Chapitre 92 : Duel de chasseuses

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Essoufflée, Lorelya s'adossa à un mur en veillant à rester hors de vue de son adversaire. Les dents serrés, elle empoigna la flèche fichée dans son épaule et l'arracha. Contenant un cri de douleur, elle comprima le projectile pour l'analyser.

La flèche était de belle facture, digne de celles de son clan. Cependant, ce qui la dérangeait le plus, c'était la trajectoire qu'elle avait suivi. L'archère était certaine d'avoir éviter le tir, et pourtant elle avait été touchée, la flèche s'enfonçant dans sa chair dans un angle impossible. Elle sonda l'objet avec ses sens dryadiques, percevant les dernières traces d'une magie étrange.

La verdoyante jeta la flèche au sol et s'éloigna en gardant ses sens en alerte. Elle avait besoin de gagner du temps, son corps requérant encore un peu de temps pour guérir et lui rendre l'usage de son bras pour bander son arc. Lorelya s'enfonça dans les ruelles étroites de Syndras, cherchant à se mettre à couvert.

L'elfe savait exactement où se trouvait Rani, la végétation les entourant épiant ses moindres faits et gestes. L'alliée de Valence maintenait ses distances, veillant à ne pas trop s'approcher de Lorelya. La verdoyante tenta de nouveau à entraver les mouvements de son ennemie, mais elle fut trop vive et bondit sur le côté à temps, évitant les racines qui poussaient entre les tuiles du toit qu'elle parcourait. À peine ralentie, elle continua de traquer la verdoyante qui se lassait de ce petit jeu.

– Vraiment, je ne vous comprends pas, les humains ! cria l'elfe, sachant qu'elle ne pouvait pas trahir une position qui était déjà connue. Nous poursuivre jusqu'ici ne va pas aider votre Ordre, sans oublier que vous êtes déjà des criminels aux yeux du pays ! Vous venez de vous jeter dans la gueule du loup avec peu d'espoirs de fuite, et pourquoi ? Pour vous venger ?

– Pour vous faire payer l'affront que vous avez fait au Seigneur Valence ! répondit Rani avec du venin dans sa voix. Le retour de Raya aurait dû être le moment de gloire de mon maître, l'outil qui lui aurait servi la tête de l'église sur un plateau d'argent ! Mais au lieu de ça, vous vous êtes mêlés de ce qui ne vous regarde pas, ruinant ses projets !

La nature l'ayant mise en garde, Lorelya dévia sa course, laissant trois flèches fondre là où elle se serait tenue autrement. Contre toute attente, les projectiles dévièrent leur course, suivant les mouvements de la verdoyante qui grimaça. Un mur de ronces se dressa pour leur faire obstacle mais ne freinèrent pas leur vol. Les flèches le transpercèrent comme une feuille de papier et continuèrent de traquer l'elfe. Elle tourna au coin d'une ruelle et jura en elfique quand elle sentit que ses traqueuses traversaient les murs pour l'atteindre.

Comprenant qu'elle ne pourrait pas esquiver ou se protéger, Lorelya ressentit le bois des flèches. Elle ne pouvait pas dominer la magie qui dictait leur trajectoire, mais elle pouvait changer leur forme. Des branches poussèrent des projectiles, s'entortillant entre elles et s'enfonçant dans toutes les surfaces présentes pour arrêter leur course.

– Oh, pas mal ! siffla Rani en ramassant un morceau de tuile cassé. Tu as de la ressource. Mais tu n'es pas la seule...

Bondissant sur le côté pour éviter une nouvelle entrave végétale, Rani jeta le débris qu'elle tenait directement dans la direction de Lorelya, bien qu'un bâtiment se dressait entre elles. La verdoyante lâcha un cri de stupeur alors que ses espions lui annonçaient que le projectile se précipitait sur elle en ignorant tout ce qui se dressait devant lui et elle se jeta sur le côté. Une fois de plus, l'attaque de l'archère dévia sa course et vint perforer le ventre de l'elfe. Elle cracha de la sève et se roula en boule au sol en comprimant sa plaie. Se concentrant sur sa guérison de sa blessure la plus grave, Lorelya se força à se relever et tituber en avant.

– Tu aimes ma magie de traque ? Une spécialité de mon village de chasseurs. Dès que nous décidons d'une cible, elle ne peut plus nous échapper. Quoi qu'elle fasse, où qu'elle aille, nous pouvons toujours l'atteindre. Même si tu réussissais à me crever les yeux, je saurais toujours où tu es. Si tu te cachais de l'autre côté du monde, je ne perdrais pas ta trace. Même une forteresse sans ouverture ne représente pas plus un obstacle que l'air qui nous sépare. Et aussi...

Déicide - Tome 2 - Un espoir doréOù les histoires vivent. Découvrez maintenant