Chapitre 41 : Fuir ou Périr

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Les chaînes ruisselaient le long du sol, préparant la chair à se faire déchirer, les os à se faire broyer. Un hurlement vénéneux et grinçant s'écoulait douloureusement du mécanisme et la danse stridente des scies, se heurtant presque les unes contre les autres, firent crisser l'écho. Exténués, affublés, anéantis, désespérés, voilà dans quel état se trouvait les cinq compagnons qui se débâtaient pour leur vie face à l'étau de chaîne qui égorgeait leur lutte. Les voilà proche, très proche, trop proche, de leur sépulcre acéré. On y voyait déjà apparaître la lueur froide de la mort qui brûlait au cœur de cet amas de lames. Rugissaient les flammes dévorantes, grinçait le fil des scies. La mâchoire d'acier allait les engloutir et se refermer à tout jamais. Du moins, c'est ce qu'ils pensèrent tous avant que Rakhan ne dégaine une ultime fois son morneclock, braquant son canon tout droit face à lui, et se concentrant de tout son être pour viser. Malgré la panique oppressante, sa respiration se figea, son sang se glaça, son poignet se pétrifia. Ne résidait dans le creux de son oreille, que l'écho battant de son cœur et du silence sourd des cris à l'agonie. Lorsque l'antre des enfers se dévoila, tout proche du canon, ce dernier fit jaillir un trait de fumée noire qui vint asperger le métal et y loger une unique balle de plomb. Elle traversa les flammes, puis l'acier, puis le cœur en fusion et... Le temps se suspendit... Jusqu'à ce que l'organe synthétique ne se contracte, déversant un glaçant cri métallique avant d'imploser, faisant voler en éclats le ventre du démon et propulsant les compagnons aux quatre coins de la pièce dans un déluge fantasmagorique !

Le souffle entraîna avec lui nombre du matériel qui gisait là et la bête folle, à moitié en charpie, sombra dans une démence autodestructrice qui la poussa à saccager tout ce qu'il se trouvait autour d'elle. Elle frappait les murs avec sa tête, tournait et virait, dans un sens, puis dans un autre. Une souffrance sans commune mesure habitait ses rouages et ses nerfs en acier surchauffèrent au point que chacun de ses membres voltigea en confetti. Des étincelles dysfonctionnelles virevoltaient autour de sa folie et la valse démantibulée du Bélial le mena à s'écraser dans le trou qu'il avait lui-même creuser. L'immense tas de fer disparut à travers le grillage, s'effondrant contre les lourdes articulations des machines en dessous et elles se disloquèrent à leurs tours provoquant un raz-de-marée infernal qui se propagea aux étages plus bas. Le tourment contagieux se déversa dans tout le bâtiment, faisant trembler les murs, arrachant le sol et embrasant la bâtisse.

Rakhan, ayant à peine eu le temps de réaliser le carnage qu'il avait semé, se fit soulever par le col par Fulményx. Ce dernier l'envoya par-dessus son épaule et l'embarqua dans une course effrénée à travers le déluge. Sur l'autre épaule du géant, se trouvait Alexzandar, inconscient, et derrière eux, courrait comme un fou Eldwyn, les flammes aux trousses. Treynor était devant, ouvrant la marche et dégageant le passage des décombres qui s'y déversaient.

Le brasier cuisant se mit bientôt à gronder dans toute la baraque et la toiture se mit à flancher avant de pleuvoir à travers les étages. Plus le temps de courir, il fallait bondir ! Les aventuriers sautèrent de passages en passages, risquant leur vie à chaque saut tant les voie se fermaient une à une sous le poids de l'éboulement. On voyait des hordes d'elfes noirs grouiller dans toute la fourmilière, se perdant, se bloquant, se faisant écraser. Les plus valeureux se retournaient sur la compagnie, dégainant les armes pour un combat à l'orée de la destruction. Mais accablés par les secousses et la déterminions de leur cible, ils se faisaient mettre hors d'état de nuire en une baffe de Dornür ou un coup de lame de paladin. Ce fut néanmoins une perte précieuse de temps et tandis qu'on voyait les étages se faire ensevelir un à un sous les cadavres des machines, on dut se remettre à la dextérité de chacun pour survivre.

Arrivé sur l'une des passerelles restante, pendant maladroitement au-dessus du vide rougeoyant, Fulményx balança Alexzandar puis Rakhan qui vinrent s'écraser sur la rive d'en face. À cet instant, le capitaine des légions de fer se réveilla et constata le cataclysme rutilant qui éblouissait les environs. "C'est un rêve ? retentit-il en panique. Dites-moi que c'est un rêve !". "Non, c'est un cauchemar !", lui répondit Fulményx qui rejoint la plateforme d'un bond de géant. Avant que la passerelle ne s'effondre dans les abysses embrasés, Eldwyn et Treynor la chevauchèrent et atterrirent auprès des leurs avant de tous s'enfuir le plus vite possible !

Les Fables Du Mana : Le cœur de la magieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant