Chapitre 40 : L'étincelle dans les ténèbres

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Perceban se retrouva perdu dans la fente glacée de la citadelle et s'offrit à lui un unique couloir sombre. C'était une traînée de pavés noirs qui s'élançait d'un bout à l'autre de la cavité. Il ne reconnut rien, ni ne vit rien, si ce n'était la noirceur la plus obsédante qui soit, et il entreprit de déambuler aveugle dans ce dédale asphyxié. Il l'arpenta quelque peu, assaillit par l'obscurité et entravé par la moiteur de l'air. Il parvint à se morfondre en ce lieu déchu, prenant appui sur la froideur de la pierre afin de ne pas trébucher, et se faufila jusqu'à ce que la lumière de l'entrée ne s'étouffe complètement derrière lui.

Était entremêlée dans cette ténèbres pourrissante, la douloureuse présence du vide qui rôdait entre ces murs et dans lequel résonnait l'un après l'autre les échos des pas du mage. Un instant, il crut entendre la complainte d'une voix maudite jaillir hors du silence, et il tressaillit, mais incapable de l'élucider, il réalisa que c'était sûrement son esprit accablé qui lui jouait des tours. C'était de même pour sa vision, obstruée par la cécité de la brume qui dessinait des reflets fantomatiques et irréels, se dissipant une fois qu'il les balayait d'un revers de la main. Lorsque ses yeux commencèrent à s'habituer à l'obscurité, de faibles lueurs rosées se mirent à clignoter, et attirèrent son attention. Lorsqu'il entreprit de les pourchasser, elles lui révélèrent un court chemin entre les murs étriqués et c'est alors qu'elles s'embrasèrent, se transformant en de lugubres faisceaux cramoisi, ce qui provoqua chez lui un soubresaut. Alors qu'il longeait la voie, elle se mit à trembler, secouant la poussière nichée entre ses fentes qui s'abaissât comme un rideau de craie. Il crut divaguer alors il se cramponna, mais là encore, il ressentit une vive secousse qui fit frissonner tout le bâtiment.

Une symphonie sépulcrale se mit à raisonner dans son cœur. Il sentit le moindre de ses battements lui perforer la poitrine, une chaleur exténuante s'en prenant à ses os, et une froideur accablante lui déchirant les nerfs. Il se mit à chanceler, égratignant le bout de ses ongles à la moindre écorchure se trouvant dans les parois et une sueur maladive s'en prit à sa nuque. Une nouvelle fois, il entendit le silence se briser sous les fracas d'un murmure pernicieux, et il se tétanisa alors, les os figés et le regard écarquillé, étranglant son propre souffle pour tenter de résoudre les énigmatiques paroles qui lui parvenait. Mais rien, ce n'était que des mots sifflant dans l'oubli, tout comme le murmure du vent siffle dans les feuilles.

Il reprit sa marche, tentant d'ignorer les tourments que lui infligeait les regards endormis dans les parois, et se contenta de suivre la voie tracée par les torches à la froide lumière rouge. Le boyau s'écourta à son embout et apparut à son extrémité une balafre verticale de laquelle émanait une pénombre moins épaisse. Il emprunta l'antre tordu et se retrouva dans la pièce principale.

Ici, s'étendait une vaste salle enfermée entre les murs de marbre noir. Le mobilier y était fort raffinés, bien que tout entier dévoré par l'obscurité et, gisait sous une nappe d'ombre vaporeuse, un long et large tapis de velours pourpre qui s'étirait au loin. En parcourant la pièce, il discerna parfois se dresser par-dessus des tables les cornes d'un chandelier éteint, les angles crochus d'une nappe exténuée, ou bien encore les reflets d'un verre en cristal. Les murs étaient jonchés de visages ternis qui apparaissaient sur des vieux tableaux à la toile usée par le temps et par la poussière. Il ne put s'empêcher de penser que ce lieu était la réminiscence d'une splendeur passée, encore aujourd'hui hanté par un souvenir décrépit. Le bâtiment trembla à nouveau, faisant frémir les vieux couvert et l'ancien mobilier, mais également le parfond qui perdit quelques-unes de ses brindilles. Il s'avança, tentant de résister aux secousses, de plus en plus fréquente, qui empoisonnaient son équilibre.

Le fin fond de la pièce était tapissé d'un impressionnant et majestueux vitrail vêtu d'écarlate qui s'élevait jusqu'au plafond. Au travers de celui-ci, les éclats de la lune s'immisçaient et faisaient jaillir un faisceau de lumière gorgée de sang nimbant de rouge la sombre silhouette qui l'admirait. Elle se tenait au pied de la structure, se baignant dans ce halo maudit, immobile et accablée par l'air placide qui fanait le contour de ses épaules, et le regard ébahit par l'imposante nuit rougeoyante qui lui faisait face.

Les Fables Du Mana : Le cœur de la magieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant