Chapitre 42 : Retour

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La traversée retour s'étira sur de nombreuses semaines, semaines durant lesquelles la compagnie due se contenter de se nourrir des poissons pêchés en mer et de quelques volatiles qui sillonnaient le ciel. La mer leur fut plus clémente qu'à leur aller, le soleil voguait à leur côté le jour et les constellations d'étoiles leur traçaient le chemin la nuit. Bien sûr, elle ne fut pas de tout repos pour autant. Les caprices des océans étaient indomptables et il n'était pas rare qu'un orage éclate en pleine nuit pour faire sursauter les matelots hors de leurs songes. Et les voilà à courir et s'agiter sur tout le pont, hissant les voiles et tirant les cordes afin que leur vaisseau ne s'écroule pas en lambeau au fond des mers. Et le lendemain, ils se réveillaient, le visage couvert de sel et les narines emplies d'écumes. À mesure qu'ils approchaient du milieu des mers, les éclaircis se firent plus rare et les féroces tempêtes plus fréquentes. En plus de la fureur des eaux, ils devaient composer avec les jérémiades incessantes du prince de la nuit, retenu au fond de la cale, enchaîné, et qui dès l'or qu'on lui retirait son bâillon, crachait toute la perfidie de ses injures et provocations.

Mais il ne fallait rien lâcher ! Ce n'était pas le moment de flancher ! Voici là leur dernière étape avant leur triomphe. Braver les mers une ultime fois, transpercer les vagues déferlantes, fendre les éclaires qui balafraient les cieux. Plus ils avançaient et plus les nuits leur semblaient longues, lourdes, et rudes... Les étoiles s'éclipsaient derrière des voiles épais et sinueux, le vent hurlait et faisait vrombir les planches du navire, et les vagues le faisaient bondir avant de le faire s'écraser avec fracas. Puis, après des semaines de galère, à l'aube d'une nuit presque éteinte, une réjouissante vision leur apparut. Entre deux averses courroucées, ils aperçurent, au travers des brumes de l'orage, se dessiner des pentes sans fins sur lesquelles les nuages se culbutaient. Des lignes vertigineuses s'élançaient des mers et grimpaient au sommet des cieux. Ils contournèrent ces immenses pans rocheux et atterrirent au cœur d'un rivage cornu, surmonté d'une couronne de roches blanches et douces. Encore au-dessus, on pouvait deviner les infinies vallées vertes s'étirer sous un merveilleux ciel bleu. Enfin leur foyer leur était rendu !

Lorsqu'ils posèrent le pied sur la plage de sable fin, ce fut comme s'ils avaient retrouvé une sensation depuis longtemps oubliée. Un frisson parcourra l'entièreté de leur corps et lorsque les rayons radieux du soleil caressèrent leurs visages, une béatitude envahit leurs esprits. Les orcs ne purent les emmener plus loin, sous peine de se faire repérer et susciter une curiosité qui pourrait les incommoder, voir pire... Mais cela ne contraint nullement la compagnie. Ils le furent très reconnaissants de les avoirs ramenés jusqu'ici en prenant de tel risque. Après les avoirs déposés, ils repartirent, les saluant et les remerciant pour cette rencontre. Les aventuriers, eux, reprirent la route ! Ils grimpèrent le long des buttes et des monticules et reconnurent les sentiers Ouest d'Andoras. C'étaient des jours de marches qui s'offraient à eux alors ils ne perdirent plus la moindre minute. Cependant, sachant qu'ils allaient rencontrer de nouveau la populace Escalonienne, il était de bon ton de lui ôter de la vue la hideuse face de Rénathaël alors il la lui couvrir avec un sac de soie et ils l'obligèrent à avancer à leurs côtés.

On pourrait croire que cela serait une partie de plaisir de parcourir les plaines d'Andoras après toutes les difficultés bien pires qu'ils avaient dû surmonter. Et bien non ! Au contraire ! Exténués et accablés, ruisseler de forêts en forêts, de champs en champs et de sentiers en sentiers leur sciait d'autant plus les jambes ! Bien sûr, ils trouvaient bien, ici et là, quelques auberges dans lesquelles égarer son sommeil et réconforter son estomac, mais l'excitation de retrouver la ville leur tiraillaient l'esprit ! Toutefois, jour après jour, leur voyage s'écourtait et à chaque fois de nouveaux paysages familiers leur revenaient.

Bientôt, le délicieux parfum des prairies chatouilla de nouveaux leurs narines, le nectar du printemps ruissela le long de leurs épaules et le souvenir réconfortant du vent souffla dans leurs cheveux. Arrivés aux sommets d'une petite colline, ils virent s'étendre sans fin le crin fauve des plaines d'Andoras. Les brins d'herbes roux s'inclinèrent à leurs venues et un courant d'air chaud tissa un chemin pour eux le long de la vallée. Ils grimpèrent de butte en butte, excédés par la fatigue qui cognait leurs genoux, mais extasiés par la formidable vue de leur foyer retrouvé. De petits nuages de coton voguaient en silence dans les cieux tamisés et ruisselaient entre les hautes montagnes brunes qui s'élançaient le long de l'horizon.

Les Fables Du Mana : Le cœur de la magieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant