Chapitre 24

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Lorsqu'Alhaitam s'était réveillé le matin même, Kaveh n'était plus là. Une bonne odeur de café avait envahi la maison et sa tasse était posée sur le comptoir de la cuisine. Il avait souri, heureux de retrouver les habitudes de Kaveh et surtout les petites attentions qui lui étaient destinées.

À présent penché au-dessus de documents officiels qu'il devait trier, il se demandait où était son aîné. Il avait prévu de rencontrer des spécialistes pour les matériaux qu'il comptait utiliser, mais cela pouvait aussi bien se faire à l'Akademiya auprès de chercheurs, que dans la ville auprès d'artisans. Kaveh vadrouillait souvent à la recherche d'informations et d'inspirations. Puis, lorsqu'il en avait assez, il rentrait et couchait tout cela sur papier jusqu'à obtenir des plans qui lui conviennent. Son travail s'effectuait donc à la fois sur le terrain et chez lui. Il ne faisait pas deux fois la même chose, ne savait jamais de quoi le lendemain serait fait. Tout l'inverse du travail d'Alhaitam et de la vie qu'il avait décidé de mener.

Il se leva et alla consulter quelques archives, appréciant le calme que son bureau lui offrait. Il était rare que quelqu'un pénètre ici et quand c'était le cas, cela se faisait le plus discrètement possible, comme si la présence des livres tout autour d'eux, imposait le silence. Les seules interactions qu'Alhaitam avait, concernaient le travail. Une aubaine pour lui qui n'avait pas à subir de conversations futiles ou de tentatives désespérées de se rapprocher de lui.

Il trouva ce qu'il cherchait et retourna s'asseoir au moment-même où les rouages de l'ascenseur se faisaient entendre, preuve que quelqu'un était en train de monter. Alors le regard rivé sur le mécanisme, il attendit que les portes s'ouvrent afin de découvrir qui était le visiteur qui venait l'importuner.

-- Que fais-tu là ? Demanda-t-il en fronçant les sourcils lorsqu'il découvrit que c'était Kaveh.

L'architecte, une pochette sous le bras et Mehrak flottant derrière lui, approcha.

-- Je viens déposer mon projet. Les matériaux ont été validés.

Le scribe lui montra une pile de dossiers sur son bureau afin qu'il pose le sien par-dessus et se leva pour retourner voir les archives, ayant oublié l'information qu'il était venu chercher deux minutes plus tôt. Il avait d'habitude une excellente mémoire. Il s'était sûrement trop concentré sur la présence du blond.

-- Tu le soumets ce soir avant ton départ ? Lui demanda ce dernier après avoir déposé son dossier.

Alhaitam se contenta de grommeler en guise de réponse et revint vers lui avec un dossier d'archives dans les bras pour éviter de refaire un aller-retour. Il s'assit et observa Kaveh qui n'avait toujours pas bougé. Il avait rangé Mehrak et semblait nerveux.

-- Tout va bien se passer, le rassura le grisé. Tu as pratiquement réduit les coûts de moitié. Je ne sais d'ailleurs pas comment tu as réussi un tel exploit.

-- J'ai dû privilégier la qualité à l'esthétisme. Je me laisse trop souvent emballer sur les finitions.

-- C'est ce qui fait de toi un bon architecte, dit-il en se concentrant quelques instants sur son travail.

Il écrivit, posa son stylo pour rassembler les documents qu'il détenait avant de créer une nouvelle pochette et de les ranger à l'intérieur. Kaveh le regardait faire, comme si ce qu'il faisait était fascinant alors qu'il ne s'agissait que d'un simple travail d'archivage, rien de plus. Cela lui permettait néanmoins de détenir énormément d'informations sur tout ce qui se passait à Sumeru, ce qui s'avérait souvent utile.

-- Si tu veux rester, assieds-toi. Tu risquerais de prendre racine dans le sol et je n'ai pas envie d'avoir à supporter ta présence ici tous les jours.

Kaveh rit et prit place en face de lui, acceptant sa proposition.

– Ah, le bon vieux Alhaitam est de retour, lâcha-t-il en sortant son carnet ainsi qu'un crayon pour dessiner.

Le scribe sourit. Il est vrai qu'il perdait tout sens de l'humour et d'espièglerie dès lors qu'il franchissait les portes du foyer de Daena. Il restait sérieux, concentré, avec l'objectif de bien faire son travail. Il était comme ça. Même si être scribe n'avait rien de prestigieux ni de vital, il se vouait entièrement aux tâches qui lui incombaient.

Mais après cette remarque, tout cela était remis en question. Parce qu'il y avait Kaveh en face de lui, qu'ils étaient seuls et que l'envie de lui prouver le contraire était présente.

Il observa les lieux, évalua la distance qui les séparait tous les deux et pensa à quelque chose. Kaveh se faisait désirer, il aimait mettre ses atouts en valeur et plaire. Il aimait la séduction et ne pas répondre aux attentes du grisé semblait l'amuser. Alhaitam avait compris son petit jeu maintenant qu'il savait que l'architecte acceptait ses sentiments. Il n'avait cependant pas dit son dernier mot.

Ils étaient à l'Akademiya et le blond ne tenterait rien par peur que quelqu'un les surprenne. Alhaitam allait lui montrer ce qu'était la frustration et se venger de ce qu'il lui faisait subir depuis un certain temps.

Alors il tendit sa jambe à la recherche de celle de Kaveh. Lorsqu'il la rencontra enfin, il frotta son pied contre sa cheville, la caressant doucement tout en remontant progressivement vers son mollet. La réaction fut instantanée puisque le blond leva les yeux vers lui.

-- Arrête ça, lui dit-il avant de regarder autour d'eux.

Mais Alhaitam, qui avait les bras croisés et qui l'observait avec insistance, n'en fit rien et poursuivit son exploration. Il sentait la jambe de Kaveh contre sa botte, s'amusait de le voir aussi troublé par son comportement alors qu'il n'avait même pas essayé de se dérober. Il faut croire que ses mots allaient à l'encontre de ses envies et qu'il ne voulait pas réellement qu'il cesse de l'importuner.

Le pied d'Alhaitam remonta vers ses genoux, les écarta un peu et vint se frotter contre sa cuisse.

-- Tam', murmura Kaveh qui était devenu tout rouge et dont les yeux étaient écarquillés. Quelqu'un pourrait...

Il ne finit pas sa phrase. Alhaitam venait d'effleurer son intimité du bout du pied et Kaveh s'était tendu, les mains à plat sur la table.

Sa respiration devint plus bruyante lorsque le scribe recommença, un petit sourire sadique collé au visage. Il se délectait de cette situation et de l'expression de Kaveh. Son aîné venait de fermer les yeux et serrait les dents comme s'il tentait de contrôler son propre corps. Néanmoins, Alhaitam était sûr que son intimité était à présent bien réveillée. Si seulement ils n'étaient pas à l'Akademiya....

Les rouages de l'ascenseur s'activèrent tout à coup, faisant sursauter Kaveh et sourire Alhaitam. Ce dernier retira son pied et observa comment l'architecte reprenait son crayon pour faire comme s'il ne s'était rien passé. Il leva néanmoins la tête pour articuler quelques mots qui firent rire le scribe.

"Je te déteste."

Alhaitam savait que c'était loin d'être vrai. Il savait aussi qu'il avait réussi sa mission et que la présence de Rabah derrière les portes de l'ascenseur allait le rappeler à son travail.

-- Une réunion ? Le devança-t-il lorsque l'homme s'approcha d'eux, saluant Kaveh au passage.

Un hochement de tête lui confirma qu'il avait vu juste alors il se leva, prit quelques affaires et passa à côté de Kaveh sans pouvoir cacher son sourire. Lorsque Rabah tourna le dos, il se pencha vers l'oreille de l'architecte et lui dit :

-- Tu détestes qui ? L'homme qui t'a mis dans cet état ou celui qui est venu l'interrompre ?

Il ne lui laissa pas le temps de réagir et suivit le chercheur jusqu'à l'ascenseur, fier de son petit effet. Il aurait aimé voir l'expression de Kaveh et savoir si le blond aurait eu le cran de lui faire payer cet affront. Il était sûr qu'il allait se mettre à parler seul pour pester et l'insulter tout en essayant de se ressaisir.

Le scribe espérait que la réunion ne s'éternise pas trop. Il avait soudainement hâte de rentrer chez eux et de retrouver le blond. Qui sait ce qui lui passerait par la tête d'ici là et ce que l'architecte planifierait pour se venger.











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C'était l'avant dernier chapitre 🥲

Hocus Pocus (Alhaitam x Kaveh)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant