Chapitre 11

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Bon. Il semblerait que j'ai trouvé le compte instagram de mon ennemi du moment, Voiceless. C'est à la fois étrange et très marrant.

Déjà, il est beaucoup plus stupide que je ne le pensais. Il prend sans arrêt des photos d'endroits qui sont sûrement à deux pas de chez lui, alors je pense que je vais vite trouver où il habite. Mais il y a pire ! Il a vingt-deux abonnés pour cinquante-sept abonnements. Pitoyable.

Le comble, c'est qu'il a marqué son nom sur son profil. Il s'appelle Edern Luxard. En tant que personne ayant un deuxième prénom, je suis donc supérieur à lui.



Je regarde les photos prises par Voiceless/Edern. En tant que personne ayant grandi à Melpomène, je reconnais à peu près tous ces paysages. Le lac d'Auberney, le vieux manoir, l'observatoire... tout ça m'est familier.

Je jette un coup d'œil aux abonnements d'Edern. Tiens, il est abonné à la fille de la salle de sport. Et à national geographic. Et à mon cousin.

Quoi ? Pourquoi il est abonné à lui ? Et pourquoi je ne savais pas qu'il avait un compte Instagram ?

Je clique immédiatement sur le compte d'Aristide, avant de me saisir de mon téléphone.


Moi : Tu connais Instagram ?

Aristide : ???

Aristide : bah oui

Moi : oh

Moi : c'est à dire ?

Aristide : c'est à dire quoi ?

Moi : tu as un compte Instagram ?

Aristide : oui


Je lève les yeux au ciel. Pourquoi je n'étais pas au courant ? Aristide est en train de mettre ses informations personnelles partout sur le web ! C'est irresponsable !

Je pause mon téléphone et commence à faire les cents pas. Et puis sans crier gard, le son qui me hante depuis quelques temps revient. Je me recroqueville. Il est encore plus fort que d'habitude, de quoi faire exploser ma cervelle. C'est comme si on balançait une massue énorme dans ma tête et que tout le monde en riait. Quoique, cette dernière partie n'est qu'un ressenti personnel.

Je me relève après m'être rendu compte que je suis allongé par terre. Il est 20h35. Déjà ?

Mon ventre gronde. J'attrape une tomate et retourne sur mon ordinateur.

Voiceless - enfin non, Edern - a posté plusieurs images de ce que je suppose être l'intérieur de sa maison. Après quelques minutes d'observation, je vais sur Google maps et tape rue Max Gaines.
Avec le bon angle et un peu de chance, on peut réussir à apercevoir une partie de l'intérieur des maisons, et c'est ce que je compte faire.

20h42. Je crois que j'ai trouvé quelque chose.

Sur une de ces photos, on peut voir un bout de rideau pâle. Et des rideaux très similaires sont visibles derrière une des maisons, bien que très pixelisés.

Je ris mentalement. Je sais où il habite !



Aujourd'hui, c'est le 31 décembre 2022, la saint Sylvestre. Il est 12h34. Je suis devant la maison des ou du Luxard, dans mon merveilleux et incroyable costume. Et je vais bientôt aller péter la figure de Voiceless.

Bientôt.

...

C'est vrai, je suis un peu anxieux. À tout moment, le son bizarre pourrait revenir et Edern arriverait facilement me mettre KO ! Ce serait terrible.

Je serre les mains. Elles sont moites.

Profonde inspiration. J'avance de quelques pas. Tout va bien se passer, tout va bien se passer.

Et puis, je ne peux pas me dégonfler maintenant. Il faut que j'y aille !

Je me dirige vers la maison, en profitant de mes dernières secondes de liberté.

La sonnette est à portée de main, désormais. Mais je ne m'en servirais pas.

Je traverse la porte d'entrée comme un fantôme.

Mince. La maison est vide, j'ai l'impression. J'aurais du y penser ! Voiceless doit être en train de se battre je ne sais où, à l'heure qu'il est.

Je jure puis fait le tour de la barraque. À la fin, je constate deux choses : déjà, je suis vraiment le seul ici, et aussi, Edern gère beaucoup mieux son argent que moi.

C'est là que quelque chose attire mon attention, sur la cuisine. Un briquet.

Mais est-ce que je peux...

Bien sûr que je peux ! Je suis un super-vilain, bordel !



Des flammes, des flammes partout. Et de la fumée, aussi. Enfin, je crois, parce que mon intangibilité m'empêche de sentir quoi que ce soit.

Je baille. Je viens de mettre feu a l'entièreté de la maison de ce cher petit Voiceless, et je regarde les murs brûler. C'est étrangement apaisant. La seule chose qui me manque, c'est du café et des tomates à avaler.

Je m'étire, et j'entends la porte s'ouvrir. Oups. Je me relève et part dans l'autre sens en courant.



Je me réveille une boule au ventre. Ça fait deux jours que j'ai mis le feu à la maison de Voiceless, et je ne sais pas si ça me rend heureux ou pas. Je suis quand même allé au travail hier, mais je ne pense pas y arriver aujourd'hui.

J'allume mon téléphone. Mince, j'ai deux appels manqués. Je me dépêche de rappeler mon interlocuteur.

Un, deux, trois bip... c'est bon, il est là !

-Allô ? je demande.

-Je me demandais quand tu décraucherais !

-Oh, Aristide. Ça va ?

-Hum hum. C'était pour te parler d'une décision en rapport avec la maison...

-Votre maison. Elle est à toi et papy, hein.

-Oui mais vu que tu paye le loyer, ça te regarde quand même.

Je grogne intérieurement. Je n'ai jamais considérer cette maison comme la mienne.

-Si tu le dis... du coup, c'est quoi le problème ?

-J'ai proposé à un ami de venir vivre chez nous. Sa maison à brûlé il y a quelques jours alors il a pas d'autre solution...

Oh non...

-C'est quoi, le nom de cet ami ?

-Edern Luxard. Il vivait rue Max Gaines. Je crois qu'il est pote avec la fille qui gère la salle de sport, alors tu le connais peut-être.

Je hoche la tête, ce qui ne sert à rien puisque Aristide ne me voit pas.

-Eh, d'ailleurs, tu pourrais passer à la maison un de ces jours ! Ça fait longtemps que grand père t'a pas vu.

Tant mieux...

-Ah, c'est vrai. Bon excuse moi, il faut que j'aille au travail.

-Mais il est quatorze heure...

-Bye bye !

Je raccroche avant de m'affaler sur mon lit, dépité.

Guide du super-vilain renommé [en pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant