Chapitre 17

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« Un suspect vaut-il moins qu'un lèche-cul ? »


Affalée sur ma chaise, le ventre gonflé de mon petit déjeuner, j'observe pensivement la vue paradisiaque qui s'offre à moi depuis ma fenêtre de chambre. Entendez par là trois palmiers et des buissons fleuris...

La villa n'a pas d'étage, je me trouve donc au rez-de chaussée. De ce côté du bâtiment, la vue n'est pas aussi dégagée que je le souhaiterais, mais ça reste bien plus charmant que le local à poubelles sur lequel donne mon appartement.

Je tiens dans mes mains la lettre d'amour que m'a laissé Voldemort la veille.

Après avoir dûment pesé les pour et les contre, je ne sais toujours pas quoi en faire.

Au départ, je m'étais dit qu'en parler à la Vipéris serait une mauvaise idée car, connaissant son manque cruel de discernement — n'est pas Sherlock Holmes qui veut —, Owen se verrait aussitôt offrir un aller sans retour pour la case prison. Et je reste persuadée qu'il est trop suspect pour être coupable.

Mais, à la réflexion, serait-ce si fâcheux comme scénario ? Si j'en avise l'Effreyable, et qu'elle s'occupe de son cas, elle s'imaginera peut-être que toute menace est écartée... Et sera plus disposée à libérer Ronron et Liam.

Cela laisserait le champ libre au vrai Voldemort, certes, mais d'un autre côté, je serais probablement moins surveillée aussi, donc plus à même de lui filer entre les doigts pour aller secourir mon Petit Cul... Dans le cas où Freja se montrerait toujours aussi hermétique à l'idée de remettre son incarcération en question après l'arrestation d'Owen-Australie.

Le problème, c'est que j'ignore de combien de temps je dispose avant que cette « main tendue » si bien vendue par le renégat intervienne.

Que peut-il bien prévoir ? Une évasion en hélicoptère ? Un assaut de l'île en mode pirate ? Compte-t-il faire de nouveau appel à son agent double pour m'approcher en douce ?

Je n'oublie pas non plus qu'il m'a dit avoir les moyens de me rendre ce qu'on m'a volé. Faisait-il référence à mon sac paresseux ? Ou bien à ma liberté ?

À moins que ce ne soit de Ronron dont il est question ?

Ma curiosité est plus que piquée, on ne peut pas enlever ça à Voldemort.

Alors, que faire ?

Jouer le jeu du diable ? Ou celui de ses semblables en avertissant l'Effreyable ? Tout en sachant que je n'ai aucune chance de quitter l'île sans aide extérieure...

TOC, TOC.

Je retire mes pieds de la table et me lève en vitesse pour aller planquer la lettre sous mon oreiller.

Une fois assurée que l'objet du crime est bien camouflé, je me dépêche d'aller ouvrir à mon visiteur matinal.

Je suis surprise de voir Yori-Japon se présenter dans l'encadrement de la porte.

— Bah dis donc, c'est un vrai défilé en ce moment, l'accueillé-je en fronçant le nez.

Il m'observe, perplexe.

— Aby, il y a trois jours, Owen, hier, et toi, aujourd'hui, énuméré-je sur mes doigts. Sans oublier Bao, qui m'a fait l'honneur de sa présence le jour de ma sortie du coma. Vous vous êtes passé le mot ?

Le tonton protecteur de Zina semble enfin saisir où je veux en venir.

— La Syndesi approche et on doit s'assurer que tu seras en sécurité le jour J. Il nous reste beaucoup à préparer pour faire en sorte que tout se déroule dans les meilleures conditions. Le problème c'est que nous n'avons toujours pas de preuve concrète de l'identité du renégat...

Deka Kerberos - Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant