Chapitre 29 : Le chant des sirènes

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Était-ce là la douceur des remous de la marée qui berçaient ainsi ses songes ? Ou bien était-ce dû à la fraîcheur revigorante de la brise qui lui caressait avec tant de délicatesse le visage ? Il n'en savait rien, à vrai dire, il n'en avait que faire. Ce qui importait, c'était qu'en cet instant, Perceban se sentait comme étant le plus heureux des hommes. Mais cela était-ce un rêve ? Ou bien la réalité ? Comment le savoir tant les deux se confondaient dans les vagues du vent et les souffles de la mer ? Il voulut en avoir le cœur net alors il se décida à ouvrir les yeux.

S'offrit alors à lui, des myriades de lanternes argentées qui émaillaient la toile sombre peinte dans le ciel. Il se redressa, sans pour autant abandonner les cajoleries que lui procurait le zéphyr, et assista au plus beau de tous les spectacles.

Seul, perdu au fin fond d'une luminescence obscure inconnue, il se retrouvait à la dérive sur une mer vêtue de nuit, s'élançant en silence sur des flots changeant, arborant parfois une robe écarlate et puis au remous suivant une écharpe d'améthystes.

Le ciel, quant à lui, s'était apprêté de son plus beau manteau étoilé, étendant son velours noir, pailleté de ses infinies constellations à la lueur froide, à perte de vue. La voûte céleste déversait son reflet tout entier dans le miroir de l'océan, ne formant ainsi plus qu'une seule entité, s'échangeant des caresses de lumières au travers des faisceaux des astres et des nébuleuses glacées.

Entre ces deux cieux sans horizon pour les départager, où temps et espace s'était dilués l'un dans l'autre, le jeune mage était suspendu sur une svelte embarcation, arpentant à la dérive une mer sans vagues qui s'écoulait dans ce flot onirique. Il se sentait si léger qu'il ne se levait pas entièrement, par crainte de s'envoler et de se perdre dans l'abysse du cosmos.

Il sentit le vent l'enlacer et étreindre ses doutes lorsqu'il souleva son bras au-dessus de son épaule, comme si tout le malheur de ce monde s'était évaporé. Une odeur de vanille ou de lavande lui chatouilla le cou et vint museler ses craintes. Derrière ses oreilles, la brise lui murmura quelques mots et alors il jeta un regard dans les remous d'azur qui s'agitaient à proximité du radeau.

Il y vit se former un courant de lames céruléennes qui sillonnait dans l'ombre des vagues. Une forme mince et immaculée se confondait avec l'enveloppe liquide et translucide qui franchissait par instant la surface de l'eau avant d'y disparaître à nouveau. Perceban resta émerveillé devant la grâce avec laquelle les mouvements si amples de la créature remuaient la marée et ses désirs. Il se précipita sur le bord du radeau et suivit du regard le sillage langoureux des hanches qui tournoyait autour de l'embarcation abandonnée. Elle vadrouilla encore un instant avec innocence avant de s'évanouir complètement sous le linceul cristallin. Il se précipita sur le rebord et s'y pencha, étirant son cou le plus possible, tentant d'élucider les mystères qui habitaient l'obscurité des tréfonds et de retrouver l'enivrante silhouette qui s'y baignait. Un instant ensuite où le silence de la nuit traversa ses soupçon, l'énigmatique créature surgit face à à lui, éclaboussant légèrement ses yeux éberluée.

— Bonjour, tinta sa voix d'une douce intonation parvenant comme une mélodie aux oreilles du mage.

— Bon... Bonjour, eu du mal à réagir Perceban, encore ébahit face à la magnifique créature qui lui faisait face.

— Cela faisait longtemps n'est ce pas ? Perceban...

— Longtemps ? Oui, longtemps, je dirais même très longtemps ! articula comme il le pouvait le mage qui sentait ressurgir en lui des souvenirs éparses qui lui traversaient le confins des pensées. Tu es... Tu es...

— Yyyl... commença à lui siffler la jeune femme tout en laissant se dessiner un léger sourire le long de son visage de porcelaine.

— Yleath ! se souvint alors Perceban dans un éclat qui avait perforé sa mémoire.

— Oui ! se réjouit-elle d'un fabuleux rire qui enjolivait encore plus ses traits. J'avais tant peur que tu m'aies oublié après tout ce temps.

— Non ! Bien sûr que non ! Comment pourrais-je t'oublier voyons ?

— Moi, jamais je ne t'ai oublié, lui murmura-t-elle d'une voix mielleuse et envoûtante.

— Ah... Oui ? se laissa apaisé Perceban dont le regard se clôt à moitié devant les paroles de la créature qui lui chatouillait les oreilles comme si c'était les douces caresses du vent.

— Bien sûr, acquiesça-t-elle en hochant innocemment la tête. Tu es tout pour moi mon beau et tendre voyageur. J'ai pensé à toi chaque instant qui séparait nos deux vies.

— Eh bien, je... Je... Je suis... balbutia Perceban qui ne pouvait finir ses phrases tant elles étaient entrecoupé de petits rires niées et impromptues qui contaminaient ses paroles.

Tandis qu'il continuait à se pencher et à se perdre dans le regard opalescent de cette créature au visage satin, elle déroba hors de l'eau ses longs bras pour les laisser s'écouler le long du cou du jeune mage.

— Si tu savais tout le temps que j'ai attendu pour te revoir... lui murmura-t-elle tout en approchant ses lèvres.

Les Fables Du Mana : Le cœur de la magieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant