Chapitre 15

412 47 85
                                    

Une semaine.

Une semaine que Kaveh l'évitait et qu'il ne l'avait qu'entraperçu chez lui. L'architecte continuait de nettoyer la maison et de faire la cuisine discrètement, mais il s'arrangeait toujours pour ne plus être là aux heures où Alhaitam ne travaillait plus.

Cette situation pesait sur les épaules du scribe. Il voulait avoir l'opportunité de s'expliquer et de parler avec Kaveh mais ce dernier ne lui en laissait pas l'occasion. Tighnari lui avait dit que la communication était la clé mais communiquer se faisait à deux, lui était seul. Il avait bien essayé de chercher le blond mais c'était comme si Kaveh avait déserté les endroits où Alhaitam pourrait le trouver. Seuls Cyno et Tighnari avaient de ses nouvelles. Apparemment, il n'allait pas mieux. Comme ça, ils étaient deux...

Tout cela lui rappelait leur grosse dispute durant leurs études. Ils n'avaient pas les mêmes idées concernant leur sujet et avaient fini par tout laisser tomber. Résultat : Kaveh avait fui Dieu sait où et leur sujet avait tout de même récolté les faveurs de l'Akademiya. Il avait passé plusieurs années sans nouvelles de l'architecte, ne sachant que par les rumeurs, que sa réputation grimpait à mesure qu'il dessinait des plans aux quatre coins de Sumeru. Puis il était revenu comme une fleur, lui demandant l'asile, s'excusant de ne pas l'avoir recontacté plus tôt. Alhaitam l'avait accueilli, secrètement heureux de le revoir.

Aujourd'hui, il avait un mauvais pressentiment. Car il leur arrivait souvent de se disputer mais en général, tout passait par les mots durs et la colère, pas par un silence de plomb et l'ignorance. Le grisé se sentait trahi, coupable. Il savait que sa tristesse de la semaine était en train de se changer en rage. Il bouillonnait de l'intérieur face à ce silence insoutenable. C'était à peine s'il voyait Kaveh à présent. Comment en étaient-ils arrivés là ? Pourquoi le blond refusait-il de lui parler ?

— Monsieur, l'appela Rabah qui était assis en face de son bureau. Voulez-vous que nous reportions notre discussion à plus tard ?

Alhaitam revint à lui, observa l'homme pour voir que, derrière lui, se tenait une silhouette qu'il n'espérait plus revoir de sitôt. Son cœur se serra tandis qu'il se contenta de hocher la tête et de remercier Rabah.

Lorsque ce dernier fut parti, l'architecte s'avança vers son bureau. Alhaitam resta assis, croisa les bras et le toisa droit dans les yeux. Il ne voulait pas être celui qui lancerait la discussion. Si Kaveh était venu, c'était pour une bonne raison alors il attendrait qu'il parle.

— Comment vas-tu ? lui demanda le blond comme s'il avait cherché la meilleure phrase pour entamer le dialogue.

Il avait choisi l'une des pires aux yeux d'Alhaitam qui tenta de répondre le plus calmement possible sans pouvoir empêcher son ton d'être cassant.

— Il t'a fallu une semaine pour t'en préoccuper ?

Kaveh se passa une main dans la nuque, l'air gêné.

— Désolé, c'est que... (Il hésita, prit une respiration et poursuivit.) J'avais besoin de réfléchir.

Alhaitam ne répondit pas. Il avait imaginé ce moment toute la semaine, se demandant ce qu'il dirait, ce qu'il ferait, s'il devrait s'excuser ou demander des explications, peut-être les deux. Mais voilà qu'au moment venu, il restait sans voix, intrigué par ce que la présence de Kaveh signifiait. Il espérait une bonne nouvelle, sentait à l'air qu'affichait le blond et à sa nervosité apparente, qu'il n'en aurait pas. Et pourtant, il ne s'attendait pas à cette annonce :

— Je déménage Alhaitam. Je voulais te le dire en personne.

Ce qu'il ressentit à ce moment-là lui donna le tournis quelques instants. Son cœur battait la chamade, le faisait souffrir et son cerveau faisait défiler un tas de questions sans qu'il parvienne à laisser le moindre mot sortir de sa bouche. Pourquoi ? Kaveh n'avait même pas utilisé son surnom, comme si...comme si toute cette époque était révolue, comme si leur amitié prenait fin. Juste parce qu'il avait tenté de l'embrasser ? Parce qu'il avait suivi son coeur ?

Hocus Pocus (Alhaitam x Kaveh)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant