Au bord de la noyade

27 1 0
                                    

Une fois de retour sur le bateau, tout le monde semblait ravi d'avoir volé le présent de la cour du roi, sauf moi. Ce sont des voleurs, rien d'autre, des traîtres, des menteurs. Mon frère avait participé à ce vol. Lorsque je suis retourné sur le bateau, il m'a dit qu'il était conscient des risques, que désormais ils étaient probablement recherchés par les gardes du roi, et que par conséquent j'étais moi-même recherché alors qu'ils s'étaient seulement servis de moi. Bien sûr, tout l'équipage est au courant, même Auguste savait ce qui se tramait. Mais pas moi, on ne m'avait rien dit, on avait caché la vérité. J'étais en colère, très en colère. Je me sentais trahie et je passais probablement pour une idiote. Parce qu'on m'avait menti, encore. S'il y avait eu certaines personnes pas au courant de ce qu'il allait faire, je me serais sentie moins seule, mais là j'étais la seule à ne pas être au courant et cela me mettait encore plus en colère. Je dévisageais tout le monde, ils sautaient de joie et certains commençaient à chercher des verres et se servaient du vin, ils ramenaient des tonneaux. Je restais stoïque pendant un moment et puis ils se servaient des verres. Personne ne semblait gêné que l'on m'ait menti. Non, mais là c'est trop, je refuse de me taire et de laisser passer ça. J'ai poussé un cri et ai jeté leur verre par terre, leurs verres se sont brisés au sol et ont explosé. Certaines personnes ont reculé. J'avais surpris tous ceux qui étaient à bord. Si je pouvais les tuer, je jure sur ma vie que je l'aurais fait. Il m'avait dit que je faisais partie de leur équipage, qu'ils me traitaient en tant que tel, comme l'un de leurs membres, mais c'est entièrement faux, sinon il ne m'aurait probablement pas caché cette vérité. Pourquoi ne m'ont-ils rien dit ? Pensait-il que j'étais trop bête pour ne rien révéler ? Croyait-il que j'allais trahir leur plan au prince ? Qu'allais-je tout gâcher ? Ou était-ce autre chose, simplement parce que je suis une fille, et qu'ils pensaient que j'étais incapable de participer à leur plan.

Elynn : Tout le monde s'est jouer de moi ! Et vous n'avez même pas pensé à m'en parler pour me tenir informée ! Ne serait-il pas bon de lui dire, n'est-ce pas ? Oui, car désormais Elynn est également recherchée par le roi, alors que moi, on s'est juste servie de moi ! En plus, mes amis, ceux que je considérais comme mes véritables amis, et eux qui devaient me considérer comme un membre de l'équipage, ne me considèrent même pas comme tel ! Tout le monde m'a menti ! Vous vous êtes tous servis de moi ! Alors je ne fais même pas partie de cela ! Et maintenant, ma tête est peut-être mise à prix à cause de vous, alors que je n'étais même pas au courant des choses tordues que vous avez faites ! dis-je, folle de rage.

Personne n'osait dire quoi se soit. Je pleurais d'énervement. Je devais passais probablement pour une folle. Je veux juste essayer de comprendre.

Elynn : J'aurais pu vous soutenir, vous aider, même si je ne suis pas d'accord avec le fait de voler ! Ce n'est pas toi, Léon, qui m'as dit un jour que pour m'acheter une robe, il fallait travailler dur ? Tu préfère voler plutôt que travailler, et pourtant tu oses me donner des leçons sur ce que je fais, alors que tu agis encore plus mal que moi ! Je ne veux plus que quiconque me dise quoi faire ou ne pas faire, car après tout, je fais ce que je veux, quand je veux, et comme je le veux ! Vous êtes des menteurs, des profiteurs, des lâches, des traîtres, des voleurs ! hurlai-je.

Je reprenais mon souffle après avoir parlé sans m'arrêter. Je prenais conscience que j'avais gâché leur foutue soirée, mais ils venaient de gâcher la mienne et j'espère qu'ils l'ont bien compris. C'était mon rêve d'aller à un bal, c'était mon rêve de petite fille. Et ils viennent de le briser. Moi qui croyais qu'on me considérait comme tout le monde, mais non, et mon frère ne m'a rien dit. Même mon propre sang, lui qui fait partie de ma famille, m'a menti. Et Léon, je pensais vraiment qu'il commençait à m'aimer, mais je me suis trompée. Je suis partie énervée en pleurant dans la chambre. Mais quelle bêtise ai-je faite en pensant qu'il me considérait comme l'un des leurs ? Je ne ferai jamais partie de leur groupe. Mais qu'ai-je réellement cru ? Je pense que si j'avais été un homme, tout aurait été différent, je pense qu'il m'aurait dit ce qu'il s'apprêtait à faire. Les hommes pensent déjà que les femmes en 2024 ne peuvent rien faire, alors dans les années 1700 c'est encore pire. Qu'ai-je bien pu penser ? Je devrais rentrer chez moi, laisser mon frère là où il est. Je veux aider et sauver tout le monde, mais qui me sauve, moi ? En réalité, pendant que j'aide les autres et que je fais tant de choses pour eux, ils complotent dans mon dos et me mentent. Certains ont essayé de s'excuser auprès de moi ces derniers jours, mais je les ai rejetés. Je ne veux plus qu'on me parle, car des excuses ne suffisent pas pour tout oublier et passer à autre chose. Je vais leur faire comprendre que cela m'exaspère. Léon avait bien compris que les excuses ne servaient à rien. Pendant les repas, chaque fois que je prenais mon assiette, je partais en leur jetant des regards noirs. Edgar était le seul à qui j'autorisais à me parler. En réalité, il avait essayé de me le dire plus tôt hier dans la journée, mais je n'avais pas compris. Ils avaient tenté de me le dire. Je pleurais dans les bras d'Edgar. Il venait de m'avoué qu'il avait eu une fille avant, du même âge que moi, prénommée Maya, décédée tragiquement. Parfois, lorsqu'il me voyait, il pensait à elle. Il m'avait assuré que la situation s'arrangerait et que je devais cesser de ressasser, et il avait raison. Edgar m'avait dit que j'avais bien fait comprendre à tout le monde mon énervement. Il avait affirmé que si j'étais sur ce bateau, je devais être considéré comme l'un des leurs, sinon je n'avais rien à y faire. Il leur avait clairement exprimé cette pensée. J'avais déclaré que je partirais si je n'étais pas considéré comme l'un des leurs. Il avait souligné que j'avais réussi à sensibiliser les autres, en leur rappelant que nous devions être solidaires les uns envers les autres et ne pas blesser l'un des nôtres, ce qu'il avait lui-même respecté. Pour moi, il était comme un grand-père. Depuis plusieurs jours, une forte tension régnait, créée par mes propres actions. En début de journée, je me tenais sur le navire lorsque Auguste est venu me retrouver. J'en voulais un peu à ce garçon car il était au courant de leur secret. Cependant, il n'était encore qu'un enfant et je ne pouvais lui en vouloir longtemps. Il m'avait confié de nombreux détails sur son passé, notamment le décès de ses parents causé par des pirates. C'est pourquoi, au début, il les détestait et avait insulté Léon. Maintenant, il en veux plus au pirate et se réjouit d'être à bord de ce navire, qui est devenu une famille pour lui. Il m'avait confié qu'il espérait que ce soit aussi une famille pour moi un jour. Ses paroles me touchaient, il trouvait toujours les mots pour me réconforter. Auguste nous avertit qu'il ne fallait pas rester ici, car en regardant dans la longue-vue, il avait repéré une tempête à l'ouest et nous foncions droit vers elle. Effectivement, plus nous avancions vers l'ouest, plus les vagues devenaient imposantes, et le ciel se couvrait de gris derrière nous. Alors que le ciel était encore dégagé devant nous, nous nous éloignions de la clarté pour nous aventurer vers la tempête. Mon instinct me prévenait qu'il allait se passer quelque chose de terrible. Je ne savais pas ce qui allait se passer, alors je serrais mon collier dans ma main. Peu importe les événements à venir, je savais que j'avais mon dispositif de remontage temporel. Bien sûr, j'aurais pu l'utiliser à plusieurs reprises, mais je savais que le collier n'était pas un jouet et que son utilisation incorrecte pouvait être dangereuse. Mon estomac me faisait mal, un pressentiment me disait qu'il allait se passer quelque chose. Il faisait jour, quelques heures plus tard. C'était la tempête cette fois-ci, mais c'était différent : il n'y avait pas d'orage et la pluie était moins forte que la dernière fois. Cependant, de grosses vagues se formaient. J'étais à l'arrière du bateau lorsque j'ai aperçu un rocher droit devant nous. En criant à William, je lui ai signalé : << Rocher droit devant ! >> Je me demandais ce qu'il faisait en haut des mailles, car c'était à lui de prévenir en cas de danger. Malheureusement, il était trop tard : le bateau et le rocher sont entrés en collision. Un trou s'est formé dans la coque. Alors qu'une vague s'est abattue sur le bateau, je n'ai pas eu le temps de m'accrocher à quelque chose et elle m'a entraîné dans les profondeurs. Je me débattais au creux des vagues, tentant de remonter à la surface, mais à chaque fois que j'entrevoyais la possibilité de m'en sortir, une nouvelle vague s'abattait sur moi. Je voyais le bateau s'éloigner à l'horizon. Je ne savais même pas s'ils m'avaient vu tomber. Mon pressentiment s'était révélé juste. La peur me submergeait. Tous mes sens étaient en alerte, l'adrénaline montait en moi. J'essayais de reprendre mon souffle mais je n'arrivais pas à émerger. La réalisation de ma propre mort m'envahissait. Mon cœur battait la chamade et malgré mes appels à l'aide, aucun son ne franchissait mes lèvres. Je touchais mon collier dans un geste désespéré, espérant remonter le temps, mais l'action était si difficile à accomplir dans la tourmente des vagues. Ma poitrine se comprimait, puis soudain, un impact brutal sur mon crâne m'assomma. Quelques heures plus tard, je me suis réveillé sur un rocher au milieu de l'océan. Ma vision était floue. La tempête s'était calmée, les vagues étaient plus douces, le ciel était bleu. Ma tête me faisait mal et tout tournait autour de moi. J'ai réussi à me relever péniblement, mais il n'y avait rien en vue. Le bateau avait coulé. J'ai touché ma tête, j'ai dû m'évanouir et suis resté inconscient. Pendant longtemps, j'ai failli me noyer, mais ma tête a violemment heurté un rocher, les vagues me happant dessus. Observant ma main, du sang s'écoulait de ma tête. Merde, j'espère que ce n'est pas aussi grave que je le crains. J'avais avalé de l'eau de mer, j'avais soif, ma gorge était desséchée et du sel s'était logé dans ma gorge. Mon pantalon et mon t-shirt étaient trempés, me demandant comment m'en sortir. Je me demande comment j'ai survécu ? J'avais certainement de la chance les vagues ont du me ramener sur ce rocher. Grimpant sur le rocher où je me trouvais, je savais que j'étais en sécurité, du moins je l'espérais, car les vagues ne pouvaient plus m'atteindre. J'étais sur le point de mourir sans eau ni nourriture, et je n'avais que trois jours pour trouver une solution. Si personne ne me trouve accrochée à ce rocher, je vais mourir. Même si je remontais le temps, je doute que j'arriverais à éviter cette situation entre le rocher et le bateau. Je n'ai pas l'intention de remonter le temps, quelque part au fond de moi. Je pensais qu'ils reviendraient me chercher. Il était hors de question que je meure ici, j'avais froid et je sentais que j'allais mourir de froid. Une hypothermie était imminente, c'était long. L'attente était interminable, une nuit passée et une deuxième. J'ai pleuré toutes les larmes de mon corps, la nuit était horrible car j'entendais les vagues battre contre le rocher et à chaque fois, j'ai cru que j'allais mourir. J'avais peur de l'obscurité, mais c'est une mouette qui m'a réveillée le matin en me picorant avec son bec. Je n'arrêtais pas de me répéter, sois forte. Tu dois résister contre le froid, contre la peur. Ils ont forcément remarqué que j'avais disparu. William avait vu que j'étais sur le bateau, mes yeux se fermaient de fatigue et je sentais que je commençais à m'endormir. Deux heures plus tard, je fus réveillée par des voix. J'essayai de me réveiller, de me relever, mais je n'avais pas assez de force. Je vis un bateau et des hommes. J'avais l'impression de reconnaître des voix. Pour autant, il était impossible que ce fût eux, ce devait être le fruit de mon imagination et de mes rêves. J'avais cru que j'allais mourir, secoué par ce sentiment, et j'avais cru apercevoir les visages de Léon et d'Oscar. Mais c'était impossible. Je me sentais de nouveau emporté par les vagues, et je me suis réveillé quelques heures plus tard sur une barque. Je ne savais pas avec qui j'étais, mais je me rappelais la sensation de ma gorge brûlante de soif, ma peau me démangeant et me brûlant, le soleil m'avait brûlé. La seule chose dont j'étais vraiment sûr, c'était que j'étais en vie. J'avais entendu une conversation, il semblait que nous n'étions plus dans l'océan Atlantique, mais dans la Manche, et qu'ils prévoyaient de se rendre en Méditerranée. On se trouvait loin de l'endroit où ils voulaient aller, mais l'essentiel était que je sois sortie vivante de tout ça. J'essayais de rouvrir les yeux, mais en vain. À un moment donné, on m'a secourue et me voilà avec d'autres pirates. J'ai cessé de me battre et j'ai pris du repos...

La voyageuse du temps : 1669 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant