9 | Lys noir 📘

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Chère journal, j'aimerais avoir un chat, ou bien un chien, quelque chose de poilus et doux pour m'écouter quand je me sens seule.




Mara

Je continue à marcher en faisant semblant de regarder mon téléphone. Cet homme est une énigme, une très dangereuse énigme, je ne sais pas ce qu'il m'a fait, je me sens vulnérable, je sens que je n'ai pas le pouvoir, et ça, ça me dérange.

Pourquoi est-ce que je me sens comme ça quand il est tout proche ? L'impression de ne pas faire semblant, je déteste ça, je le déteste, pourtant, je le sais, je sais à quel point il veut jouer avec moi, rien n'est honnête chez lui, tout comme chez moi.

Qu'est-ce qu'il m'est passé dans la tête en faisant cette trêve ? Comme si j'en avais quelque chose à foutre qu'on se batte aujourd'hui. Ou alors, je sais. Je voulais être tranquille aujourd'hui, pour ce soir.

C'est ma danse, mon imagination, j'ai couché mon esprit sur mon carnet et il en est sortie une danse d'innocence. J'aime ça autant que j'aime respirer. Et je suis bonne aussi. Très bonne. J'ai consacré toutes mes pensées pour que cette danse soit parfaite, j'aime chorégraphier, j'aime perfectionner, raconter une histoire et la voir prendre vie. J'excelle dans cette fonction, c'est sûrement la seule dans laquelle je suis douée, et l'idée de voir les filles représenter ma danse m'enthousiasme tellement que je peux à peine tenir en place.

L'impatience dans le creux de mon estomac est quelque chose de nouveau, j'aime cette sensation.

— Bonjour les tourtereaux, qu'est-ce que je peux faire pour vous ?

Une femme d'une cinquante d'année aux joues bien pleines avec une chevelure d'un rouge profond sort des allées de fleurs pour venir se glisser derrière le comptoir où on attend.

Je tousse en articulant.

— Non non, nous ne sommes pas des tourtereaux, je mime un vomi avec mon doigt, et Jack me fusille du regard.

La petite dame s'essuie ses mains pleines de terre sur son tablier gris avec écrit en rouge pétant « bienvenue chez Tifleury », et elle se met à rire, pas du tout vexée par mon attitude froide.

— Ok ma jolie, quelle fleur vous faut-il ?

Vous devinez vraiment quelle fleur il nous faut ? Demandé-je en lisant le petit écriteau sur le comptoir en bois où sont disposés plusieurs vases transparents avec des boutons de roses et des petits galets « Tiffany devine pour vous les fleurs qu'il vous faut »

— Si vous me mettez au défi très chère, avec grand plaisir.

Elle fait le tour du guichet et vient se planter devant moi, les poings sur les hanches. Elle m'observe de haut en bas puis plonge ses petits yeux marrons dans les miens.

— Qu'est-ce que vous avez de plus sombre dans ce magasin ? me nargue Spicher qui nous observe.

Je montre les crocs alors qu'il sourit, fière de lui.

Tiffany disparaît derrière une allée de géraniums. Je les reconnais, car ma mère aimait les cultiver dans la serre de notre maison. J'aimais m'y réfugier quand j'étais petite, comme une seconde maison, j'aimais l'odeur de la terre, d'humidité et du tendre parfum floral. Ma mère y passait tellement de temps que c'était devenue son odeur à elle, j'ai continué à me rendre dans cette serre un an après sa mort, chaque jour, me recueillant et imaginant que ma mère lèverait le nez d'un de ses pots qu'elle était en train de fourrer de terre et de sable. J'aimais lui apporter mon petit arrosoir bleu rempli et arroser tout ce qu'elle me disait de mouiller. La vie me paraissait ensoleillée quand elle était là, comme la plus belle des danses, une atmosphère, une odeur, et je suis de nouveau avec elle dans cette serre, innocente, heureuse.

Sincity Frozen Campus Où les histoires vivent. Découvrez maintenant