Chapitre 34 - Owen

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Neuf ans plus tôt

- Mais je m'en fou qu'il aime ce putain de jeu et qu'il fasse mumuse à passer le ballon au-dessus d'un filet. Il va continuer à jouer au basketball.

- Mon fils fera ce qu'il lui plaît, s'écrit ma mère.

- Notre fils aura une carrière dans le basket et je ne te laisserai pas le transformer en déception. Tu me pourris déjà assez la vie au quotidien.


Je suis caché derrière l'arche de la cuisine. Je sais exactement quand mon père me voit puisqsu'il pousse un juron et m'entraîne avec lui. La lourde balle de basketball retombe dans mes mains. Je n'aime pas ce sport, il n'est pas fait pour moi. Et pourtant, je fais tout pour m'améliorer et me pousser à l'aimer. Mais ça ne fonctionne pas, je le déteste encore plus à chaque instant. A chaque panier râté, à chaque dribble partant dans la mauvaise direction, j'ai envie d'appeler un bulldozer pour rayer le terrain dans notre jardin.

- Tu as un match demain et il est hors-de-question que tu le perdre. Pas de sortie cette semaine, pas de pause, pas de repos, tu dormiras quand tu seras mort. Et si tu oses perdre, tu sais ce que cela signifie, n'est-ce pas ?

- Oui père.


Il s'en prendra à ma mère et en plus de l'avoir déçu lui, je la décevrai elle. La défaite n'est pas envisageable, je dois faire ce qu'il me dit et devenir basketteur professionnel, obtenir la carrière qu'il n'a jamais eu à cause de ma naissance qui a stoppé toutes ses chances.

Le ballon apparaît une nouvelle fois devant mon visage et mon père se place devant le panier, le défendant et le rendant complètement inatteignable. Je ne suis pourtant pas petit, j'ai le physique d'un vrai basketteur selon mon géniteur. "Tu as tout d'un véritable basketteur donc tu vas lever ton cul et faire des efforts pour ne pas me décevoir". Il souffle dans le sifflet qu'il porte inlassablement autour du cou, me prenant au dépourvu. Contrairement à des adversaires, il ne se rue pas devant le panier adverse. Non, il se contente de me toiser et de faire rebondir le ballon, me poussant à attaquer pour le récupérer avant de dribbler maladroitement en direction du panier. Je suis loin d'être le joueur le plus talentueux et je le sais. Dès que je tente une action, mes pieds trébuchent sur les lignes. Qu'est-ce que c'est difficile de dribbler la balle sans la perdre...

Une heure, deux heures, trois heures, j'en perds le compte. Je ne sens plus mes muscles, ma respiration se fait saccader mais pas comme je l'aime lorsque je fais du volley-ball, ici j'ai l'impression que mes poumons vont sortir par ma bouche. Je suis pourtant déterminé à essayer, à m'améliorer, ce n'est pas comme si j'avais véritablement le choix. Je saute maladroitement pour tenter de bloquer les tirs de mon père mais il m'assène à chaque fois un coup d'épaule me faisant valdinguer jusqu'à l'autre bout du terrain.

A chaque tir, la balle manque de peu le panier ou revient vers moi après avoir frappé la planche avec une force démesurée. Les jurons et les regards menaçants de mon père me poussent à baisser la tête à chaque tentative râtée, me poussant une nouvelle fois dans l'embarras. Pourtant, je continue à essayer. Je cours maladroitement d'un bout du terrain à l'autre.

- Encore ! Relève-toi ! Tu te reposeras quand...m'hurle mon père tandis qu'il voit que je faiblis.

- Je... serai... mort...

- Tu n'es peut-être pas une erreur après tout...


C'est le dernier mot qu'il me dit en tout cas je le pense puisque je tombe dans les pommes. Lorsque je me réveille, je suis bordé de tous les côtés dans mon lit, avec une serviette humide posée sur le front. Ma maman est à mon chevet et presse une autre serviette sur mes avant-bras.

- Mon trésor, tu es réveillé. Comment te sens-tu ?

- Je suis désolé maman, je ne voulais pas m'évanouir.

- Je sais mon trésor, ce n'est pas grave.


Même pas quelques secondes de repos et le monstre est déjà en rendez-vous. En l'entendant monter les escaliers, elle se précipite en dehors de la pièce et ferme derrière la porte derrière elle. Une nouvelle dispute éclate.

Une larme solitaire coule sur ma joue et je me répète à voix haute ce que je me dis tous les jours :

- Je ne veux pas perdre, je ne veux pas être une déception. Je ne veux pas perdre, je ne veux pas être une déception. Je ne veux pas perdre, je ne veux pas être une déception. Je ne veux pas perdre, je ne veux pas être une déception. Je ne veux pas perdre, je ne veux pas être une déception. Je ne veux pas perdre, je ne veux pas être une déception.


Ce soir et comme tous les autres nuits de ma vie, mon père ne vient pas me voir. Et je me fais la promesse de ne jamais quitter mon objectif des yeux. 

Ace - Les otakus du volley-ballOù les histoires vivent. Découvrez maintenant