Six mois plus tard :
Cette matinée d'un dimanche de décembre était froide et nuageuse, comme toutes les autres, et je regardais par la fenêtre mon père tirer lamentablement sa charrue de bois pour emmener au village notre pauvre récolte que l'hiver nous avait donnée. Elle était essentiellement constituée de choux-fleurs, de patates douces et de poireaux.
Moi, je devais rester à l'intérieur, car mon père ne voulait pas que j'attrape froid ; il s'inquiétait beaucoup pour moi depuis que ma mère était morte d'une maladie grave il y avait maintenant deux ans et que mon frère avait mystérieusement disparu six mois plus tôt. De plus, nous savions nous deux que nous n'aurions pas assez d'argent pour aller voir un médecin. J'étais donc seul chez moi. Mon père s'était absenté pour la journée, et depuis que mon frère n'était plus là pour jouer avec moi, je n'avais rien à faire. Je n'avais pas d'animaux de compagnie, ils coûtaient trop cher, et nous n'avions pas de quoi les nourrir.
Au bout de plusieurs heures, je fus lassé de regarder le même paysage de neige et d'attendre mon père, je préférais sortir prendre l'air. C'est ce que je fis dès que l'idée de rester assis pendant encore des heures me fut impossible à supporter plus longtemps. Comme le froid était mordant à l'extérieur, je mis mon manteaux rouge fraise des champs, mon bonnet vert un peu trop petit pour moi et mes moufles abîmées de la même couleur que mon manteau avant d'ouvrir la porte et de sortir dehors. Je décidai d'aller me promener dans la grande forêt de sapins qui se situait à côté de la pauvre maison où j'habitais.
Sous les arbres, tout était tranquille, il n'y avait presque pas de bruit. Seule la neige qui tombait doucement par terre et un rouge-gorge qui chantait gaiement sur une branche d'un arbre sans feuille au-dessus de ma tête troublaient ce paysage qu'on aurait pu prendre pour un tableau. Au bout de chemin, se trouvait une grotte sombre dont l'entrée était recouverte par une fine couche de lierre, ce qui était étonnant en cette saison. Pensant qu'il ferait peut-être un peu plus chaud et moins venteux à l'intérieur, je partis l'explorer. La caverne était si sombre que je ne distinguais pas où je posais mes pieds. Je sentais juste la mousse sous mes pieds, signe que le terrain était très glissant. Je m'apprêtais à opérer un demi-tour pour revenir chez moi, mais, soudain, j'entendis une voix.
- Aidez-moi ! Je suis blessé et je ne peux pas bouger ! J'ai besoin d'aide !
Je regardais autour de moi. Il n'y avait personne ! La voix devait provenir d'en bas. Quelqu'un avait sûrement dû déraper sur une pierre mouillée et se faire mal en tombant. J'avançais petit à petit, regardant où je mettais les pieds. Ce ne serait pas une bonne idée de se casser quelque chose ici. Soudain, une lueur apparut devant moi. Étant plus curieux que jamais, je continuai mon exploration dans le trou qui n'était plus complètement noir. Je m'interrogeai sur l'apparition de la clarté soudaine. Qui avait-il en bas ? Je sentais la roche autour de moi qui devenait de plus en plus épaisse, c'était un peu comme si je pouvais ressentir ses émotions.
Je continuai mon chemin d'un pas un peu plus pressant, espérant voir le propriétaire de la voix derrière le virage, mais je fus vite déçu. À la place, se tenait une sorte de salle où je pouvais percevoir trois autres tunnels, qui, à première vue, semblaient tous identiques, mais, quand je regardais mieux, je vis une légère différence sur chacun. Juste à côté du passage de celui d'où je venais était gravé un petit symbole sur la pierre. C'était le dessin d'une roche. Quelle idée de dessiner une roche sur de la pierre sous terre ?
En regardant minutieusement les autres tunnels, je remarquai d'autres symboles du même genre. La gravure d'une goutte d'eau sur celui de droite, une petite flamme pour celui du milieu et trois petits traits sur celui de gauche. Je ne savais pas ce que cela représentait. La même voix que tout à l'heure venait du tunnel de gauche, je l'entendais plus distinctement, mais elle semblait changée. Elle n'était plus souffrante, comme tout à l'heure. Maintenant, elle paraissait plus grave, et plus sage :
- Bienvenue dans le Sanctuaire. Ici, tu apprendras à connaître tes alliés et tes ennemis, leurs points fort et leurs points faibles. Je te laisse aller par le tunnel de gauche, le tunnel de l'air. Bonne chance à toi !
Je restai interdit. Je ne comprenais pas ce qu'il se passait, j'étais perdu.
- Qui êtes-vous ? De quoi parlez-vous ? demandai-je d'une voix tremblante malgré la peur qui s'infiltrait en moi.
Mais la voix ne répondit pas. J'eus beau continuer à poser mes questions, je l'entendis plus. Au moins, elle m'avait communiqué une information sur le tunnel de gauche. Je savais désormais à quoi correspondait les trois petits traits qui se situaient juste devant. Au bout de plusieurs minutes d'attente dans la salle silencieuse, je me sentis contraint d'aller dans le tunnel à gauche, le premier tunnel que j'allais explorer, mis à part le mien.
Je m'en approchai à pas résolu, décidé à découvrir ce qu'il se trouvait derrière ce sombre tournant. À peine avais-je fait quelques pas dans le premier tunnel que je sentis mon corps se rapetisser, s'écraser sur lui-même, jusqu'à que j'aie l'impression que ma tête touche le sol. L'air présent dans le tunnel essayait de m'écraser, compris-je rapidement. C'était un phénomène surnaturel. Je voyais pourquoi la voix disait que ce tunnel était celui de l'air. Mais je tenais bon, usant toutes mes forces, je ne laissais pas me faire aplatir par cette chose invisible. De la sueur coulait le long de mon dos tant je peinais à tenir debout, mais j'y arrivai.
Je restais comme cela pendant une durée indéterminée, jusqu'à ce que la voix que j'avais entendue dans le tournant retentisse de nouveau à mes oreilles. Je comprenais à peine ce qu'elle disait :
- Mes félicitations, peu de personnes ont réussi à tenir debout pendant aussi longtemps que tu l'as fait. Tu as la permission de rentrer chez toi, mais reviens bientôt pour le prochain test, celui du feu. N'oublie pas non plus de réfléchir à ce que tu as appris dans cette expérience. Repose-toi
bien. Je ne répondis que par de vagues murmures, mais dès que revis la salle souterraine où les quatre couloirs se rejoignaient, j'eus un regain d'énergie et j'y courus. Une fois dedans, je me reposai un peu avant de remonter la pente raide, jusqu'à la lumière du jour et la fraîcheur de ce mois hivernal.
Quand je sortis, le soleil était dans la même position que quand j'étais entré dans la grotte, c'est-à-dire caché par les nuages et en dessous des arbres. L'heure n'avait donc visiblement pas changé. Je vis le même rouge-gorge et la neige était toujours aussi haute que tout à l'heure. Je pris donc mon temps pour revenir à mon pauvre chez moi, observant la nature.
Je fus renté à la maison aux alentours de midi, et je sentis la faim arriver. Mon estomac gargouilla quand je passai la porte de bois qui me semblait plus lourde que d'habitude. Mon père avait laissé une petite poire à moitié pourrie et une salade de tomates séchées, qui avaient sûrement dû être stocké dans le grenier depuis l'été dernier. J'avais de la chance, je ne mangeais pas souvent cela. Le repas fut délicieux, mais ce ne fut pas assez pour me rassasier totalement. N'ayant pas envie de poser de problèmes à mon père, je ne pris pas plus que la nourriture qu'il m'avait donnée, car chez nous, c'était quelque chose de très rare, bien que nous soyons des paysans. Pour oublier ma faim, je partis faire une petite sieste. Mon père serait peut-être revenu à mon réveil...
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Les quatre éléments
ParanormalMichael, Christine, Martin et Juliette ne vivent pas dans la même époque, mais ils ont un destin commun à accomplir... Ils doivent sauver le monde, que ce soit du passé ou du futur, car absolument tout sera impacté si l'esprit des ténèbres réussi à...