Chapitre 16 : Le perchoir des astres

15 1 0
                                    

Au lever du jour, une feuille d'arbre parfumé brulait sous le seuil de la porte. Sa fumée serpenta un instant dans l'air granuleux de la pièce puis se faufila dans les vieux naseaux broussailleux du mage gris. Celui-ci la renifla, fronça les sourcils car elle lui chatouillait les sinus puis il se releva d'un trait sec et paniqué !

- Bon sang ! S'écria t'il les yeux écarquillés comme si il venait de s'extirper d'un houleux cauchemar (et pourtant il s'agissait de bien pire).

Ce cri d'outre-tombe, si soudain, fit bondir les deux plus jeunes mages qui ne comprirent pas quel genre de furie vint les secouer. A peine leurs yeux ouverts qu'ils virent le vieux bouc se ruer sur le seuil de la porte où il extirpa la feuille.

- Que se passe-t-il ?! Scanda Thomast pétrifié dans le creux de d'une pile de livre.

Orax piétinât à mainte reprise la feuille jusqu'à ce qu'elle s'éteigne puis il la saisie entre ses doigts, l'observant de très près d'un œil avisé.

- Une enfumette ! Déclara-t-il d'un ton assuré.

- Vous avez reçu une enfumette ?! Mais, de qui ?!

- Feuille d'Adenium bleu, grains d'or et senteur prunier... Certifia Orax qui jetait son regard terrifié sur tout le contour de la plante.

- Adenium bleu ? S'exclama en premier Perceban ébouriffé.

- Senteur prunier... Continua Thomast qui comprit à son tour de qui cette enfumette venait.

Orax renifla à nouveau les restes de fumé qui se déversaient encore de la feuille, tout en sachant que la première fois qu'il la respira il avait très bien compris le message, et fut certains de ce qu'elle signifiait.

- Je...Je suis convoqué. Attesta Orax le regard éberlué.

- Où ça ?!

Orax renifla une dernière fois pour en être bien sûr:

- Au perchoir des astres... Affirma-t-il la mine affaissé.

Orax n'avait nullement besoin de se perdre à nouveau dans les infinis couloirs de la citadelle, il ne connaissait que trop bien l'emplacement du perchoir des astres. Il traversa les allées tête basse, les traits tiraillés et le pas lourd. Arrivé aux plus hauts étages, où tout était bien plus fleuri, lumineux et distingué, il traversa encore quelques allées avant d'atteindre le seuil d'une double porte arqué enjolivé de feuillage et sur laquelle étaient taillé en gravure dorée des cercles qui rappelaient la lunette d'un télescope. Il fut accueilli par l'œil de la porte, oui, l'œil. C'était un globe cristallin céruléen d'aspect presque liquide reposant dans un socle en verre miroitant. Il était niché dans le creux du mur à la gauche de porte. Orax se courba pour présenter sa triste mine à la pupille sévère qui se rétracta avant de réapparaitre laissant les portes s'ouvrir, donnant ainsi sur un long escalier en colimaçon qui gravissait la tour. Alors qu'il entreprit d'escalader les marches, une voix au loin le rattrapa.

- Orax ?! S'écria cette même voix bienveillante qui transperça l'amertume de la situation. Mon bon Orax ?!

- Arkheon ?! Réalisa alors le vieux mage gris qui reconnut immédiatement cette voix enraillé.

C'est alors qu'une figure familière (bien que vieillissante) se découvrit dans l'antre du couloir opposé. Il se mit à pianoté des pieds en direction de son vieil ami (malgré qu'il était fort encombré par son ample robe bien plus sophistiqué que celle du mage gris). Celui-ci était un mage, comme Orax, et vieux, comme Orax, et tout gris, comme Orax mais il était bien plus grand qu'Orax (celui-ci était déjà petit à l'origine mais les années ne l'ont pas épargné et avec ses vertèbres qui s'étaient entassées il avait perdu quelques centimètres). Les deux vieux amis se prirent dans les bras, ravis de se retrouver après ce qui fut de nombreuses années écoulées.

Les Fables Du Mana : Le cœur de la magieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant