Chapitre 31

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Gabriel, Sauver ou périr.

Je sens le regard de Logan peser sur mon profil mais je persiste à l'ignorer. Ce n'est ni le lieu, ni le moment pour qu'il m'assène un énième serment. Le silence assourdissant dans le camion est rassurant et je m'en imprègne autant que possible. Le calme avant la tempête. Cet adage n'a jamais eu autant de sens qu'avant une intervention de cette envergure. Sur le papier, rien ne sera différent de ce que nous nous répétons à faire au centre d'entraînement de la caserne, pourtant, chacun des sapeurs-pompiers présents est sous tension car cette fois-ci, nous le savons, ce n'est pas un exercice.

Alors que notre camion s'immisce dans la rue devant le bâtiment en flamme, nous nous rendons vite compte que le temps d'aujourd'hui et cette pluie torrentielle qui s'abat sur nos têtes est une bénédiction, pourvu que le vent ne se lève pas ! Pour le moment, dame Nature est avec nous et ça fait du bien.

Après le coup de bip du Capitaine Leclerc, chef du centre d'incendie, nous avons tous répondu présent. Même ceux qui comme moi et mon meilleur ami, n'étaient pas d'astreinte. Nous sommes une équipe, des soldats du feu qui font front commun contre les éléments pour sauver des innocents. Vu l'ampleur, l'escadron complet ne sera pas de trop.

Sans plus tarder, sirène hurlante, Yves le conducteur du citerne se gare quelques mètres devant le magasin en instaurant une distance de sécurité. L'épicerie du quartier résidentiel est un véritable brasier et lèche dangereusement l'immeuble voisin. Le constat est alarmant : si celui-ci commence à prendre feu, les dégâts matériels et humains seront terribles. Le silence de mort qui pesait dans l'habitacle du véhicule cesse enfin lorsque notre Capitaine nous donne ses dernières instructions.

– Équipe une : couper le courant de la rue et localisez-moi le début du foyer afin d'arrêter le massacre. Équipe deux : sécuriser l'environnement et prodiguer les premiers soins aux victimes. Et enfin l'équipe trois, les cagoules, vous vérifiez tous les appartements et évacuez tous les ignorants encore présents. On fait ça vite et bien, je veux que tout le monde rentre à la maison sains et saufs. Au boulot !

Ma tenue de feu entièrement revêtu, je rejoins Charlyne, mon binôme, à l'extérieur du camion. D'un seul regard nous nous encrons l'un à l'autre et sans un mot, nous courrons à l'intérieur de l'immeuble dès que l'équipe une nous informe que la voie est libre. Top départ pour les cagoules.

L'immeuble comporte quatre étages, deux appartements par étage soit huit habitations à vérifier. Ce n'est pas énorme en soit mais notre matériel pesant plus de dix kilos nous empêche d'évoluer aussi fluidement qu'on le souhaiterait. A chaque porte, chaque étage, nous tambourinons aux battants informant l'intervention des pompiers et ordonnant l'évacuation immédiate des lieux.

Alertés par le bruit des sirènes, des saccades d'eau envoyées par les lances à incendie sur le bâtiment voisin ainsi que nos ordres stricts hurlés dans les couloirs, les habitants commencent gentiment à sortir de chez eux.

– Capitaine à l'équipe trois, j'entends au talkie-walkie, on vient de nous informer qu'une réserve de gaz serait logée derrière le magasin. Risque d'explosion.

– Équipe trois au Capitaine, nous évacuons le dernier étage.

Alors que je frappe et sonne à répétitions à la huitième et dernière porte, un vieux monsieur au regard hagard m'ouvre enfin.

– Monsieur, c'est les pompiers. Il faut évacuer les lieux immédiatement ! Veuillez nous suivre s'il vous plaît.

Son regard se perd derrière lui et je le vois commencer à paniquer. Je lui attrape les mains essayant d'ancrer ses pupilles aux siennes. Il murmure quelque chose que je n'arrive pas à comprendre avec le raffut dont l'immeuble fait face.

De tout mon Cœur 💖Où les histoires vivent. Découvrez maintenant