Late Night Talking [Larry]

Chapitre 1

C'est la troisième fois que je reçois une lettre de refus. Dans la journée. Voilà maintenant plus de deux mois que je cherche un travail, deux mois que j'enchaîne les refus. Pourtant j'ai postulé à tout ce que je pouvais trouver. Mais à chaque fois, les réponses sont les mêmes : pas assez d'expérience, trop d'expérience, trop petit, trop tatoué, trop masculin.

- Non mais mec, l'annonce c'était pour essayer de la lingerie fine ! Rit mon meilleur ami.
- Je vais finir sur le trottoir.
- Ne dramatise surtout pas hein.

Je pose ma tête contre le comptoir et remercie Liam lorsqu'il pose une tasse de thé devant moi.

- Tu vas finir par trouver, Lou'. Ou reconsidère ma proposition.
- Tu m'héberges déjà, hors de question de mettre tes finances le rouge.

Liam m'a proposé de m'embaucher en tant que serveur dans son bar. Mais je sais qu'il ne peut financièrement pas sortir un autre salaire. Non je dois trouver un emploi, payer mes factures et repartir dans la vie d'un bon pied.

J'avais tout pourtant. Un job de rêve. Un mec. Des amis. Tout. J'avais tout putain. Et il a fallu que tout vole en éclat en une heure. Seul Liam est resté. Depuis que nous sommes enfants, c'est mon meilleur ami.

Alors quand la vie a décidé de me voler tout ce que j'avais, c'est le seul qui m'a offert son épaule pour pleurer et son canapé pour dormir. C'était il y a six mois. S'en est suivi quatre mois de dépression sévère. Je ne me levais pas du canapé, je ne mangeais presque pas. Je passais mes journées à fumer et à boire, mais surtout à pleurer.

Puis un matin Liam en a eu marre. Il m'a littéralement traîné hors du canapé et a mis les « pendules à l'heure » comme il l'avait dit. En résumé, ça signifie me gueuler dessus pendant une heure et inviter mes soeurs. Ça, j'ai eu du mal à le lui pardonner. Elles n'avaient pas besoin de voir ça. La vie avait été assez dure pour elles. Imaginez le choc quand elles m'ont vu, en véritable loque, moi qui, pendant des années, suis resté le seul repère stable qu'elles avaient.

Alors c'est pour elles que, ce jour là, je me suis levé, je suis allé prendre une douche et j'ai commencé à regarder les petites annonces.

Depuis, chou blanc.

- Je me demande si je vais pas partir. Retourner à Doncaster.
- Dis pas des conneries, soupire Liam. Ta vie est à Londres. Avec moi.
- Mais Londres ne veut pas de moi.
- Plus drama-queen tu meurs.

Il finit par récupérer un journal qui traine sur une des tables et me le jette.

- Tiens, lis. Fais un truc. Parce que bientôt je te jure, tu vas déprimer toute ma clientèle.
- Tu veux que je lise un truc où des dizaines d'articles parlent de meurtres, viols, vols, harcèlement, violences conjugales...
- T'as oublié la revue nécrologie.

Je lui dresse mon majeur et commence à feuilleter la presse. Qu'est-ce que je disais...

- Un homme condamné à la prison ferme pour le meurtre de sa femme. Il l'aurait étranglée, violée, et tuée à l'arme blanche.
- Oui bon...
- Page trois... Une femme porte plainte contre son patron pour harcèlement moral.
- Louis...
- Page quatre... Ah ! Carambolage, trois blessés en urgence absolue.
- Passe à la page des petites annonces. Peut-être qu'il y a un truc qui t'intéressera.

Je soupire et tourne inlassablement les pages. Qui poste encore des offres d'emploi dans le journal ? Clairement ? Hormis les vieux qui cherchent un homme à tout faire... Remarque, ça pourrait être sympa. Je me fais embaucher par un vieux fortuné, il tombe sous mon charme et devient mon sugar daddy.