Chapitre 36 : La cave engloutie

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Comme cela fut prévu, la compagnie partit pour l'Ouest, où un chemin de rutilant galets réchauffés par le soleil leur traçaient une voie en direction des hauteurs. Il fallut trois jours de marches pour en arriver là et des monticules glissants et abrupts firent alors leur apparition dans cette partie-là de la région, se transformant petit à petit en des longues vagues rocheuses qui chevauchaient le parc aride. Parvenu à l'extrémité des contrées Ouest, ces charpentes surélevées devinrent des cornes de roches acérés qui s'entrelaçaient sur plusieurs kilomètres à la ronde. Si au départ, il était aisé de les escalader, cela devint une tâche insurmontable puisque les titans de pierre étaient devenus si immenses qu'ils comblaient le panorama. Alors on les longeait, admirant leurs proportions impossibles et se sentant écrasé devant leur accablante envergure. Des terres de cette allure, il n'en existait pas en Escalon. Ces monolithes couleurs cendre étaient si pointus et lisses qu'ils étaient tout bonnement impraticables, et ils surgissaient du sol par centaine pour s'approprier l'horizon, rendant la traversée houleuse et éreintante, mais bon sang, quelle vue imprenable !

On fit quelques haltes au cours des jours, afin de ne pas trop décourager les non-initiés. On en profitait pour se ravitailler et se reposer, faisant quelques siestes à l'ombre des piques et profitant de la respiration du vent qui flottait à l'orée de la forêt de roche. Lorsque le soir se dévêtit sous une obscurité plus profonde, on dressa un campement de fortune dans le creux d'un cercle de pentes. Lorsque la nuit tomba, la brise glacée vint remplacer les vents chauds du jour, et on dut se vêtir d'innombrables fourrures pour lutter contre le froid déchirant. Également, on fit apparaître un grand feu dont les colonnes de fumée dépassaient le toit du gouffre. Une lune, d'une taille terrifiante et d'une robe étincelante, vint projeter son éclat à la surface des piques. Une armada d'étoiles en argent surgit ensuite, si proche les unes des autres que l'on aurait dit une nappe brillante allongée le long de l'horizon.

Aussitôt, le soleil grimpa dans les cieux du matin que la chaleur ardente refit son apparition, et il fallut ôter au plus vite les fourrures pour ne pas crouler sous le poids de la température. Les cascades de pierre étaient d'autant plus arroser par les assauts du soleil lorsqu'il atteint son firmament et c'est alors que la traversée devint bien plus rude. Les vastes lieux se mirent à onduler sous les brumes de la chaleur et si quelques fougères avaient pu être rencontrées sur le chemin, ici il n'y avait plus que de la végétations mortes et desséchées qui traînaient entre deux parcelles de terre ébranchées. Le zénith fit s'évaporer l'ardeur des voyageurs et on continua d'avancer la langue pendante sous le menton en suppliant que les terres arides ne nous épargnent de son courroux brûlant. Le nombre de haltes se multiplia afin que la troupe puisse se désaltérer, sans quoi leurs jambes fondaient au soleil et on épongeait sans cesse l'abondante sueur qui dégoulinait le long de son front.

Les étendues gercées se déversaient sans fin dans les confins de l'horizon et on se demanda bientôt comment on allait ressortir de cet étau solaire sans laisser sa dépouille asséchée derrière soit. On observait parfois se succéder dans le ciel des hordes de reptiles volant, arpentant les océans de nuages en quête de charognes à décarcasser. L'idée que l'un de ces rapaces à tête d'iguane puisse fondre sur lui afin de picorer sa chair, provoqua chez Thomast un froid dans le dos suffisant pour amoindrir l'accablante chaleur. 

Tout comme il s'était petit à petit dessiné dans le relief des monticules de roches, ici, des portions d'herbes commencèrent à pointer le bout de le nez. Elles étaient rares au départ et roussi par les affres du désert, mais bientôt un vert pelage s'écoula à la surface des pentes. Et puis un velouté de verdure, aussi mousseux que moelleux, vint engloutir les allées bossues de la région. Puis apparurent de lourdes et gigantesques excroissances végétales qui perforaient la terre et formant un amas de racines labyrinthique. Des têtes coiffées de grandes feuilles ébouriffées, suspendu à l'extrémité de long tronc à l'écorce écailleuse, jaillirent par-dessus le velours vert et pullulèrent bientôt sur tout le chemin amenant avec elles une atmosphère bien plus humide. 

Les Fables Du Mana : Le cœur de la magieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant