, pas King Kong...

Ouiiiiiiii ! Je vais retrouver ma Méduuuuuuuuuse !

Mon acclamation mentale se stoppe bien trop vite lorsque je sens soudain une résistance malvenue opérer sur ma prise.

Le géant des mers est en train de tirer sur l'une des lanières comme un fou ! Je force dans le sens inverse.

— Lâche-ça ! Espèce de gros caca ! l'insulté-je en montrant les dents.

King Kong en fait autant à côté de moi avant de se jeter sur sa figure, tel un bébé alien.

J'applaudis la manœuvre. Mais, mon extase ne dure pas car les coutures finissent par lâcher à force d'être aussi malmenées.