Explication

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Nous nous trouvons désormais dans son bureau et j'attends ses explications. Un silence pesant régnait. L'attente devenait insupportable. Mon cœur battait à tout rompre. Je me souvenais de notre première rencontre, lorsque j'avais été plaquée sur son bureau. Rien que d'y penser, je sentais mes joues s'embraser. Mon visage devait être écarlate. J'espérais qu'il avait une explication valable pour m'avoir blessée et que je pourrais lui pardonner et oublier, même si je savais que certaines de ses actions seraient impossibles à effacer de ma mémoire. Mon regard se posa sur sa carte et son compas posés sur le bureau. Il prit le compas et commença à jouer avec, agaçant ma patience déjà mise à rude épreuve. Finalement, n'y tenant plus, je lui arrachai le compas, exaspérée par cette attente interminable. Ma patience avait atteint ses limites.

Elynn : Vas-tu me répondre oui ou non ? C'est à cause du coup de pied tout à l'heure que tu as perdu tes couilles pour parler, d'habitude tu trouves toujours des choses à raconter ! dis-je impatiente.

Il me regardait surpris. Je me rassis en soufflant. Je n'aime pas attendre. J'ai tellement peur de ce qu'il s'apprête à me dire. Pourquoi est-il si long ? Je tripotais mes doigts nerveusement. Puis, il prit un autre objet, sa boussole. Je levai les yeux au ciel, agacée.

Léon : La patience n'est pas l'une de tes qualités ! dit-il en retenant un rire.

C'est vrai que je ne suis pas patiente, mais cela fait tellement longtemps que j'attends une explication et je peux en avoir une, j'attends juste qu'il parle. Et il est très long à parler. J'ai tellement envie de l'embrasser tout en ayant envie de le frapper, il me fait cet effet-là à chaque fois.

Elynn : Et toi, la sincérité n'est pas l'une de tes qualités ! dis-je en répliquant.

Je parlais sur le même ton. Il leva les yeux vers moi. Des papillons se sont agités dans mon ventre. Il ouvrit la bouche pour commencer à parler.

Léon : Ce n'est pas toi que je voulais droguer, je sais que tu ne m'aurais jamais cru, tu ne m'aurais jamais pardonné ! J'ai découvert qu'un de mes hommes m'avait trahi, alors j'ai voulu le droguer pour l'abandonner sur une île. J'avais préparé une gourde pour toi et une gourde contenant de la drogue ! Et j'ai confondu les gourdes. Je me suis rendu compte que tu avais du mal à marcher droit, j'ai compris mon erreur ! dit-il en racontant son récit, il continua à parler.

Il m'a drogué par accident. Je veux bien lui pardonner cela, mais le reste ?

Léon : Quand tu as perdu l'équilibre, je t'ai rattrapée, puis je me suis rappelé que quelqu'un m'avait dit qu'il existait un moyen pour que le collier fonctionne, mais il fallait que tu sois à des kilomètres de moi ! Tu vas sûrement te demander pourquoi je ne t'ai pas laissée dans une ville, mais la réponse est simple : une ville t'aurait exposée à des individus dangereux, potentiellement agressifs et alcoolisés. Je ne pouvais pas te laisser dans une ville, c'était plus sûr sur une île déserte, crois-moi ! Alors, quand tu étais allongée inconsciente sur le sable, j'ai saisi l'opportunité de récupérer ton collier ! De toute façon, je pensais que tu ne me pardonnerais pas, alors autant en profiter pour voler ton collier ! Je n'aurais pas pu utiliser le collier si tu étais à bord du navire ! m'expliquait-t-il.

C'est vrai que je suis peut-être plus en sécurité sur une île déserte seul que entourée de fous en ville.

Léon : Si tu savais combien j'ai voulu faire demi-tour, puis Billie a fini par le savoir, et j'ai fini par faire demi-tour également pour te retrouver, mais tu étais introuvable. Alors j'ai déduit que ton frère t'avait retrouvé! J'ai ensuite essayé de partir à ta recherche, mais aucune trace de toi jusqu'à ce jour où tu as pointé! Je me suis tellement senti mal de t'avoir fait autant de mal, et j'en souffrais aussi. Quand je t'ai vu, je me suis dit que je ne pouvais pas te laisser partir, je venais tout juste de te retrouver! J'ai passé mes journées entières à regretter ce que je t'ai fait," dit-il.

Je m'étais promis de ne pas pleurer. Il avait l'air de s'en vouloir. Il avait fait demi-tour. Il m'avait cherchée. Mon cœur s'accélérait, il avait fait demi-tour, je me répétais cette phrase.

"Léon : Quand je t'ai vu te balader sur le navire, je n'ai pas pu supporter. Je me suis dit que si tu étais loin de moi, j'oublierais ta présence et ce que je t'avais fait. Je suis un connard, tu peux le dire ! Avant toi, je n'avais jamais ressenti tout ça. Et quand tu es près de moi, je n'arrive plus à rien ! Je perds mes moyens, je ne contrôle plus rien. Ça ne m'était jamais arrivé ! Et puis, tu me fais penser à elle, et je n'y arrive pas parce que ça me rappelle qu'elle est morte. J'ai essayé de la ramener avec le remonteur de temps, mais c'est toujours la même chose : la maladie finit toujours par la tuer ! dit-il d'une voix accablée.

Il ressent quelque chose pour moi, alors le jour où nous nous sommes embrassés, c'était sincère? Oui, ça l'était ! Je ne savais ni quoi dire ni comment agir. Et il avait voler mon collier pour sa sœur car il l'aimait. Je peux lui pardonner, mais les choses auraient pu être tellement différentes s'il avait agi autrement. Il aurait pu me parler et on aurait trouver un moyen ensemble. Mais il a préféré choisir la voie facile en me laissant sur une île. Léon se levait, énervé, et balançait ses affaires, il était en crise de nerfs. Je sursautais. Qu'est-ce qui lui prend ?

Léon : Je fais n'importe quoi ! crie-t-il.

Il parle de sa sœur. Il pousse un cri de rage. Je sais ce que c'est que de perdre un proche, en pensant à ma mère. Quand je l'ai perdue, je suis passée par la tristesse, puis ma tristesse s'est transformée en colère. Je commence tout juste à accepter qu'elle ne soit plus là. C'est mieux ainsi, maintenant elle ne souffre plus. Il faut qu'il comprenne que sa sœur est mieux là où elle est qu'avec les vivants. Vivre, c'est souffrir...

Elynn : Tu parles de ta sœur ! dis-je.

Il s'arrête. Il me regarde. J'ai attiré son attention. Il pose l'objet qu'il s'apprêtait à balancer.

Léon : Qui t'a parlé d'elle ? dit-il, étonné.

Elynn : Anne ! dis-je.

Léon : Noémie ! Elle aurait dû être là avec moi ! Mais la maladie l'a emportée. Si seulement...

Léon pleurait. Je n'avais jamais vu Léon dans cet état. Il me brisait le cœur.

Léon : C'est elle qui m'avait offert cette boussole. Elle ne fonctionne plus mais je ne peux pas la jeter ! dit-il en essayant de retenir ses larmes.

Je comprends maintenant pourquoi il agit ainsi. Pendant tout ce temps, il aurait peut-être pu essayer de m'expliquer, j'aurais pu comprendre, j'en suis sûr. Cela m'aurait évité de souffrir. J'avais froid et chaud, et mal au cœur. Je m'apprêtais à dire quelque chose quand je m'écroulai...

La voyageuse du temps : 1669 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant